Majoritairement contrôlée par la famille et créé en 1822 et cotée en bourse, la société Bolloré qui est devenue le Groupe Bolloré S.E., est classée parmi les 500 plus grandes multinationales françaises opérant dans le monde et Vincent Bolloré, le PDG classé, en tant qu’individu, parmi les personnalités les plus riches de France.
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Bolloré a construit un empire industriel à partir de l’Afrique
Le groupe a des positions fortes, voire dominantes, dans quatre activités principales : le transport et la logistique, notamment avec les sociétés Bolloré Logistics, Bolloré Africa Logistics et Bolloré Energy ; la communication essentiellement avec la société Vivendi ; le stockage d’électricité et les systèmes recentrés sur la Bretagne avec la société Blue Systems ; et la gestion d’un ensemble de participations financières.
Cyrille Bolloré, le plus jeune des fils de Vincent Bolloré, rappelle dans un dernier rapport annuel, que le Groupe qui emploie 20 800 collaborateurs en Afrique, « est présent dans 42 ports en qualité d’opérateur de terminaux portuaires, d’agent de lignes maritimes ou encore de manutentionnaire de marchandises non conteneurisées. Il gère principalement 16 terminaux à conteneurs en Afrique centrale et de l’Ouest, 7 terminaux roll-on/roll-off [“roule pour entrer”, “roule pour sortir”], 3 concessions ferroviaires, des entrepôts, des ports secs…».
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En 2020, Bolloré S. E. comptait 79 000 collaborateurs dans le monde avec un chiffre d’affaires de 24,1 milliards d’Euros, soit plus de 5 fois le produit intérieur brut (PIB) du Togo qui s’élevait en 2019 à 5,5 milliards de dollars des Etats-Unis, soit 4,73 milliards d’Euros. Ce partenariat asymétrique, mis en exergue par la procédure juridique du « plaider coupable » devant le parquet national financier de Paris, laisse un goût amer à l’ensemble du peuple togolais.
Il faut rappeler tout de même que le résultat opérationnel du Groupe Bolloré S.E. s’élevait à 1.650 millions d’Euros avec 25.984 millions d’Euros de capitaux propres et 1.650 millions d’euros de résultat opérationnel. Le problème est que la distribution de ces résultats impressionnants, n’est officiellement ni détaillée par pays, ni par activités en Afrique et n’est pas communiquée par le Groupe.
Il faut reconnaître le sens des affaires basé sur au moins trois formes management :
Une stratégie permanente de diversification fondée sur l’innovation et sur le développement à l’international ;
Une utilisation judicieuse d’une forme de coopération non officielle avec les responsables des Etats africains tant dans la capacité à gagner les appels d’offres quand ils ont lieu et qui permet, souvent dans l’opacité des secrets d’entreprises, de bénéficier de garanties ou contre-garanties des Etats africains, de mise en veilleuse de « dettes lors de reprises d’entreprises », et de l’omerta des nombreux dirigeants africains, certains ayant clamé officiellement être « l’ami de Bolloré » sans que la réciproque n’ait filtré;
Une capacité à s’approprier des entreprises en « restant [-autant que faire se peut -] sous la barre des 30 % du capital », pour éviter de passer par une offre publique d’achat obligatoire.
Bollore et son groupe, silencieux sur les ventes éventuelles de ses actifs en Afrique
Le Groupe Bolloré S.E. et son PDG Vincent Bolloré demeurent, à ce jour, énigmatiques sur la volonté réelle ou supposée de ce dernier, de vendre tout ou partie de ses actifs en Afrique, notamment les concessions des ports et des activités ferroviaires.
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Bien que la rumeur coure et persiste, le groupe Bolloré S.E. ne s’est pas prononcé officiellement sur les informations révélées par la presse, pour l’instant non confirmées et donc les spéculations vont bon train sur sa volonté de « céder ses activités de concessions portuaires et ferroviaires en Afrique ». La volonté de se concentrer en Asie ou en France ou dans d’autres secteurs où les risques en termes d’image et de « services après-vente judiciaires » pourrait expliquer une décision importante.
