Togo: Kao Baobadi, l’architecte de l’immeuble défectueux de la LONATO, ses deux appartements à Dubai…

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Kao Baobadi

Dubaï, le nouveau paradis fiscal des proches du dictateur togolais Faure Gnassingbé, coin idéal pour les courses des maîtresses de la République, endroit où les centaines de millions puisés dans les caisses du contribuable togolais sont dilapidés dans des vacances dorées par les nombreuses femmes qui gravitent autour du pouvoir de Lomé. Pas étonnant que c’est dans cette ville qu’on a déniché, grâce à des bases données, des biens immobiliers de certains proches du régime de Faure Gnassingbé qui vient de s’offrir une nouvelle constitution pour demeurer ad vitam æternam à la tête du Togo.

Petit pays de l’Afrique de l’Ouest, le Togo est sous la coupe d’un règne absolu d’une seule famille (Gnassingbé, de père en fils) depuis 57 ans. Faure Gnassingbé, qui a succédé à son père dans un bain de sang (811 morts, selon le rapport de la Ligue togolaise des droits de l’Homme, LTDH) en 2005, après 19 ans de pouvoir, vient de faire voter une nouvelle constitution pour un pouvoir à vie. Les caractériels de ce pouvoir despotique et dynastique, c’est l’enrichissement illicite de la famille présidentielle et ses proches, le pillage des ressources, la mal gouvernance, la corruption, la torture et autres crimes de sang, les élections frauduleuses, les coups d’État et coups de forces permanents, le népotisme, etc.

Les scandales financiers impliquant les tenants du régime et leurs proches sont légion, mais les auteurs bénéficient d’une impunité totale. Parmi les proches du monarque Faure Gnassingbé, qui excellent dans des scandales financiers se trouve le sieur Kao Baobadi. Pas étonnant que le nom de ce dernier apparaisse dans la base de données de ceux qui mènent une vie princière à Dubaï, dilapidant ainsi l’argent du contribuable.

Un architecte sulfureux qui traîne des casseroles

Cacaveli, une banlieue au nord de la ville de Lomé et à quelques encablures de l’une des nombreuses résidences de Faure Gnassingbé, se trouve le domicile de l’architecte Kao Baobadi. Le Directeur général du cabinet d’étude d’architecture TATA-I dont le siège se trouve à côté de l’hôtel O’Kabou à Doumassessé se fait discret depuis un certain temps. Ses proches évoquent des soucis de santé.

Mais son nom continue de résonner dans plusieurs scandales de la République. En 2012, L’Alternative avait déjà consacré un dossier fouillé sur les magouilles de ce proche du régime de Lomé et les méthodes dont il recourt avec son associé Kpatcha Bassayi, DG de l’entreprise CENTRO (Consortium des Entreprises Tropicales) pour faire main basse sur des marchés publics qu’ils exécutent dans des conditions opaques.

Dans les années 2000, une de leur magouille avec l’entreprise CENTRO a fini au tribunal de Lomé et devant le général Gnassingbé Eyadema. En effet, l’Union européenne (UE) avait débloqué des fonds pour la construction et la réhabilitation des infrastructures de santé sur l’ensemble du territoire. Le cabinet d’étude d’architecture TATA-I a été retenu comme bureau d’études. Et un appel d’offres a été lancé pour les entreprises d’exécution des travaux.

L’UE découvre plus tard sur les documents que le sieur Kao Baobadi signait les documents au titre du cabinet d’architecture et en même temps comme Directeur général d’une des entreprises d’exécution, notamment CENTRO. Un conflit d’intérêt gravissime pour les partenaires. Il faut rappeler que les deux entités à savoir TATA-I et CENTRO partageaient le même immeuble comme bureaux à Dumassessé.

Le nom de Kao Baobadi est également revenu dans le scandale de la construction de la cité OUA, où il avait obtenu la réalisation de quelques villas. Dysfonctionnements, plans inadaptés, surfacturations, actes de corruption sont les dessous de la conduite de ce projet. Mais c’est avec la Loterie Nationale Togolaise (LONATO) que les scandales seront encore plus retentissants.

Kao Baobadi, le controversé architecte qui s’arroge des marchés exclusifs de la LONATO

Le patron du bureau d’études d’architecture TATA-I est un proche de Kudjow-Kum Pekemsi. Ce dernier était jusqu’à son décès, fin septembre 2017, l’inamovible Directeur générale de la LONATO, l’un des bras financiers du régime, qui gérait cette régie financière de l’Etat comme sa propriété privée mais qui, selon plusieurs sources, a réussi à planquer beaucoup d’argent au Canada.

Le DG de la LONATO octroyait donc au cabinet TATA-I, sans appels d’offres, tous les marchés de construction ou de réhabilitation des agences de la société étatique des jeux de hasard sur le territoire togolais. Les travaux sont généralement entourés d’une grande opacité, avec des coûts qui relèvent du mystère.

