(…) On ne le dira jamais assez, l’opposition togolaise, autant elle est riche en « opportunistes » prêts à saisir la balle au bond, autant elle est jonchée de commerçants.
Que ce soit à Paris, à Accra ou à Lomé, de la main du président guinéen, de la main du président ghanéen, de la main du président ivoirien, ou encore des mains des émissaires de la dictature, parfois même à la source de Lomé II, des opposants togolais ont pris des sous en pleine crise et en plein dialogue inter- togolais. Le grand bruit que l’affaire des 30 millions a fait n’était qu’une infime face visible de l’iceberg.
Les deux premiers responsables de la coalition, Jean Pierre Fabre, chef de fil de l’opposition à l’époque, et Adjamagbo Johson, coordinatrice de la coalition, en tant que premiers responsables doivent avoir un jour le courage de dire au peuple ce qui s’est passé. S’ils refusent de parler pour situer les Togolais, l’opinion publique a déjà sa vérité, et un jour leurs bienfaiteurs aussi parleront d’eux. Il existe parmi eux des spécialistes du négoce.
A chaque fois que des sujets sensibles sont à l’ordre du jour, ils approchent ou la dictature ou les médiateurs « nous sommes prêts à telle ou telle concession, il y a combien dans la cagnotte ?». Ils doivent situer l’opinion pour donner du tort aux différentes fuites sur leurs comportements.
Il faut le faire pour situer le peuple, pour libérer leur conscience, si elle existe, sans quoi l’opinion serait obligée de retenir que c’est bien eux qui ont vendu la lutte de libération des Togolais à la dictature de Faure Kodjo. L’avenir politique d’un dirigeant se trouve aussi dans sa probité morale. Le dernier score de l’ANC, 4% de l’électorat doit permettre de tirer les leçons.
Quand l’évêque parlait de « taupe », ou de judas, il n’était pas loin de la barre. Les taupes ont vraiment joué leur rôle, sauf que pendant que l’archevêque voyait les taupes seulement dans l’autre camp, juste à côté de lui se trouvaient aussi de grosses taupes. Le dialogue entre togolais était devenu une foire où des individus jouaient le double jeu entre les résidences de Faure et les palais des médiateurs. In fine, le résultat tout le monde le connaît. Dans cette immoralité, des gens y trouvaient le même argument pour justifier leur traitrise « c’est notre argent », « il faut prendre cet argent pour les combattre. On ne refuse pas l’argent ».
Ce que les opposants ont perçu n’est-il toujours pas assez pour financer la lutte et donc déraciner présentement la dictature ? Cette situation pose et répond à une question. Si les mêmes institutions se comportent de différentes manière, se montrant fermes ailleurs et laxistes, voir complices de forfaitures au Togo, c’est que le comportement des opposants togolais, soit disant en lutte pour la libération, dicte à ces messieurs leurs attitudes. Quand on a de tels comportements en pleine crise, on ne peut qu’accepter aller aux élections à n’importe quelle condition.
Si ceux qui ont participé à ce vote ne s’arrangent pas à ramener la victoire au peuple, on aura compris que, leur participation à cette élection n’est qu’un service après-vente après qu’ils aient passé au guichet de la bande au pouvoir. Cette élection sonne comme un arrangement pour légitimer une dictature qui ne fait économie d’aucune énergie financière pour corrompre ses adversaires. Qu’un opposant togolais dise ne pas assez connaître ce régime et se montrer surpris de ce braquage électoral est un déni de la réalité, une mauvaise foi qui crève les yeux.
La bonne foi éprouvée d’un prélat
Mgr Kpodjro donne de ses dernières énergies pour offrir l’alternance aux Togolais. Dans un pays en panne de personnalités morales fortes, il joue sa partition de bonne foi avec les moyens de bord mais pour quel résultat dans un pays où la décadence morale est au plus bas niveau, où des nervis peuvent s’inviter à la devanture d’un prélat pout crier sur lui parce qu’il a commis le crime de jouer son rôle?
