Même avec le gouvernement de la promotion des femmes, le Togo va de mal en pis !

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Il y avait une précipitation sans pareil à proclamer les résultats des dernières élections présidentielles du 22 février 2021. Ce qui fut fait en un temps non seulement record, mais matériellement impossible pour le mécanisme de dépouillement togolais.

Et quand le candidat de la Dynamique Mgr Kpodzro ; Dr. Gabriel Agbéyomé Messan Kodjo annonça déjà le soir du scrutin, avoir gagné ces élections entre 57 et 61 % des suffrages exprimés, il sera alors victime d’exactions et d’actes de violence, pour finalement être enlevé de son domicile le 21 avril 2021 avec un déploiement d’arsenaux de guerres par les forces spéciales, appuyées par des hélicoptères, des drones, des brouilleurs d’ondes.

Notons que la loi électorale prévoit un délai de 6 jours pour la proclamation des résultats, afin de pouvoir collecter, centraliser, vérifier et certifier les bulletins des quelques 9389 bureaux de votes. Jusqu’à ce jour les résultats des présidentielles du 22 février 2020, ne sont pas encore connus; détaillés par bureau ou circonscription de votes. Ils ne le seront peut-être jamais. Alors pourquoi pas, si tout est fait dans les règles de l’art.

Puis contre toute attente et malgré cet empressement va-t-en-guerre, le nouveau gouvernement ne sera connu que le 2 octobre 2020, presque 8 mois après. Et ce gouvernement formé par Victoire Tomegah Dogbe, la toute première femme cheffe du gouvernement de l’histoire du Togo, sera décliné comme la volonté du Chef de l’État, Faure Gnassingbé, de faire la promotion de la femme.

Au final, il y aurait 11 femmes ministres sur un total de 35 membres de ce gouvernement. Toujours est-il que, le fait qu’un ministère comme celui de la promotion et de l’investissement n’a toujours pas encore de bâtiment ou de siège dédié en dit sur tout le fouillis et le manque de vision. Apparemment il fallait nommer pour nommer?

Le gouvernement de la promotion des femmes et pourtant rien ne change; autrement les maux s’accentuent

Une fois « l’effet du symbolisme » passé, on se demande si le gouvernement de Victoire Tomegah Dogbe formé le 2 octobre 2020 ne répond pas prioritairement à la volonté « de paraitre ou de plaire du pouvoir de Lomé ». Lorsqu’on sait que ce pouvoir à l’habitude de « mettre le paquet pour s’enjoliver », c’est de bonne guerre. Donc, le tout semble être une politique de relation publique externe relativement bien réussie.

Mais jeter son dévolu sur le peu de « reconnaissance ou de crédit circonstanciel » et ne pas faire du bien-être des masses togolaises une priorité, n’est que l’expression du pilotage à vue. C’est un comportement ou une intention qui frise le « nombrilisme ou le narcissisme ». Est-ce que les tenants en ont conscience, pas sûr.

C’est dans la même veine que le rapport Doing Busines qui est présumé être un indice de la facilité de faire des affaires et que le pouvoir de Lomé plébiscitait comme la preuve par excellence du climat exceptionnel des affaires au Togo; se révélera être une « évaluation oh combien imaginative et manipulée ». Et la Banque mondiale y mettra fin le jeudi 16 septembre 2021. Il fut pourtant la référence tous azimuts des autorités togolaises.

Nonobstant, on ne tardera pas à dépoussiérer une autre des revues du même acabit, de cette même Banque Mondiale; Africa’s Pulse. Ainsi un rapport publié le 6 octobre 2021 par Africa’s Pulse classe le Togo en 5e position des pays africains ayant fait preuve d’efficacité dans la gouvernance économique malgré la crise sanitaire; devant l’Afrique du Sud. Ce rapport porterait sur l’adaptation des pays africains au changement climatique et à la transformation économique. Ne dit-on pas que le diable est dans les détails. Quand vous venez de très loin, même un peu d’effort peut être souligné, en guise de motivation. Cependant cela ne voudra pas dire qu’on soit le meilleur ou tout au moins on ne doit pas se prendre comme tel.

Alors tout porte à croire que ce gouvernement de la promotion des femmes semble obéir prioritairement à la volonté du pouvoir de Lomé d’embellir son indice d’égalité des sexes, qu’autre chose (voir tableau 1 ci-dessous). Étant donné qu‘en 2019, le Togo était 115e sur 129 pays (note de 48,6 sur 100) sur l’index d’égalité des sexes. Cet index représente les fortes inégalités des sexes. Et en 2015 le Togo avait un score de 49,5/100 qui lui valait la 33e place sur 52 pays africains.