Seuls le DG de la LONATO et celui du cabinet TATA-I ont le secret de l’exécution de ces marchés et le montant des transactions. Plusieurs sources au sein de la société évoquent des surfacturations du simple au double, voire plus dans la réalisation des travaux de ces agences. Le plus gros scandale reste à venir.

LONATO : 7 milliards de F CFA engloutis dans la construction d’un immeuble défectueux

C’est le plus grand immeuble à risque aujourd’hui à Lomé. Située sur le boulevard circulaire, cette bâtisse d’une dizaine d’étages, ancien siège de la LONATO, est récemment évacué par le personnel après 3 ans d’occupation. La conception de cet immeuble défectueux porte la marque du cabinet TATA-I de Kao Boabadi et l’exécution des travaux comme par hasard, a été confié à l’entreprise CENTRO dont le sieur Kao Baobadi était un associé voire le Directeur général, avant de feindre un éloignement, après le scandale du financement des infrastructures par l’Union européenne.

Du côté de la LONATO, l’on a fait croire que l’entreprise CENTRO a gagné ce marché à la loyale suite un appel d’offres transparent. Six entreprises ont participé à cet appel d’offres à savoir CPAC-SXSEC : 7, 045 857 milliards de F CFA ; WIETC : 4, 594 634 milliards de F CFA ; ECOAT : 3,684 345 milliards de F CFA ; ENTTP : 3, 655 396 milliards de F CFA ; CECO BTP : 3, 876 146 milliards de F CFA et finalement CENTRO 6, 969 491 milliards de F CFA.

CENTRO, qui avait fait une offre de 5,90535 milliards de F CFA, a curieusement dû revoir à la hausse ses prétentions, après ouverture des plis. Ainsi, 1, 078 956 milliard de F CFA s’est ajouté à l’offre du départ comme par alchimie.

L’exécution des travaux a connu diverses péripéties, avec une rallonge des coûts, un avenant dont le montant réel reste à déterminer, même si des sources autorisées parlent de 9 milliards de F CFA.

Après une longue période de travaux marquée par des pauses sur le chantier, on s’en est sorti avec un immeuble totalement défectueux qui nécessite de nouveaux travaux de réparation. De l’avis de plusieurs experts, cet immeuble ne pouvait pas engloutir autant de milliards de nos francs.

En plus, il est aujourd’hui à l’abandon, le temps de trouver des moyens supplémentaires pour corriger les anomalies. Le duo TATA-I – CENTRO est de nouveau au cœur de ce scandale et comme d’habitude, leur proximité avec le pouvoir de Faure Gnassingbé leur garantit une impunité totale.

L’affaire fait la une des journaux, l’immeuble suscite des inquiétudes auprès des riverains, mais les choses n’iront pas plus loin. Ingrid Awadé, la nouvelle PCA de la LONATO n’a pas demandé des comptes au Directeur général de CENTRO, son associé sur plusieurs autres projets. Quant à Kao Baobadi, il a également obtenu de la part de son protecteur la conception de l’actuel nouveau siège de la LONATO situé au carrefour dit GTA à Lomé.

Deux appartements à Dubai avec l’argent de la corruption?

La plupart des barons du régime ou des proches du pouvoir s’offrent des résidences ou appartements à l’étranger. Une manière de se mettre à l’abri, mais aussi un investissement de l’argent de la corruption ; du blanchiment n’est-ce pas !

Dans les données de Dubaï sur lesquelles nous avons pu mettre la main, on retrouve deux appartements du sieur Kao Baobadi d’une valeur totale de 345 millions de F CFA. Enregistrés sous le numéro 92 dans la région ALBarsh propriété d’Avalon Commercial, le premier appartement a une valeur de 447 863, 04$ soit 272 762 404, 35 de F CFA et le second à 117 686, 567$ soit 71 674 750, 82 de F CFA.

S’il est légitime pour un homme d’affaires de s’offrir des résidences ou appartements à l’extérieur, l’on est en droit de se demander si l’acquisition de ces biens immobiliers n’est pas le fruit de la corruption lorsqu’on se réfère au parcours de l’homme tel que nous l’avons décrit plus haut.

Pendant que le dernier bâtiment dont il est le concepteur est en souffrance sur le boulevard circulaire après avoir englouti presque 9 milliards de F CFA, il s’offre en toute impunité deux appartements à Dubaï. C’est ainsi que certains entrepreneurs bénéficiant d’une impunité totale du pouvoir dont ils sont proches, investissent l’argent de la corruption dans l’immobilier à l’étranger pour le blanchir.

L’autre question aussi peut être celle de savoir si monsieur Kao Baobadi est le vrai propriétaire de ces deux appartements ou a-t-il servi de prête-nom à l’ancien et inamovible Directeur général de la LONATO Kudjow-Kum Pekemsi qui a planqué l’argent de la corruption et l’enrichissement illicite partout dans le monde, et particulièrement au Canada.

©L’ALTERNATIVE et OCCRP

Source : 27Avril.com