Mais il est aussi possible qu’il soit question de savoir quel prix, de potentiels repreneurs mettraient sur la table de négociation pour la valorisation de ces actifs (ou passifs) stratégiques. En gestionnaire avisé du management de la mutabilité, il n’est pas impossible également que de nouveaux besoins en investissement, sans contrepartie en garantie des États africains, se fassent jour ailleurs. Ce serait un geste responsable pour laisser une société propre, débarrassée de potentiels dossiers juridiques à son encontre, à son successeur, vraisemblablement l’un ou l’autre de ses enfants, vraisemblablement le 17 février 2022, à l’occasion du bicentenaire de l’entreprise familiale.
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Le problème est que ce ne sont pas les candidats à la reprise qui manquent. La société française CMA CGM et la danoise Maersk, toutes deux spécialistes du transport maritime mondial seraient parmi les potentiels intéressés. Mais il est aussi question des sociétés Dubai Ports World, un exploitant portuaire et Cosco Shipping de Chine, actuel gestionnaire du port grec du Pirée selon le Journal Le Monde qui affirme que « la banque Morgan Stanley a commencé à sonder des acheteurs pour Bolloré Africa Logistics, branche historique et longtemps la « vache à lait » de l’homme d’affaires ».
Le plaider coupable et les ventes présumées d’actifs ne peuvent absoudre les présumés corrompus au Togo
Parmi la liste des possibles autres repreneurs-partenaires non identifiés, tous ne sont pas nécessairement des concurrents du fait de possibilités d’actions croisées entre ces sociétés, ou entre des sociétés écrans ou même partenaires, avec la société Bolloré S.E. Aussi, il appartient à la direction de Bolloré S.E. de clarifier ses intentions, ou pas, au moment opportun. Il pourrait peut-être aussi profiter de l’occasion, pour rappeler les noms de ceux qui étaient ou sont encore à la tête de différents États africains, non encore incriminés à ce jour dans la procédure judiciaire en cours, ce qui le contraindrait à se défendre « seul » devant un tribunal correctionnel si son « plaider coupable » se déroule jusqu’à son terme. D’ailleurs, ce serait un bon conseil que d’inviter le chef d’Etat togolais et l’ensemble de ceux qui étaient signataires du contrat de concession pour le port de Lomé de « plaider coupable » aussi.
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En effet, le 26 janvier 2010, les autorités togolaises de l’époque ont dans un numéro spécial du Journal officiel du Togo daté du 26 janvier 2010, validé par décret n° 2010-011/PR, la concession de l’activité de manutention de conteneurs au Port autonome de Lomé à la société Bolloré, ce qui a fait du Port autonome de Lomé, une « chasse gardée » de la société Bolloré, mais pas que. Au bas dudit décret, figuraient Faure Gnassingbé, Président de la République, Gilbert Fossoun Houngbo, Premier ministre, Adji Otèth Ayassor, ministre de l’Economie et des Finances, et Comla Kadje, ministre des Travaux publics et des Transports.
Toutes ces personnalités devraient pouvoir permettre, en tant que « témoins assistés », d’aider à comprendre pourquoi aujourd’hui Vincent Bolloré et deux de ses collaborateurs ont accepté de plaider coupable pour faits de corruption devant le parquet national financier de Paris. Que s’est-il passé avant, pendant et après la publication de ce décret ? Et bien sûr, sur la base d’une comptabilité analytique, retracer les versements des impôts payés par les sociétés de Bolloré à l’Etat togolais… Une question aujourd’hui restée sans réponses ! D’autres devraient suivre…
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Aussi, il est important d’avoir accès aux différents contrats de concession qui souvent ont été octroyés par les responsables d’Etat africains (sous l‘autorité des chefs d’Etat), très souvent dans la non-transparence, du fait même des procédures établies par ces mêmes dirigeants africains. Peut-être que le parquet financier de Paris a, actuellement sous « scellé », l’ensemble de ces contrats entre la société Bolloré SE, ou entre Vincent Bolloré et les différents responsables de l’Etat togolais concernés, passés ou actuels. Ne pas pouvoir y accéder pour les parties civiles togolaises équivaudrait à une deuxième humiliation…
De ce fait, dire que les règles internationales et éthiques des appels d’offres n’ont pas été respectées relève de la théorie puisque ce sont l’opacité et l’omerta qui entourent les procédures d’attribution des contrats – de concession ou autres – dans la plupart des pays africains, au Togo en particulier.
