Règne des fils à papa : Joseph Kabila, Ali Bongo, Faure Gnassingbé… le crépuscule

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Règne des fils à papa : Joseph Kabila, Ali Bongo, Faure Gnassingbé… le crépuscule

« Gabonaises, Gabonais, chers compatriotes. Je suis le Lieutenant Kelly Ondo Obiang, Commandant adjoint de la Garde Républicaine, président du Mouvement patriotique des jeunes des forces de défense et de sécurité au Gabon (MPJFDS. Le message à la nation du chef du l’Etat Ali Bongo visant à clore le débat sur sa santé a plutôt renforcé les doutes sur sa capacité à assumer les lourdes charges liées à la fonction de Président de la République… ».

C’est ainsi que le jeune officier gabonais annonçait le coup d’Etat d’hier, en prenant, avec quelques soldats, la radio nationale de son pays. Malheureusement ou heureusement (c’est selon), ce putsch n’a duré que quelques heures. Un assaut donné par les autorités gabonaises aurait permis de neutraliser les putschistes et le Lieutenant Kelly Ondo Obiang serait arrêté.

Même si cette tentative de coup d’Etat a échoué, elle aura quand même le mérite de reposer la problématique de la succession d’Ali Bongo. En effet, le fils de l’ancien président du Gabon, Omar Bongo (qui a régné pendant 42 ans), Ali Bongo est victime d’un Accident vasculaire cérébral (AVC) depuis le 24 octobre dernier. Cette maladie, l’a éloigné du Gabon, et donc de la gestion du pays depuis trois mois déjà. Lors de son discours de vœux à la nation gabonaise le 31 décembre dernier, c’était un Ali Bongo pale, fatigué qui arrive difficilement à bouger ses mains et à articuler les mots, qu’on a vu sur les écrans. Visiblement, la maladie l’a abîmé. Ce qui fait dire aux nombreux observateurs qu’il n’est plus capable d’assumer ses charges de Président de la République du Gabon. C’est d’ailleurs ce constat qui conduit aujourd’hui ces officiers à tenter ce coup d’Etat.

Mais ce fils à papa s’accroche au pouvoir, du moins ceux qui profitent de son règne. La dynastie Bongo tient d’une main de fer le Gabon depuis plus d’un demi-siècle. L’absence d’Ali Bongo depuis octobre a exacerbé la situation de malaise dans laquelle se trouve le pays depuis l’élection présidentielle d’août 2016 dont les résultats ont été contestés par l’opposant principal Jean Ping, un ancien baron du régime qui continue de revendiquer la victoire. Entre-temps, aux manifestations de rue pour réclamer sa victoire, le régime d’Ali Bongo répondait avec une répression d’une rare violence qui a fait plusieurs morts, des blessés et des réfugiés. Actuellement en convalescence au Maroc, Ali Bongo ne veut rien lâcher. Il veut continuer à diriger le Gabon, bien que physiquement atteint. L’annonce de son retour bientôt au Gabon, faite le 31 décembre dernier dans son discours, ne convainc pas les Gabonais.

Cette tentative de coup d’Etat au Gabon repose également le débat des fils à papa qui s’imposent aux populations dans les pays africains. La succession monarchique à laquelle on assiste dans certains pays d’Afrique au détriment de la volonté des peuples ne saurait prospérer, surtout au moment où les populations africaines sont animées par un désir de se libérer. Outre le Gabon aujourd’hui, les regards sont aussi tournés vers le Togo et la République démocratique du Congo (RDC).

Joseph Kabila, l’autre fils à papa qui veut imposer son homme de main aux Congolais

Avant ce coup d’Etat manqué au Gabon, les caméras du monde entier étaient braquées sur la RDC où Joseph Kabila tente le tout pour le tout pour imposer son homme de main au peuple congolais. L’élection présidentielle s’est déroulée depuis le 30 décembre dernier. La Commission électorale nationale indépendante (CENI) peine à proclamer les résultats que l’Eglise Catholique a déjà, grâce à ses 40 mille observateurs qu’elle a déployés sur toute l’étendue du territoire. Pour l’église, c’est le principal opposant Martin Fayulu qui a gagné cette présidentielle. Cette sortie de l’Eglise Catholique met visiblement en difficulté Kabila qui a voulu utiliser la fraude pour imposer son candidat. Du coup, la CENI ne fait que reporter la proclamation des résultats, invoquant la non-disponibilité de ceux de certaines régions.

Le fils de Laurent Désiré Kabila est sûr de son coup, puisque lorsque le peuple congolais sortira pour réclamer la vérité des urnes, son armée l’écrasera, comme savent si bien le faire ces fils à papa à la tête de certains pays africains. La tension est donc palpable dans le pays. Un carnage est en train d’être préparé. La situation n’a pas laissé indifférents les Américains qui ont voulu empêcher le massacre des populations par la dictature de Joseph Kabila. Depuis quelques jours, les Etats-Unis ont déployé des troupes au Gabon, prêtes à intervenir en RDC au cas où Kabila décide de massacrer sa propre population. Les Américains sont allés plus loin en demandant au régime de Kabila de proclamer les vrais résultats issus des urnes. L’entêtement de Joseph Kabila peut l’amener à fuir son pays, comme ces nombreux dictateurs dont certains finissent par mourir loin de leur terre natale.

Un message à Faure Gnassingbé

« Papa nous a dit de ne jamais laisser le pouvoir ». Cette phrase constitue un leitmotiv pour le fils à papa de Lomé qui s’accroche au pouvoir, malgré tout ce qui se passe dans son pays. Faure Gnassingbé refuse de comprendre que le monde évolue et que le règne à vie est révolu. Avec la complicité de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), il vient d’organiser un simulacre d’élections législatives qui lui permettront de se tailler une constitution lui garantissant un pouvoir à vie. Pour le moment, lui et son régime savourent tranquillement leur chef-d’œuvre du 20 décembre dernier, croyant que les choses resteront ainsi. Gilbert Bawara peut continuer de se moquer de l’opposition, notamment de la Coalition des 14 partis de l’opposition pour n’avoir pas réussi à empêcher les élections législatives.

Mais comme au Gabon et en RDC, Faure Gnassingbé et son régime risquent d’être surpris par la tournure que pourraient prendre les événements… Le monde évolue. Il est clair qu’on ne peut plus continuer à cautionner des aberrations comme celles qu’on voit au Togo. En tout cas, c’est le crépuscule du règne des fils à papa.

Source : L’Alternative No.764 du 08 janvier 2019

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