Le Point de Kodjo Epou : Les Togolais sont avec Farida

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Farida est un nom courant. Mais celle qui répond à Bemba Nabourema est unique. D’une poigne d’enfer, robuste, vigoureuse, parfois rude, elle a les traits de l’héroïne qui manque tant au Togo. Son courage débordant, son discours décapant sont source d’espoir, un espoir en berne. Farida ne  cherche pas ses mots ni ne tergiverse pour formuler sa haine contre le pouvoir. Et, ses paroles parlent pour la majorité des Togolais.

Le Point de Kodjo Epou : Les Togolais sont avec Farida

Face à la  misère violente qui frappe son pays, Farida enrage et refuse de reconnaître l’autorité de Faure Gnassingbé. L’activiste accuse le président de délabrer l’État, d’abîmer la nation. « Le non respect des règles au sommet incite au non respect des formes à la base ». C’est donc sans respect aucun qu’elle questionne Faure, le tutoie avec acharnement, lui déniant tout égard, toute civilité. Son combat est d’abord un héritage familial, puis une mission citoyenne visant à délivrer son pays des rives du calvaire, des griffes d’une vieille dictature qui propage la misère, qui enrichit les réseaux mafieux occidentaux et des bandes organisées d’escrocs locaux.

Dans le regard de Bemba Nabourema se lit une révolte que nul ne peut apaiser, contre le clan, contre le club. Et, au delà, contre tout ce qui dévalorise ou déshumanise les peuples  d’Afrique. Son engagement se mesure seulement à l’aune des injustices et brimades subies par les peuples d’Afrique, des souffrances immenses qui s’abattent sur les Togolais depuis des décennies.

Regard tranchant dans un visage angélique, langage cru, parole acerbe, Farida a tout des héroïnes noires qui avaient, dans le passe, dirige des luttes de libération pour délivrer leurs peuples de la servitude. Ses signatures sont tout feu tout flamme et s’arrachent.

L’ex-étudiante de American University of Washington DC, n’accepte pas les illusions et fantasmes d’un régime suranné accroché à des mythes obsolètes, cherchant désespérément à faire croire que le pays s’ouvre et avance, alors que l’agenda caché du clan vise à faire du Togo une monarchie forte. Pour cette Tchokossi engagée, le Togo est un enfer et ses populations victimes d’une barbarie qui ne peut générer que sang, larmes, cloaques et morts.

Cela fait des années maintenant que Farida dénonce, par ses analyses interpellatrices, ses décryptages teigneux, le Golgotha togolais. Elle refuse toute idée de fatalité et s’emploie à montrer que l’immense majorité de ses concitoyens, toutes ethnies confondues, veulent que l’empire s’écroule, que se précipite la fin du régime UNIR sur la terre de ses aïeux, une terre malmenée par une dictature atroce qui a ceci de monstrueux qu’elle a l’air et se croît irremplaçable.

Le Togo est, en Afrique, l’une des rares nations à n’avoir jamais connu dans son histoire une héroïne de renom. Farida va t-elle boucher le trou? Elle est prête en tout cas à marteler les esprits, à secouer les consciences, et, avec bravoure, montrer au reste du monde que le Togo vit des décennies d’obscurantisme, sous un système de tous les replis, de toutes les régressions. Elle se sait seule mais ne plie pas l’échine. Qu’il soit difficile à une hirondelle de faire le printemps, elle n’en a que trop conscience. Mais Bemba sait qu’elle gagne en surface et que sa base, chaque jour, s’élargit. Elle a surtout appris, par l’histoire, que c’est une femme, la reine-mère Nana Yaa Asantewa, dans l’ancienne Gold Coast (Ghana, NDLR), qui avait, au moment ou les hommes faiblissaient, pris le devant pour mener une guerre victorieuse, contre les Anglais.

Le Point de Kodjo Epou : Les Togolais sont avec Farida

Sur la voie de ces puissantes femmes africaines au destin marque au fer, telles les Reines Nana Yaa Asantewa, Ndate Yalla Mbodj (Sénégal), Abla Pokou (Côte d’Ivoire), Seh Dong Hong-Beh ( Dahomey), Farida dénonce avec force l’inacceptable passivité de notre peuple face à son destin en pointilles. Elle réfute avec dextérité l’alpha et l’oméga de ce que les Togolais, docilement résignés, semblent finalement maîtriser le plus : attendre, endormis, l’heure de Dieu.

Kodjo Epou
Washington DC
USA
13 janvier 2017

27Avril.com