Détails des comptes du groupe Bolloré au Togo : plaidoyer pour la transparence
Rappelons tout de même que sur papier, le rapport annuel 2020 du Groupe Bolloré ne donne aucun détail sur les rentabilités pays par pays en Afrique, au Togo en particulier. Rien non plus sur les bénéfices réels ou « supposés » des entités ou capacités productives locales comme pour le Port autonome de Lomé. Au cas où ces documents seraient disponibles pour le public, il serait opportun de les partager avec les médias indépendants.
Avec les transferts d’argent et de dividendes sans risques de change entre la France et l’Afrique de la zone franc, du fait du démembrement du feu Franc français en Franc CFA, en passe de devenir l’ECO de l’UEMOA, par le biais du trésor français, il est difficile, en zone franc, de procéder à la traçabilité des comptes de Bolloré S.E. en détail et avec précision.
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Comme c’est le Trésor français qui est seul, habilité à assurer la convertibilité du FCFA, ce signe monétaire que certains Africains, bien naïfs, continuent à appeler « monnaie » et dont le pouvoir libératoire est octroyé unilatéralement par la France, il est quasiment impossible d’avoir de la transparence sur le personnel africain inscrit effectivement sur les fiches de paye de la société Bolloré S.E. ou ses différents démembrements en Afrique.
Il va de soi que les transferts d’argent, les paiements d’impôts vers le pays africain d’accueil ou vers la France, voire de dividendes distribués effectivement en Afrique ou ailleurs, ne sont pas « traçables » sans l’accès aux comptes détaillés de ce que publie officiellement la société Bolloré, notamment dans ses rapports annuels. Il est possible aussi de vérifier certains comptes personnels des principaux responsables de cette société si des transactions ne passaient pas officiellement par les sociétés présentes dans l’espace financier Bolloré.
Absence d’homologation du juge : droit à la traçabilité de la présomption de corruption
Personne ne sait à ce jour ce que le parquet financier de Paris, lors des différentes perquisitions dans les locaux de la Société Bolloré S.E. a pu récupérer réellement. Mais il doit avoir suffisamment d’éléments pour qu’un arrangement soit intervenu, dans le cadre d’une procédure du plaider-coupable, [Convention Judiciaire d’intérêt public], entre d’une part la société Bolloré S.E. et le parquet financier et d’autre part, entre trois cadres de ladite société, dont Vincent Bolloré et le parquet financier de Paris, à savoir la procédure de la Comparution sur Reconnaissance Préalable de Culpabilité]. En effet, « les peines demandées par le Parquet national financier et acceptées par Vincent Bolloré, Gilles Alix et Jean-Philippe Dorent ont été refusées par le tribunal, qui a considéré que les faits reprochés avaient « gravement porté atteinte à l’ordre public économique » et « porté atteinte à la souveraineté du Togo ». Le tribunal demande la tenue d’un procès ».
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« Des policiers français de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCLIFF) ont perquisitionné sur commission rogatoire, vendredi 8 avril [2016], le siège du groupe Bolloré Africa Logistics basé à Puteaux dans les Hauts-de-Seine ». Il y a eu auparavant en novembre 2013, l’ouverture d’une information judiciaire par le par le parquet financier de Paris suite à des « soupçons de « corruption d’agent public étranger » ». La police enquêtait pour trouver des preuves flagrantes pour prouver ou pas que le « groupe Vivendi a utilisé sa société publicitaire Havas pour faciliter l’obtention de la gestion des ports de Conakry en Guinée et de Lomé au Togo».
