Le feuilleton de l’élection du maire et son adjoint dans la commune 2 du Bas-Mono se poursuit, non plus dans la localité d’Attitogon, mais à Lomé. Selon les informations en provenance de la Cour Suprême du Togo, les juges de cette instance s’apprêteraient à annuler le vote qui a eu lieu dans la Commune du Bas-Mono 2.
Tout est parti de l’élection du maire et son adjoint le 12 septembre 2019 dans le Bas-Mono. Alors que le couple Unir-Hysope se frottait les mains et célébrait sa victoire, les élus sont refroidis par les résultats. L’Alliance nationale pour le changement (ANC) et ses alliés de l’opposition remportent la mairie. Il fallait trouver le coupable et très vite, le conseiller municipal issu des rangs du Parti pour la démocratie et le renouveau (PDR) de Kolani Lardja, Yaovi Djagli est pointé du doigt. On lui reproche de n’avoir pas suivi les consignes du parti qui permettraient à Unir-Hysope de sortir gagnant.
Dans la même journée, le PDR publie un communiqué aux termes duquel Yaovi Djagli est exclu « pour insubordination et manquement grave à la discipline du parti ». La sanction : l’intéressé « n’est plus habilité, ni à parler, ni à agir au nom du parti en qualité de représentant ou d’élu ». Curieusement, ce parti allié de la dictature cinquantenaire des Gnassingbé saisit la Cour Suprême pour faire annuler l’élection. Et pourtant, tout a été fait selon les normes fixées par la loi. Le vote s’est déroulé au bulletin secret et les différents partis présents lors de cette élection, y compris l’Unir, n’ont dénoncé aucune irrégularité lors du processus qui a conduit au choix des élus de l’opposition.
La première réflexion sur cette affaire est relative à l’accusation portée contre le désormais ex-membre du PDR. Rien ne prouve jusqu’à ce jour que la personne dont la voix n’a pas été accordée au couple Unir-Hysope est Yaovi Djagli. Le vote étant secret, les 11 élus de cette commune ont pu chacun porter leur choix sur différents candidats. Si au sein de l’Unir même, le doute règne sur l’intention de vote des élus, au point où le parti soit obligé d’imposer le vote par empreinte digitale dans certaines localités, rien ne dit que c’est l’ex-élu du PDR qui a faussé compagnie au parti au pouvoir.
La seconde idée sinon interrogation que suscite cette affaire est la logique de la saisie de la Cour Suprême par les dirigeants du PDR. Au Togo, aucune loi ne confie la gestion des conflits internes aux partis politiques à la Cour Suprême. Les adhésions, les démissions, les cotisations, la participation aux activités du parti et les sanctions comme celles prononcées contre Yaovi Djagli sont réglées par les instances dirigeantes du parti. L’ANC l’a compris en annonçant des sanctions internes contre ses élus qui ont accordé leurs voix aux candidats du pouvoir. Le parti de Jean-Pierre Fabre n’a pas saisi la Cour Suprême pour quelque règlement que ce soit. Le PDR devrait faire pareil.
Mais l’enjeu dans cette affaire est l’imminence d’une décision des juges de la Cour Suprême statuant sur l’élection du maire et de son adjoint dans la Commune du Bas-Mono 2. Si cette Cour présidée par Akakpovi Gamatho se prononce sur cette affaire, elle aura fait preuve de zèle quelle que soit sa décision. Selon un spécialiste de la décentralisation que nous avons consulté, « il est impossible que la Cour Suprême invalide l’élection du maire ».
Mais si cette invalidation est prononcée – l’hypothèse n’est pas à exclure quand on connaît l’avidité du régime qui cherche à tout contrôler dans le pays – elle relancerait le débat sur les conditions d’organisation des élections au Togo puisque dans quelques mois, le pays va connaitre une nouvelle, celle du président de la République. Déjà, tous les signaux sont au rouge. La Cour Constitutionnelle n’est pas reconstituée, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) est constituée d’hommes acquis à la cause du régime et le fichier électoral est sujet à polémique. Tout ceci avec des juges qui roulent pour la dictature.
G.A.
source : Liberté
27Avril.com