Bavures militaires et décompte des morts : L’armée togolaise doit relire Me François Boko

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Il ne se passe de jour où on ne compte des bavures militaires ou policières au Togo. Le phénomène tend à devenir banal et se fait surtout remarquer à Lomé. Le décompte macabre qui suit ces bavures amène nombre de Togolais à réfléchir sur le rôle dévolu à l’armée ou à la Police dans un Etat comme le Togo.

La situation est préoccupante. Pour un rien, un homme en uniforme peut tirer sur un civil. Et pourtant en 2005, pendant qu’il démissionnait de son poste de ministre de l’Intérieur à cause de risque de violence qui se profilait à l’horizon lors des préparatifs de la présidentielle à l’époque, Me François Akila-Esso Boko appelait ses frères d’armes à ne pas considérer les civils comme des ennemis.

2005 a été une année délicate dans l’histoire politique du Togo. 500 morts selon le rapport de l’ONU, 1000 morts à en croire celui de la Ligue togolaise des droits de l’Homme (LTDH) durant les violences qui ont émaillé l’élection présidentielle de 2005 et la venue de Faure Gnassingbé au pouvoir.

Et c’était justement ce que le ministre de l’Intérieur d’alors voulait éviter en démissionnant, appelant par la même occasion les treillis à ne pas retourner leurs armes contre leurs frères. « Soldats togolais (…) les armes que vous détenez au nom de la République, ne doivent pas être retournées contre la population que vous avez la mission de protéger », avait écrit Me François Boko dans un document, avant de démissionner.

Cette sortie de cet officier est encore d’actualité, surtout dans un contexte où les crimes et les assassinats commis par des hommes en uniforme se ramassent à la pelle aujourd’hui. Me François Boko est allé loin en pointant du doigt des mains obscures qui ont toujours tenté d’instrumentaliser l’armée contre les populations civiles. « Il est intenable de continuer à mettre en permanence nos soldats sous pression à la recherche d’un ennemi du dedans qui n’existe pas », avait-il souligné.

Il avait ensuite appelé l’armée togolaise à faire corps « avec notre patrie qui vous chérit de toutes ses tripes avec la ferme conviction que les armes que vous détenez au nom de la République, (…) doivent servir à garantir une neutralité nécessaire à la consolidation de la démocratie ».

Dans le document, Me François Boko, faut-il le rappeler, a décrit bien avant ce qui allait se produire si on ne reportait pas ces élections en mettant en place une transition capable de taire les rancœurs, afin d’éviter le pire et le chaos.

« Le spectacle désolant et dangereux de militants qui circulent en bande et en cortège munis de gourdins cloutés, des coupe-coupe, des projectiles de tout genre, des fusils de chasse, obscurcit les horizons de cette période électorale. Je vois dans tous ces comportements, les risques réels d’affrontements sanglants. Tout porte à croire selon des sources concordantes, que tout est préparé de part et d’autre pour forcer l’issue du scrutin à travers des milices armées, l’option militaire et les stratégies électorales populistes fortement inspirées des scénarios de conquête de pouvoir par la rue initiés dans certains pays. En ma qualité de ministre de la sécurité probablement bien renseigné, je ne me sens pas capable de prendre le risque de conduire les filles et fils de ce pays à rompre cette communauté de destin qui les lie. Je compte sur un sursaut national pour que la classe politique mue désormais par l’intérêt supérieur de la nation, se rende à l’évidence et humblement qu’il est temps de donner espoir à ce pays en décidant de mettre un terme à ce processus électoral chaotique et dangereux pour le Togo », avait-il écrit.

A-t-il été écouté ? Non. Et la suite, tout le monde la connaît aujourd’hui. Les Togolais drainent les séquelles de cette sombre année jusqu’alors. L’armée reste le bourreau pour les civils, et les deux entités se regardent toujours en chien de faïence.

I.K-

Source : icilome.com