Peut-être que si l’affaire pendante du « plaider coupable » portant sur trois des dirigeants du Groupe Bolloré S.E. dont Vincent Bolloré, le PDG du Groupe, évolue dans le cadre de la procédure de la justice négociée en droit pénal français, à savoir la Comparution sur Reconnaissance Préalable de Culpabilité ou « CRPC » introduite en 2004 pour les infractions mineures puis étendue en 2011 aux infractions plus graves, y compris la criminalité notamment économique en col blanc , alors le temps sera venu pour les victimes africaines, togolaises en particulier, de se porter partie civile, dans un dossier qui devrait se terminer devant un tribunal correctionnel. Avec la compétence du procureur financier et la transmission du dossier au Tribunal correctionnel, il n’est pas impossible que certains autres délits de corruption ou de trafic d’influence et surtout des délits de fraude fiscale aggravée et le blanchiment de ces délits puissent refaire surface.
Le problème est qu’à ce jour (20 octobre 2021), la décision définitive d’aller devant le tribunal correctionnel n’est pas encore connue, du fait de multiples recours. Rappelons que la procédure du CRPC (plaider coupable pour personnes physiques et morales) est applicable aux personnes physiques et morales et permet à un défendeur d’accepter une offre du procureur pour une réduction de peine en échange d’une reconnaissance de culpabilité.
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Une fois que le procureur et le défendeur – celui ou celle qui plaide coupable – se sont mis d’accord sur une peine, l’accord CRPC doit être homologué par un juge pour entrer en vigueur. Toutefois, le Juge d’homologation peut refuser de le faire, notamment s’il estime que la nature des faits, la personnalité du prévenu, la situation de la victime ou l’intérêt général de la société justifient la tenue d’un procès public. C’est ce qui s’est passé pour Vincent Bolloré et deux de ses collaborateurs proches en charge des dossiers dans le cas togolais.
Autrement dit, actuellement, Vincent Bolloré est en attente d’une « seconde » décision définitive, ce qui fait de lui pour le moment non pas un « coupable », mais un innocent face à la loi.
Toutefois, la principale vertu du recours au plaider coupable est la discrétion, surtout pour les délits les plus faibles. Mais face à des délits de corruption, de trafic d’influence, de fraude fiscale aggravée, de blanchiment de ces délits, on risque de passer du « délit » au « crime », ce qui pourrait être une tout autre affaire. Donc pour la discrétion, c’est raté ! L’affaire « Bolloré » est sur la place publique et en attente d’une confirmation d’un renvoi en correctionnelle d’une part, du fait même de la qualité des auteurs, et d’autre part, du fait de la qualité des victimes innocentes togolaises à savoir les parties civiles, qu’il ne faut pas confondre avec l’Etat togolais et ses premiers représentants.
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Il faut espérer que pour l’émergence de la vérité et la clarification sur les responsabilités, les représentants de l’Etat togolais concernés seront probablement invités par le juge du tribunal correctionnel, à s’expliquer et à expliquer : la mécanique de la corruption (corrupteur et corrompu) qui se pratique au moins à deux au Togo ; et le rôle de chacun dans le temps et l’espace, en qualité ou pas de corrompu ou corrupteur présumé, ou les deux.
Atteinte à l’ordre public économique » et « à la souveraineté du Togo », singulièrement le peuple Togolais
Paradoxalement, peut-être parce qu’il souhaitait aller au paradis par une autoroute sans péage, Vincent Bolloré et ses deux collaborateurs, ont, dans le cadre d’une CRPC, admis des faits répréhensibles et ont reconnu leur culpabilité, en échange d’une peine limitée à une amende de 375 000 €. L’arrangement effectué entre lui et ses deux collaborateurs et le parquet français a été refusé et rejeté lors de l’audience publique par le juge d’homologation, Madame la Présidente Isabelle Prévost-Deprez.