Tableau 1 : Disparités au niveau de l’indice de l’égalité des genres en Afrique et les indices des composantes

Disparités au niveau de l’indice de l’égalité des genres en Afrique et les indices des composantesMais la réalité de tous les jours est que les femmes togolaises, tout comme les Africaines sont des contributrices de premier plan, donc indispensables à l’économie et aux vécus quotidiens. Elles constituent la majorité du secteur informel, qui contribue à plus de 50% à la valeur ajoutée des différents secteurs de l’économie Togolaise. Et le secteur informel capte plus de 90% des emplois du privé. Les femmes sont présentes dans tous les secteurs, entre autres dans l’agriculture et le commerce comme petites entrepreneures et aussi dans la production alimentaire.

 

Et contrairement à certaines perceptions ou préjugés, les femmes africaines et par ricochet les Togolaises sont généralement plus actives que les femmes dans d’autres régions du monde. Elles assurent l’essentiel de la production alimentaire et de la circulation ou la commercialisation interne des biens de consommation, par exemple.

Par contre, elles sont confrontées à une multitude d’obstacles qui les empêchent de libérer pleinement leur plein potentiel; qu’il s’agisse de leur implication dans la vie publique de leurs pays ou socio-économique de nos sociétés.

Alors la priorité est de donner les outils et les moyens à nos mères, épouses, sœurs et filles de s’accomplir pleinement et ainsi rehausser d’avantage nos sociétés. Les solutions cosmétiques comme des nominations pour « la volonté du Maître » sont plus contre-productives. Osons poser des gestes visionnaires qui portent pour la postérité et non pour nos Égos circonstanciels.

C’est certainement sur les contraintes handicapantes qu’il faut agir et non faire de la cosmétique. Le comparatif ci-dessous (tableau 2) est la démonstration parfaite que la promotion des femmes va bien au-delà de simples nominations. Si les cibles de disparités au niveau du nombre de ministres du Cabinet semblent atteintes, celles par exemple au niveau de la proportion d’entreprises ayant un cadre supérieur est loin du compte. En ce qui a trait aux disparités au niveau du nombre de cadres, de professionnels et de techniciens; le Togo est carrément déclassé. Il n’y a pas match!

Tableau 2 : Disparités au niveau des indicateurs : dimension de l’autonomisation et de la représentation

Disparités au niveau des indicateurs dimension de l’autonomisation et de la représentation

Alors il faut gouverner autrement et donner chair au mandat social

À ce jour, rien ne démontre que ce gouvernement de promotion des femmes de Victoire Tomegan-Dogbé gouverne autrement que les précédents. Pourtant des femmes y occupent aussi des portefeuilles de souveraineté, comme le ministère des Armées; de l’économie numérique et de la Transformation digitale; de l’inclusion financière et de l’Organisation du Secteur informel; du développement à la Base, de la Jeunesse et de l’emploi des jeunes; de la Promotion de l’Investissement, déléguée chargée de l’Énergie et des Mines; etc.

Pourtant, en 2016, alors ministre Développement à la Base, de la Jeunesse et de l’Emploi des Jeunes Madame Victoire Tomegan-Dogbe résuma sa conception du travail ainsi : « Quand on vous confie un travail, quelle que soit sa nature, il faut bien le faire parce qu’en le faisant, vous vous honorez, vous honorez votre Dieu et on peut vous confier des choses plus importantes. C’est ce que j’ai fait durant mon parcours ».

Puis, lors de sa prise de fonctions, la première ministre Victoire Tomegan-Dogbè déclinera devant les députés togolais sa première déclaration de politique générale sous forme d’un plan d’action en 3 axes, notamment social, économique et l’engagement de la modernisation du pays et le renforcement de ses structures.

Alors sur le plan social, des actions ont été annoncées, par exemple « School Assur », un programme de protection sociale des élèves et écoliers des établissements publics et bien d’autres. Il était aussi question du programme “Wezou” qui prend en charge les femmes enceintes dès les premières semaines de la grossesse à l’accouchement.

Qui plus est, dans le cadre de la campagne mondiale HeForShe, la première ministre soulignait que « l’engagement du Togo pour le leadership féminin est irréversible ».

Aussi en mars 2021, lors de la remise du certificat de mérite décerné par le Fonds des Nations-Unies pour la population (UNFPA) et Plan international Togo; destinées à reconnaître les efforts du Togo dans le cadre de l’autonomisation des femmes et des jeunes filles; la première ministre Victoire Tomégah-Dogbé rappelait encore que la « promotion de la femme est au cœur du dispositif gouvernemental. Et c’est pour accélérer le tempo, que le président Faure Gnassingbé a nommé de nombreuses femmes à des postes politiques importants ».