Comme les dictatures savent si bien le simuler, il se dit que Faure Gnassingbé était à deux doigts de ne pas se présenter à cette élection présidentielle. C’est à cette période que la dynamique Kpodjro porte Agbéyomé devant la scène.
L’ancien PM commence par mouiller le maillot avec ses déclarations tonitruantes à créer l’insomnie à une dictature. On le dit même avoir approché certains barons, qu’il a des entrées dans l’armée. Tout d’un coup, comme un crocodile qui a fait semblant de dormir, le prince revient, « je veux ma chose », j’ « accepte humblement le choix de mon parti ». Mais la dynamique Kpodjro, est en train de mourir comme elle est née. Elle est née dans la division où les uns sont des taupes les autres des saints ni tâche, elle est en train de mourir dans l’indifférence des participationnistes avec des déclarations plus au service de la dictature que du candidat du MPDD.
Le MPDD, tout le monde le sait n’a pas pu faire de miracle aux différentes élections précédentes, législatives et locales. Mais la dynamique Kpodjro naît au moment où l’ANC a commencé sa descente aux bas niveaux dans les sondages, au moment où l’opinion est plus favorable à un candidat commun pour l’opposition.
Mieux, quand une telle initiative est portée par un prélat qui a connu un parcours et qui n’est pas tombé de la dernière pluie, il y a de quoi changer la donne dans le vote et faire de quelqu’un qui n’a pas pu se faire élire maire ou député, un président de la République.
Ces résultats qui crèvent les yeux n’ont pas empêché Faure de faire ce qu’il sait mieux faire, un braquage électoral inédit. De quelle stratégie disposent présentement la dynamique pour faire parler la volonté populaire qui s’est exprimée dans les urnes ?
Impossible de mobiliser ?
Comment les opposants togolais ont-ils procédé pour mobiliser pendant la campagne ? Ils ont mouillé le maillot même sans avoir encaissé l’aide institutionnelle. Aux temps forts des contestations nées du 19 août 2017, tous ces candidats qui ont sillonné chacun sa zone pour haranguer l’électorat étaient au Togo, certains étaient même dans la coalition. Si tous s’étaient chacun investit pour ainsi mobiliser à l’époque aux côtés de la mobilisation de l’homme du 19 août, on allait déjà oublier cette dictature. Si tant est qu’ils ont l’intérêt de la Nation comme souci, qu’est-ce qui empêche de faire la même mobilisation pour revendiquer la vérité des urnes ?
A moins que les participationnistes s’entendent pour reprendre la victoire du peuple, on sera obligé de conclure comme cela se présente, que c’est en toute connaissance de cause qu’ils y ont participé pour légitimer la dictature et obtenir, de ce fait, une « capitulation négociée » contre des prébendes.
Mais encore une fois, l’alternance est immanquable au Togo, car les symptômes d’une fin de règne ne trompent pas. Une chose est sûre, les nouvelles générations sont exigeantes et désormais les élections se gagnent dans des différences qui tiennent à des mouchoirs de poche. A moins que monsieur Kodjo Faure veuille confirmer le fait qu’il est un spécialiste des braquages politiques, en plein 21è siècle, qu’un président se fasse élire à 72,36 %, c’est un plébiscite.
Le président continue malgré son plébiscite par avoir peur de sa propre population au point de garder des pans du territoire sous siège militaire, de militariser tout le pays qui vit au rythme des armes de guerre, de retenir encore une bonne partie des jeunes en exil. Si 72% des Togolais sont pour Faure, il a l’écrasante majorité des citoyens avec lui, et ça suffit pour qu’il soit en sécurité.
Mais il interdit toujours la petite minorité, c’est-à-dire, les 1/4 qui ont refusé de voter pour lui, d’exprimer son mécontentement dans des manifestations pacifiques. Tout ceci, au nom d’une paix qu’on cherche comme un oasis au désert. Y a-t-il mieux pour lire des signes de fin ?
Le Rendez-vous No.347
Source : Togoweb.net