Le Juge d’Homologation a déclaré que Vincent Bolloré n’allait pas bénéficier d’une CRPC, car son comportement avait « porté gravement atteinte à l’ordre public économique » et « porté atteinte à la souveraineté du Togo » et qu’il devait donc répondre de ses actes dans un procès public et selon, entre autres, les journalistes qui ont assisté à cette audience publique d’homologation.
La négociation avec le parquet national financier de Paris pour régler cette affaire a échoué pour les trois responsables de Bolloré S.E. pour le moment.
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Par contre, en complément de cette procédure CRPC, une nouvelle forme de justice négociée a été utilisée par la société Bolloré S.E., il s’agit de la Convention Judiciaire d’intérêt public (« CJIP »), mise en œuvre en 2016 par la loi Sapin II, uniquement pour les personnes morales accusées de corruption, de trafic d’influence ou d’infraction fiscale. La CJIP ne s’applique pas aux personnes physiques. C’est dans ce cadre que la société Bolloré S.E. a plaidé coupable mais n’aurait « reconnu » aucune faute mais a accepté la sanction liée à l’arrangement avec le parquet financier de Paris consistant à payer une amende de 12 millions d’euros et de mettre en place un programme de conformité aux règles de l’agence française anticorruption sur une durée de deux ans.
En fait, pour que l’arrangement entre le parquet financier de Paris et l’entité ou la personne qui plaide coupable devienne opératoire, il faut systématiquement l’homologation d’un juge. Dans le cadre de la société Bolloré S.E., l’homologation a été accordée. Aujourd’hui, la société Bolloré S.E. serait « propre » dans le dossier le concernant au Togo, avec à la clé, une sorte de solde de tous comptes. Autrement dit, la loi Sapin II permet à la France d’engranger de l’argent sur le dos d’une société française qui volontairement plaide coupable et en profite pour « blanchir » la même société de ses actes de corruption, empêchant la vérité d’émerger notamment sur les noms des bénéficiaires au Togo des actes pour lesquels la société Bolloré S.E. a plaidé coupable. En cela, la procédure du « plaider coupable » lorsqu’elle ne va pas à son terme en faisant l’objet d’un arrangement et une homologation avec le juge est une pure injustice pour les parties lésées, notamment les parties civiles togolaises, et plus globalement les parties civiles africaines privées de la possibilité de porter plainte en tant que partie civile.
Par l’autoroute sans péage ou en ascenseur, qui veut aller au paradis ?
En fait, on est en train d’assister à une réflexion des responsables dirigeants du Groupe Bolloré sur un éventuel repli stratégique d’Afrique. Il serait question de limiter les conséquences éventuelles d’une décision judiciaire devant un tribunal correctionnel en France si le « plaider coupable » en France devait prospérer et se solder in fine par un procès public avec un grand « déballage », notamment sur les noms de celles et ceux qui ont bénéficié ou participé aux faits de corruption incriminés. Les conséquences possibles en termes de « saisies » d’actifs, d’interdiction d’exercer ou de diriger des associations caritatives en Afrique ou ailleurs pourraient entacher non seulement la réputation, mais aussi les « bénéfices », voire la richesse de ceux qui feront l’objet de condamnations.
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Au plan politique au Togo, une condamnation des partenaires des « coupables » résulterait en : un constat d’association de malfaiteurs travaillant en bande organisée ; une « démission » immédiate et sans condition du Chef de l’Etat et de son gouvernement, sans compter les nombreux dirigeants des sociétés impactées, souvent proches parents du Chef de l’Etat ; une indemnisation des victimes et des organisations de la société civile concernées, actuellement complètement marginalisées.
Selon Louis Keumayou, journaliste et analyste politique, le Groupe Bolloré « gardera un pied important à travers d’autres activités [en Afrique], comme par exemple l’activité de la diffusion de la télévision et la diffusion d’internet sur le terrain africain. Ce sont des activités qui continuent de rapporter énormément au groupe Bolloré sur le continent africain ». Autrement dit, le désengagement total et éventuel d’Afrique pour le Groupe Bolloré ne serait pas à l’ordre du jour. Il s’agirait tout au plus d’un réajustement, voire une cession éventuelle des entreprises du Groupe non rentables.
