Idriss Déby Itno est mort au combat. Comme au Togo, il est vite remplacé par son fils Mahamat Idriss Déby Itno à qui l’armée prête allégeance. L’ancien président venait d’être « réélu » pour son 6ème mandat à la tête du pays.
La dernière bataille d’un piètre dirigeant
La nouvelle de la mort au combat du maréchal Idriss Déby itno s’est répandue comme une trainée de poudre. « Le président de la république, chef de l’État, chef suprême des armées, Idriss Déby Itno, vient de connaître son dernier souffle en défendant l’intégrité territoriale sur le champ de bataille. C’est avec une profonde amertume que nous annonçons au peuple tchadien le décès ce mardi 20 avril 2021 du maréchal du Tchad », a annoncé le porte-parole de l’armée, le Général Azem Bermandoa Agouna, dans un communiqué lu à la télévision nationale Tchadienne.
Le président fraîchement réélu selon les résultats officiels de la présidentielle, combattait aux côtés de ses hommes quand il a été mortellement blessé. Bien avant l’annonce de sa mort, l’entourage d’Idriss Déby avait indiqué lundi que le chef de l’État s’était rendu samedi et dimanche sur le front pour combattre une colonne de rebelles qui avait lancé une offensive depuis la Libye le 11 avril 2021, jour du scrutin.
L’annonce de ce décès est d’autant plus surprenante que dans la journée du samedi 17 avril 2021, l’armée tchadienne a affirmé avoir détruit la colonne de rebelles qui a attaqué le nord du pays le jour de l’élection présidentielle. «Les forces de défense et de sécurité ont complètement détruit la colonne de rebelles qui s’est aventurée dans le Nord-Kanem… Le ratissage continue pour récupérer les derniers fuyards», a assuré le Général. De leurs côtés, les rebelles avaient affirmé dans un communiqué que le maréchal avait été blessé, seulement l’information n’avait pas été confirmée par l’armée nationale ni aucune source officielle.
Il faut le rappeler, le Tchad a une longue tradition de rébellion. C’est d’ailleurs ce qui a porté le désormais ex-chef d’Etat au pouvoir suite au renversement du sanguinaire Hissène Habré en 1990. Dans la zone frontalière avec la Libye, les affrontements entre les rebelles et l’armée régulière sont très fréquents. En février 2019, des rebelles venus de la Libye pour tenter de renverser Idriss Déby Itno avaient été stoppés par des bombardements français sur demande de N’Djamena. En février 2008, le chef de l’Etat avait été sauvé de justesse par des bombardements français contre les positions des rebelles qui étaient parvenus aux portes du palais présidentiel. Il vient de livrer son dernier combat.
Un long règne…
Arrivé au pouvoir les armes à la main en 1990, Idriss Déby Itno ne s’en est jamais séparé. Les armes étaient ses plus fidèles alliés dans un pays qu’il a tenu d’une main de fer durant 30 longues années. Au fur et à mesure de sa longévité au pouvoir, il s’est offert tous les pouvoirs. Médias, opposition, société civile… tous étaient tenus sous son joug. Le classement 2021 de Reporters sans frontière (RSF) sur la liberté de la presse classe le pays au 123ème rang mondial sur 180 pays. Son règne n’a pas été différent de celui de son compagnon et prédécesseur Hissène Habré qui est condamné en 2017 à la prison à perpétuité pour crimes contre l’humanité, crimes de guerre et actes de torture.
….. et une succession inspirée du Togo
L’annonce de la mort du maréchal Idriss Déby Itno n’a pas encore fait son effet que les Tchadiens se retrouvent dans une situation inédite. L’un de ses fils, Général de 37 ans et commandant de la garde présidentielle est présenté comme président d’une transition décrétée pour durer 18 mois. « Un conseil militaire a été mis en place, dirigé par son fils, le général Mahamat Idriss Déby Itno. Le conseil s’est aussitôt réuni et a promulgué la charte de transition », a déclaré le porte-parole de l’armée.
Pourtant, la vacance du pouvoir a été prévue par la Constitution tchadienne en ses articles 81 et 82, entre autres. « En cas de vacance de la Présidence de la République pour quelque cause que ce soit ou d’empêchement définitif constaté par la Cour Suprême saisie par le Gouvernement et statuant à la majorité absolue de ses membres, les attributions du Président de la République, à l’exception des pouvoirs prévus aux articles 85, 88, 95 et 96 sont provisoirement exercées par le Président de l’Assemblée Nationale et, en cas d’empêchement de ce dernier, par le 1er Vice-président. Dans tous les cas, il est procédé à de nouvelles élections présidentielles quarante-cinq (45) jours au moins et quatre-vingt-dix (90) jours au plus, après l’ouverture de la vacance. Le Président de l’Assemblée Nationale assurant les fonctions de Président de la République ne peut ni démettre le Gouvernement, ni procéder à la révision de la Constitution, ni dissoudre l’Assemblée Nationale », stipule la Constitution.
En 2005, une pareille prise de pouvoir a été opérée à la suite du décès de Gnassingbé Eyadéma. Fambaré Ouattara Natchaba à qui revenait le droit de conduire la transition vers de nouvelles élections a été empêché de regagner le bercail. L’armée a ensuite présenté Faure Gnassingbé comme successeur de son père et lui a prêté allégeance. Pour faire taire les condamnations de la communauté internationale, Faure Gnassingbé s’est retiré et est revenu au pouvoir dans un bain de sang.
C’est le même schéma de succession qui a été suivi au Gabon. Les Tchadiens font pareil. Seulement, dans le cas du Tchad, rien n’est gagné pour le fils du maréchal puisqu’il faut compter avec les forces rebelles qui ont repris les armes. A moins que la France n’intervienne de nouveau pour sauver cette dictature qui a amorcé son déclin.
G.A.
Source : Liberté
Source : 27Avril.com