Dans notre parution N°2705 du 04 juillet 2018, nous avons alerté l’opinion sur le drame qui se prépare dans un litige opposant la société civile immobilière Magnum Sarl à certains acquéreurs. Le litige concerne un domaine appartenant à la Collectivité Anthony et situé derrière l’usine Dodo Cosmetics à Baguida. Contre toute attente, des engins de démolition ont été déployés hier (ndlr, mardi) et rasé les habitations, laissant hommes, femmes et enfants sans abris.
Ce que l’on redoutait a fini par se produire. Hier (ndlr, mardi), les riverains du nouveau Port de pêche en construction ont reçu la visite des forces de sécurité. Ce détachement avait pour mission de conduire les opérations de démolition des maisons des riverains.
En quelques heures, les engins ont enlevé les constructions. « Ils sont venus avec des engins de démolition et des forces de l’ordre. Ils ont rasé les maisons et quand nous avions essayé de prendre des images de la démolition, ils nous en ont empêchés. Les soldats ont retiré le téléphone d’un des nôtres et l’ont endommagé en le jetant », explique un riverain.
« Nous n’avons que nos yeux pour pleurer. C’est difficile de voir le travail de toute une vie partir comme ça. J’ai travaillé toute ma vie pour acheter ce terrain et construire la maison. Aujourd’hui, je vois que tout ce que j’ai fait a été réduit en néant. Je me demande si j’ai encore la force de reprendre tout ça », se plaint un autre.
Cette opération de démolition a été menée sans tenir compte de la dimension sociale de la chose. En effet, plusieurs personnes se retrouvent aujourd’hui sans abri, y compris des élèves.
« Nos enfants sont revenus de l’école et se retrouvent en plein air. Certains passent leurs examens pendant que d’autres sont en période de révision pour les examens. Cette situation les déstabilise. Ils sont très perturbés. Ces genres d’opérations ne se font pas de cette manière », déplore une dame.
Sur le terrain, c’est la démolition pour les occupants de la dizaine de maisons abattues. Les femmes et les enfants veillent sur les affaires, mais la principale préoccupation c’est ce qui se passe après. « Nous sommes très inquiets parce que nous sommes obligés de dormir dehors avec nos familles. C’est très difficile la situation dans laquelle nous nous trouvons. Pourtant, notre seule faute est d’avoir acheté des terrains ici », se plaint un père de famille.
D’après les informations, les agents qui conduisaient l’opération ont confié à certains riverains que la démolition a été ordonnée parce que certains auraient été indemnisés.
« Quand je discutais avec un agent, il m’a fait comprendre que les gens ont acheté des terrains ici ont été indemnisés. C’est une information que nous avons de la peine à accepter. Si on nous avait proposé des indemnisations, nous aurions accepté. Ce que je comprends, c’est que certains sont partis négocier leur indemnisation en catimini. Il est donc évident qu’on nous exproprie alors que nous sommes dans nos droits. Si certains ont été indemnisés, c’est parce que ceux qui réclament ces parcelles savent qu’ils sont en train d’opérer un passage en force », analyse une source.
Dans ce dossier, tout porte à croire que les agents de l’Etat, des magistrats et des avocats ont joué des rôles troubles. En 2013, alors que les riverains s’étaient déjà installés sur le domaine, le ministre de l’Economie et des Finances a bradé les terrains à moins de 2 millions FCFA. Le domaine a été ensuite réclamé par le sieur Kandja Essoh puis par la société immobilière Magnum Sarl. C’est cette dernière qui est à l’origine des démolitions.
G.A
Source : Liberté No.2710 du 11 juillet 2018
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