Togo – Exclusif : Ce que dit le rapport de la CNDH sur les présumés braqueurs tués par le GIPN le 28 juillet 2019

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La Commission nationale des droits de l’homme (CNDH) a enquêté sur l’affaire relative aux présumés braqueurs abattus le 28 juillet 2019 par les éléments du Groupement d’intervention de la police nationale (GIPN).

Son investigation lui a permis d’avoir une idée de ce qui s’est réellement passé. Il en ressort un rapport dans lequel l’institution de promotion et de défense des droits humains fait le point de son travail et formule des recommandations. Lisez plutôt.

RESUME DU RAPPPORT DE LA COMISSION NATIONALE DES DROITS DE L’HOMME (CNDH) SUR L’AFFAIRE DES PRESUMES BRAQUEURS ABATTUS PAR LE GROUPE D’INTERVENTION DE LA POLICE NATIONALE (GIPN), LE 28 JUILLET 2019

La Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH), réunie en session plénière le 1er août 2019 s’est autosaisie de l’affaire des présumés braqueurs abattus par le GIPN le dimanche 28 Juillet 2019 à l’effet de faire la lumière sur cette affaire et situer l’opinion publique.

En effet, le dimanche 28 juillet 2019, la Police nationale a organisé une conférence de presse au cours de laquelle, elle annonça par le biais de son porte-parole que son unité chargée de la lutte contre le grand banditisme, le Groupement d’Intervention de la Police Nationale(GIPN) a abattu au petit matin, deux braqueurs au quartier Kanyi Kopé, derrière la clôture de l’usine SOTOTOLES. Ces déclarations de la Police ont suscité une vive réaction des parents des personnes abattues qui prétendent que ces deux individus présentés comme des braqueurs ont été enlevés à leurs domiciles respectifs dans la nuit du 27 juillet 2019 par des hommes dont certains habillés « en tenue de sodja » avant d’être abattus et présentés sur les médias et les réseaux sociaux. Ils accusaient la Police nationale d’exécution extra judiciaire.

En exécution de sa mission, la CNDH a mis en place un groupe de travail.

Le groupe de travail a procédé à des auditions et à des transports sur le terrain. Il a aussi ordonné des expertises.

Les investigations ont permis au groupe de travail de répondre aux interrogations suivantes :

1-Sur la personnalité des personnes abattues

-Le nommé AMOUZOU Koffi alias « Cimetière » est né en 1986 à Sagbado (préfecture du Golfe). Il est célibataire avec deux enfants. Il est menuisier de profession. Il est un repris de justice avec plusieurs antécédents judiciaires.

-Le nommé MLATAWO Dékpo est né en 1994 à Klémé Agokpanou Yébépé (préfecture du Golfe). Il est célibataire sans enfant et peintre staffeur de profession. Il n’a pas d’antécédents judiciaires. Selon ses parents, Dékpo est d’une bonne moralité. Il est dévoué, serviable et jovial.

2-Sur la descente des hommes dont certains en tenue de « sodja » au domicile de «Cimetière » dans l’après-midi du jeudi 25 juillet 2019

Le groupe de travail au regard des nombreux témoignages aussi concordants, les uns que les autres, conclut que le jeudi 25 juillet 2019, dans l’après-midi, des hommes dont certains en tenue de « sodja » sont allés rechercher « Cimetière » à son domicile.

3-Sur l’enlèvement de « Cimetière » et Dékpo dans la nuit du 27 juillet 2019.

Les informations recueillies au cours des investigations sont édifiantes et amènent le groupe de travail à conclure que dans la nuit du samedi 27 juillet 2019, « Cimetière » et Dékpo ont été enlevés à leurs domiciles par des hommes dont certains en tenue de « sodja ».

4-Sur les circonstances de la mort des présumés braqueurs

Au regard des éléments recueillis lors de l’enquête, le groupe de travail n’est pas arrivé à décrire les circonstances exactes dans lesquelles les présumés braqueurs ont trouvé la mort.

Toutefois, il est constant que ceux-ci ont été abattus à côté de l’usine SOTOTOLES. Par conséquent, le groupe de travail écarte l’hypothèse selon laquelle les présumés braqueurs auraient été tués ailleurs et leurs corps déposés audit lieu.

5-Sur la question de savoir si les personnes abattues étaient en opération de braquage

Les éléments recueillis lors des investigations n’établissent pas, même si l’un des présumés braqueurs a plusieurs antécédents judiciaires, que ceux-ci étaient délibérément sortis cette nuit pour aller commettre un braquage.

6-Sur la responsabilité du GIPN dans la descente au domicile de « Cimetière » le 25 juillet 2019

Le groupe de travail n’a pu recueillir des éléments probants qui établissent que ce sont les membres du GIPN qui se sont rendus au domicile de « Cimetière » dans l’après-midi du jeudi 25 juillet 2019. La responsabilité du GIPN ne saurait être engagée.

7-Sur la responsabilité du GIPN dans l’enlèvement des présumés braqueurs le 27 juillet 2019

L’unité du GIPN qui a participé à l’opération anti braquage comprend l’équipe opérationnelle composée de dix (10) agents et le commandement.

-Sur la responsabilité des membres de l’équipe de l’opération
Le groupe de travail n’a pu recueillir de preuves qui attestent que les membres de l’équipe opérationnelle ont participé à l’enlèvement des présumés braqueurs à leurs domiciles. Le groupe de travail par conséquent, émet un doute sur la responsabilité de ces agents dans l’enlèvement des présumés braqueurs à leurs domiciles.

-Sur la responsabilité du commandement du GIPN
Il ressort des investigations que c’est le commandement de l’unité du GIPN qui a mis en place l’opération anti-braquage qu’il a coordonnée à distance, ensemble avec les renseignements à lui fournis par son informateur. Le groupe de travail a constaté que l’informateur a joué un rôle prépondérant dans la mise en place et l’exécution de cette opération.

Toutefois, le groupe de travail n’a pas pu avoir accès à cet informateur. Dans ces conditions et en l’absence de tout autre indice, le groupe de travail ne saurait hâtivement conclure à la responsabilité du commandement.

8-Sur la responsabilité d’autres personnes susceptibles d’être auteurs de l’enlèvement des présumés braqueurs

Le groupe de travail au regard des éléments recueillis lors de l’enquête n’écarte pas l’hypothèse selon laquelle, les auteurs de l’enlèvement pourraient être des connaissances de ses présumés braqueurs.

CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS

A la lumière de tout ce qui précède, il est constant que les nommés AMOUZOU Koffi alias « Cimetière » et MLATAWO Dékpo ont été enlevés à leurs domiciles par un groupe d’hommes dont certains en tenue de « sodja » dont les identités restent à déterminer, avant qu’ils ne soient mis sur la route de l’équipe de l’opération du GIPN.

La Commission constate que le commandement du GIPN a mis en place l’opération anti braquage suite aux renseignements à lui procurés par son informateur.
La commission estime que l’audition de l’informateur permettra d’identifier les auteurs de l’enlèvement des présumés braqueurs.

La Commission recommande au garde des sceaux, l’ouverture d’une enquête judiciaire pour faire toute la lumière sur les zones d’ombre.

La Commission recommande au ministre de la sécurité et de la protection civile de garantir la sécurité de tous les parents, témoins et sachants qui sont intervenus dans le cadre de cette enquête.

Fait à Lomé, le 05 décembre 2019
Le Président

Nakpa POLO

Source : icilome.com