À une autre occasion, la première ministre déclarera « qu’avec le programme national d’accompagnement de la femme enceinte et du nouveau-né, le gouvernement togolais prendra désormais en charge une partie des soins de toutes les femmes enceintes du Togo. La volonté du président Faure Gnassingbé de ne laisser personne de côté se concrétise ».

Il y a beaucoup de déclarations d’intention et d’autopromotion, mais très peu de faits. Sur le terrain les témoignages donnent des sueurs froides et concordent pour décrire la désolation des masses togolaises.

Prenons l’exemple des soins primaires, même périnataux ou connexes, dont des accouchements; des paiements et autres sont exigés avant la pratique des soins. Des citoyens meurent faute de soins et personne n’est redevable, imputable ou responsable de fautes, aussi professionnelles. Pire, c’est le silence radio de la part des gouvernants. Le chien aboie et la caravane passe.

Conséquemment, après plus de 1 an de gouvernance de la promotion des femmes, rien n’a changé, sinon que nous assistons à la féminisation de la « minorité » dont parlait le Chef de l’État. Il y a autant d’impunité, de corruption, d’écarts de comportements et de manque d’efficacité dans une indifférence totale ou une arrogance à peine contenue.

Encore plus, la pandémie COVID-19 est le pain béni trouvé pour passer toutes les réalités à cette sauce. Les Togolais sont étranglés par le manque de structure, d’infrastructures et la cherté de la vie, particulièrement les femmes; sans que le gouvernement ne pose des gestes forts et concrets. Les quelques faits et constats suivants ne laissent plus de doute.

  • Le gouvernement annonça l’acquisition de matériel médical qui ne sera jamais réceptionnée par les professionnels de la santé. Ainsi le 2 avril 2020 le ministre Kodjo Adedze avait annoncé la commande de 250 respirateurs destinés aux malades COVID-19 ainsi que des scanners pour les hôpitaux. Nous sommes à la fin d’octobre 2021 et toujours encore rien de probant de cette annonce;
  • Il y a toujours un manque criant de scanners, d’ambulances et de matériels médicaux de base dans nos centres de santés. Et les centres de santés d’envergure, qui desservent des dizaines de milliers de citoyens n’ont même pas de moyens de transport d’urgence fonctionnels;
  • Des infrastructures de toutes sortes (routes, écoles, éclairage, etc…) sont dans des états de vétustés indescriptibles;
  • L’absence d’imputabilité est totale et apparemment encouragée. Ainsi des scandales de toutes sortes, des fautes et des négligences professionnelles n’émeuvent guère le gouvernement, même celui de la promotion des femmes. Et pour preuve, l’exemple récent de Ornella Laine, décédée lors de l’accouchement des suites de négligences diverses, de même que son enfant;
  • Par contre, le gouvernement et ses antennes sont prompts à brimer ou réduire les libertés civiles, malgré le rappel à l’ordre de certaines institutions internationales comme les cours de la CEDEAO et les commissions des droits de l’Homme de l’ONU et autres. Et les autorités et professionnels concernés restent toujours muets;
  • Un état d’urgence COVID-19 est décrété et reconduit presque par acclamation par l’Assemblée Nationale, avec un bonus en sus; alors que c’est le secteur informel qui nourrit essentiellement les masses togolaises. Et la majorité vit « le jour au jour », donc sans disposer de réserves ou d’économies. Cependant les mesures et décisions gouvernementales n’en tiennent pas compte; contrairement aux pays voisins ou de la sous-région. Ne pas tenir compte du contexte local dans une crise engendre des conséquences qui font se répercuter sur les décennies à venir;
  • Les programmes d’aide COVID-19 sont d’une opacité sans pareil. NOVISSI, le transfert monétaire supposément aux personnes et familles les plus vulnérables qui risqueraient de perdre ou ont déjà perdu leur revenu pour cause de la pandémie; est un mystère. Le principe est à saluer et à encourager, cependant l’application est rabougrie et défaillante. Personne ne sait combien de Togolais ont réellement reçu ces transferts et à quelles fréquences. La ventilation des fonds et aides COVID-19 est autant un capharnaüm insoluble;
  • Récemment environ 2600 à 3000 travailleurs de la société « AMINA Togo SARL », majoritairement des femmes, qui demandaient l’amélioration de leurs conditions de travail, ont été simplement licenciés. Et l’employeur voudrait simplement les remplacer par d’autres « bêtes de somme ». Et le comble de l’arrogance et de la « bêtise humaine » est que les licenciés pourraient être repris contre signature d’une lettre de pardon. Le gouvernement de la promotion des femmes ne prend pas ses bottes pour défendre ses citoyens. Car qui ne dit mot consent; encore plus le gouvernement qui n’agit pas, endosse alors. Si cet employeur véreux réussit son coup avec l’accord tacite du gouvernement, que fera-t-il la prochaine fois? Quel est alors le rôle du gouvernement togolais?

