Covid-19 au Togo: le cas des enfants devient de plus en plus inquiétant

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Au cours de sa conférence de presse hebdomadaire, le Coordonnateur national de la riposte contre la Covid-19, le Colonel – Médecin Djibril Mohaman s’était présenté à la presse dans un état un peu particulier rompant avec sa verve habituelle.

 Il exprimait ainsi sa désolation de voir les cas actifs au coronavirus flamber dans notre pays. Il faut juste retenir que des mesures drastiques pourraient être prises si la situation ne s’améliore pas dans les jours à venir.

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 Déjà, la région des savanes est bouclée, commerces, bars, buvettes, boites de nuit, lieux de culte, marchés sont fermés, funérailles, baptêmes, mariages et réjouissances sont interdits, mieux, la circulation entre préfectures, villes et villages est proscrite. Cette situation est la résultante du relâchement presque total de tous face aux mesures barrières édictées par le gouvernement et l’OMS.

Le Colonel a fait cas des funérailles, mariages, baptêmes, réjouissances populaires… qui sont pignon sur rue ci et là comme si nous étions en une période normale. Alors que ce sont des occasions fécondes pour une propagation rapide du virus. Mais alors, si les adultes baissent la garde, qu’en est-il des enfants ?

Il est presque 13 heures sur l’avenue Gnassingbé Eyadéma, le soleil de plomb qui s’abat sur la ville pousse les vendeurs à la sauvette à se réfugier sous les arbres devant le siège d’une société de téléphonie mobile. Malgré cette situation, certains vendeurs continuent à se faufiler entre les véhicules avec des conducteurs très souvent furieux, à cause des embouteillages. Parmi ces vendeurs ambulants, il y a Solim, arrivé quelques mois plutôt d’Anié.

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 Âgée d’à peine 12 ans, la jeune fille a un plateau d’oranges pelées sur la tête et dit être à sa deuxième année de vente à la sauvette. « J’avais six ans quand ma maman est partie pour Lagos. J’ai été placée chez ma tante qui me maltraitait, ce qui a impacté sur mes études. Après trois tentatives échouées pour obtenir le CEPD, j’ai décidé de venir à Lomé pour me débrouiller », relate Solim. La jeune enfant ne semble pas particulièrement inquiétée par la Covid 19. «Le coronavirus existe. Mais j’ai besoin d’argent pour vivre. À part porter quelques fois les masques, je n’ai pas le temps et le matériel de lavage de mains. C’est Dieu qui me protège », précise-telle.

Avant d’ajouter : « Ce n’est pas un travail facile. Je suis très souvent bousculée par des voitures et les motos. Parfois, les clients te touchent de façon inappropriée. Quand tu donnes ta marchandise dans la voiture, le conducteur part sans te payer. Il m’est aussi arrivé des situations où ma recette de la journée a été arrachée par des bandits. Mais je dois vendre pour aider ma cousine chez qui je vis à payer le loyer et la nourriture», se confie-t-elle.

Des activités pourtant dangereuses, reconnaissent les petits euxmêmes. « C’est risqué de vendre dans les carrefours, avec cette maladie du Coronavirus qui fait rage dans le monde et au Togo actuellement. Parce qu’il y a des gens qui toussent sur nous, et nos mains se touchent même. Mais on n’a pas le choix», explique Aïdi, une amie de Solim, revendeuse de papaye.

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Comme ces deux jeunes filles, ils sont nombreux à exercer une activité : faiseurs de poubelles, mendiants, porteurs, collecteurs d’objets divers, employés de ménages, gardiens et laveurs de véhicules, cireurs, vendeurs de produits divers, … Certains se tournent vers le vol. Il s’agit en fait d’une incessante quête quotidienne pour trouver de quoi subsister non seulement pour eux-mêmes, mais aussi, le cas échéant, pour leur famille.

«Une ONG m’a donné une bavette que je lave les soirs avant de me coucher. Nous dormons dans un endroit contre 100fcfa et il peut arriver que quelqu’un d’autre ait volé ton masque. Dans ce cas, tu es obligé de sortir sans protection même si tu cours le risque d’être infecté», déclare Koffi, orphelin de père et de mère, vendeur de bonbons et de papier mouchoir aux feux tricolores, de l’un des plus grands carrefours de Lomé. Ils sont plus de 6 000 enfants en situation de rue au Togo.

Et entre se protéger contre la pandémie et assurer leur survie, le choix de ces enfants est clair. Ils ont préféré gagner de l’argent au risque de leur vie que de mourir de faim. Le gouvernement et les organisations de promotion des droits de l’enfant doivent mener des réflexions sur ce phénomène de travail des enfants avant l’âge prévu par la loi.

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Le respect des mesures barrières dans les écoles laisse à désirer

En vue de limiter la propagation du coronavirus dans les écoles, le gouvernement togolais a imposé un certain nombre de mesures aux établissements scolaires avant la rentrée. Des acteurs de défense des droits de l’enfant au Togo, dans leur rôle de protection, ont fait le suivi du respect de ces mesures barrières.

Une trentaine d’établissements scolaires ont été ciblés au cours du premier trimestre, soit du 2 novembre au 23 décembre 2020. Le constat révèle un laxisme dans l’application des mesures. Les dispositifs de lavage des mains sont en nombre insuffisants et la distanciation sociale (1m) n’est pas respectée, dans les écoles ciblées lors du suivi, explique le Secrétaire exécutif du FODDET.

Les acteurs du domaine ont constaté qu’aucun établissement scolaire de la trentaine ciblé ne dispose d’une salle d’isolation destinée aux éventuels cas d’infections au coronavirus. L’une des mesures contre la Covid19 en milieu scolaire est d’avoir au maximum 40 élèves par classe. Mais les défenseurs des droits de l’enfant ont relevé qu’il y avait dans certaines salles 90 élèves assis souvent à trois par banc.

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« Quand nous avons interpellé les enseignants sur ce problème, ils ont affirmé qu’ils vont les diviser en deux groupes. Le premier sera programmé pour la matinée et le deuxième l’après-midi. Trois jours après, nous avons fait le même constat et jusqu’à la fin du trimestre. La décision du gouvernement est louable, mais dans la pratique elles ne sont pas respectées », a précisé Ghislain Alédji, Secrétaire Exécutif du Forum des organisations de défense des droits de l’enfant au Togo (FODDET).

Le système de lavage de mains est dans la majorité des cas disposé seulement devant les écoles contrairement aux consignes du gouvernement qui demandent qu’il soit positionné devant chaque salle de classe. «C’est devenu un objet ornemental. Quand vous arrivez devant certains établissements scolaires, le dispositif est là, mais n’est pas utilisé. Vous pouvez passer sans vous laver les mains».

Les masques ne sont pas correctement portés par les élèves déplore ce défenseur des droits des enfants. Les élèves les mettent juste au menton alors qu’ils doivent couvrir et le nez et la bouche.

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« Nous avons remarqué que les enfants enlèvent les masques, s’amusent avec et les reportent. Or, la bavette est un dispositif qui va empêcher les salives de contamination du virus de se propager », se désole Ghislain Alédji.

Les résultats de ce suivi de l’application des mesures, restitués partiellement à Lomé en décembre 2020, seront transmis au gouvernement qui, selon les organisations de défense des droits de l’enfant au Togo, doit revoir la question de distanciation sociale en construisant dans un bref délai des salles de classe.

L’Union No 1409

Source : Togoweb.net