Par contre, le transfert de la direction du Groupe de Vincent Bolloré à une autre personnalité y compris l’un de ses enfants, pourrait contribuer à limiter le « choc médiatique » que produirait une condamnation pénale pour corruption si cela devait advenir. Ayant déjà plaidé coupable, Vincent Bolloré pourrait invoquer la clause juridique « in solidum » pour faire partager les sanctions et peines, voire les faire transférer à ceux qui n’ont pas plaidé coupable et sont à l’origine d’un même préjudice pour une grande partie du Peuple togolais. En effet, sur l’implication de l’Etat togolais, le Gouvernement togolais, par la voix de M. Christian Trimua, ministre des Droits de l’Homme et porte-parole du gouvernement sur ce dossier, a estimé qu’il s’agissait d’une « affaire franco-française ». Pour celui qui a déjà plaidé coupable et souhaite limiter la part des saisies possibles de ses biens aujourd’hui trop exposés, il lui faudra, tôt ou tard, -mieux vaut tôt que tard-, lever les obligations de discrétion, les devoirs de réserve, les secrets dits professionnels assimilables d’ailleurs à des secrets confessionnels en vigueur dans les groupes ésotériques. A défaut, et en cas de condamnation, le principal accusé et ses deux acolytes risquent de porter seuls une responsabilité transférée.
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Bien que selon l’agence de presse AFP, le Groupe Bolloré a indiqué « ne pas commenter les rumeurs de presse concernant ses activités de transport et de logistique », la réalité actuelle est qu’aucun des dirigeants du groupe Bolloré S.E. ne dément les rumeurs de vente d’actifs en Afrique.
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Bien que selon la jurisprudence récente française, le risque qu’une reconnaissance de culpabilité ne soit pas acceptée semble s’accroître dès lors que des intérêts publics, étrangers ou pas, et par extension éventuellement la souffrance liée au manque à gagner des peuples victimes, sont en en jeu, surtout quand celui (ou ceux) qui plaide (ent) coupable (s) est (sont) une ou des personnalités très médiatisées.
Tout l’enjeu d’un procès équitable en correctionnelle pour Vincent Bolloré et ses deux collaborateurs est posé car le « code de procédure pénale prévoit que le procureur de la République et les parties ne peuvent se référer aux déclarations faites ou aux documents remis au cours de la procédure de CRPC devant la future juridiction d’instruction ou de jugement, car la médiatisation de l’aveu de culpabilité du prévenu peut nuire à l’impartialité du juge chargé de la poursuite de l’affaire».
C’est oublier que sur la base de l’accès au dossier, la médiatisation ou pas de l’aveu « volontaire » et « unilatéral » de la culpabilité des trois responsables du Groupe Bolloré, ne peut nuire à l’impartialité du juge chargé de la poursuite de l’affaire. En effet, ce que les parties civiles auront à dire n’a fait l’objet d’aucune médiatisation à ce jour.
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Au demeurant, si la culpabilité des trois prévenus devait se confirmer en correctionnelle, la justice française et ses juges gagneraient en crédibilité, car pour une fois, le droit, la justice et surtout la vérité seront alignées sur la même planète, celle de l’honnêteté envers les victimes, complètement marginalisées tant par le ou les présumés corrupteurs, que par le, la ou les présumés corrompus au Togo.
Au demeurant, il faut croire que ce qui était recherché était d’aller « direct » au Paradis non pas par l’autoroute, mais en ascenseur. La réalité pourrait se révéler n’être qu’une erreur de « logistique ». En effet, l’ascenseur peut tout aussi bien mener au paradis, qu’en enfer, à la faveur du jugement d’un tribunal correctionnel, s’il a lieu.
Rappelons tout de même pour les croyants, qu’il fait plus chaud en enfer qu’en Afrique. YEA.
Dr. Yves Ekoué Amaïzo
Source : Togoweb.net