Le tableau 3 ci-dessous démontre sans équivoque la réalité que vivent les masses togolaises en comparaison avec leurs voisins limitrophes. Naturellement, la pandémie COVID-19 ne s’arrête pas aux frontières. Mais le gouvernement togolais y va d’un zèle dénué d’empathie qui fait tellement de torts aux masses.

Et encore une fois ici, c’est dans le but presque d’avoir le titre du pays le plus vacciné de l’Afrique ou de la sous-région. Et les autorités ne s’en cachent même pas. « Il faut faire peur », déclarera la première ministre lors de son passage devant les députés le 14 septembre 2021. La preuve de vaccination est imposée comme condition d’accès aux services publics, entre autres; sans même accorder un délai à la population. Encore qu’il n’y a pas suffisamment de vaccins pour toute la population à vacciner. Au risque même de créer une spirale insoluble. Tu n’as pas la preuve vaccinale, tu ne peux aller déposer une demande de pièce officielle par exemple. Et sans la pièce, tu ne peux…et ainsi de suite.

Tableau 3 : différents indicateurs comparatifs

différents indicateurs comparatifs

Le prix du « Senat der Wirtschaf » décerné à la PM et qui n’est le prix qu’on tente de présenter aux togolais

La nécessité de mettre les choses en perspective!

Un battage médiatique avait été organisé autour d’un prix de « reconnaissance » décerné le 3 juillet 2021 à la cheffe de gouvernement togolais, Mme Victoire Tomégan-Dogbe. Le site de la primature titra « le Sénat de l’économie allemande Bonn décerne le prix du développement durable à la première ministre ». Et republicoftogo répliquera « Victoire Tomégah-Dogbé a reçu le Prix Carl Von Carlowitz du développement durable décerné par le Sénat allemand de l’économie », en plus de biens d’autres épithètes.

Et ça ne s’arrêtera pas là. Le gouvernement avisera que ce prix est « la reconnaissance de l’engagement du Togo sous le leadership du Président de la République SEM Faure Gnassingbé dans la promotion de l’emploi des jeunes et l’accompagnement des initiatives économiques de la jeunesse togolaise depuis des années ».

En fait, le « Senat de l’économie » en question dont la terminologie en allemand est „Senat der Wirtschaft Deutschland e.V.“, n’est qu’une association enregistrée; donc le pendant en France d’une association loi 1901. Le site (www.senat-deutschland.de/) précise que « Der Senat ist rein gemeinwohlorientiert’’, donc « le Senat est purement (simplement) d’intérêt public ». Cette association a un volet „Stiftung“ (fondation) qui décerne un prix d’intérêt public. Loin de nous l’idée de minimiser le prix, mais ce prix ne provenait pas d’un Senat; comme les sous-entendus.

D’ailleurs en 2019 le même prix du « Senat der Writschaf » a été attribué au journaliste d’origine togolaise Kossivi Tiassou basé à Siegburg près de Bonn pour son engagement en faveur du développement durable. Il est l’un des fondateurs de ‘Green Radio-World’ dont l’objectif est de contribuer à promouvoir l’écologie et le développement durable auprès des radios rurales et locales et de la presse.

Le manque de vision et de résultats des gouvernants

Le gouvernement de promotion des femmes nous dit, entre autres, qu’il a sur le plan économique réussi le lancement d’une plate-forme industrielle, une zone franche qui permettra de transformer localement des richesses naturelles du Togo et leur exportation. Elle pourrait créer environ 35 000 emplois directs et indirects.

Néanmoins il est de rigueur de souligner le pays manque d’infrastructures, dont des routes; ne serait qu’entre le port autonome de Lomé et cette zone France et aussi pour faire les liens avec les zones agricoles et minières.

Officiellement, le Togo connait en 2021 une inflation évaluée à 6.2 %, même si ce taux reste sous-évalué comparativement aux variations réelles des prix du panier du consommateur en ce moment. Donc encore une fois, la réalité du terrain décrit autre chose. Et selon la Banque africaine de développement (BAD), le PIB réel du Togo pourrait se valoriser de 4,3 % en 2021, à condition de rétablir les conditions gagnantes.

Ainsi pour maintenir la croissance 2021 du PIB réel, il faudrait maintenir les investissements dans les divers secteurs (transports, énergie, manufacturier, etc.). Encore là, les faits sont têtus.

Conséquemment, le bilan de l’an 1 de la premier ministre Victoire Tomegah Dogbe est très mitigé et est une continuité des précédents gouvernements.

Vivement que chacun joue son rôle, dans le mesure où le peuple à l’obligation de moyens et les gouvernants ont l’obligation de vision et de résultats.

Joseph Atounouvi

Source : Liberté / libertetogo.info

Source : 27Avril.com