Togo- Thomas Dietrich raconte sa mésaventure : « ILS M’ONT DIT : “TU AS INSULTÉ NOTRE PRÉSIDENT !” »

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Arrêté par les forces du régime, condamné, puis expulsé du pays le 16 avril dernier pour « entrée illégale sur le territoire », le journaliste français indépendant, Thomas Dietrich, raconte sa mésaventure dans l’enfer dictatorial au Togo.

C’était dans la nuit du 10 au 11 avril que le journaliste français a franchi la frontière entre le Bénin et le Togo. Thomas Dietrich affirme avoir eu un visa. « Je suis donc entré dans la nuit du 10 au 11 avril sur le territoire togolais, espérant obtenir dans un second temps une accréditation », a-t-il relaté.

Le 14 avril, le journaliste a publié une vidéo sur son compte Twitter, dans laquelle il décrit le contexte politique actuel du pays, mettant en lumière le changement constitutionnel controversé et le double scrutin législatif et régional à l’horizon. Dans la même vidéo, Thomas Dietrich a également critiqué le régime des Gnassingbé, au pouvoir depuis plus de cinq décennies, avec le soutien de la France.

Dans la journée du 15 avril, le journaliste s’est rendu à la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC) dans l’espoir d’obtenir une accréditation. Mais à peine est-il sorti du bâtiment de l’institution togolaise de régulation des médias qu’il a été appréhendé par des policiers cagoulés. Thomas Dietrich a été conduit manu militari à la Direction Centrale de la Police. « Un des policiers m’a giflé, ils m’ont ordonné de me déshabiller puis d’enlever mon alliance. Lorsque j’ai refusé, l’un d’eux m’a étranglé », témoigne-t-il.

Après son arrestation par les autorités togolaises, il a fallu attendre des heures pour que le journaliste français puisse informer ses proches et bénéficier de l’assistance d’un avocat. Le 16 avril au matin, il a comparu lors d’une « procédure sommaire » selon les termes des autorités togolaises. « Le procès kafkaïen a duré une trentaine de minutes. Ils ne voulaient pas m’accuser pour des motifs politiques. Ils ont donc opté pour une condamnation pour “entrée illégale sur le territoire togolais”, après avoir annulé mon visa », résume Thomas Dietrich.

Condamné à six mois de prison avec sursis, assorti d’une amende avec sursis, d’une expulsion ainsi que de cinq ans d’interdiction du territoire togolais, Thomas Dietrich reconnaît que sa vidéo a été la cause de cette réaction des autorités togolaises. « C’est clairement ma vidéo qui a posé problème. Les policiers me l’ont dit : “Tu as insulté notre président !” Le reste n’était qu’un moyen détourné pour m’empêcher de couvrir la révision de la Constitution et les relations entre la France et le Togo », ajoute-t-il.

Réactions en France

Ce traitement dégradant et inhumain subi par le journaliste français au Togo a suscité des réactions en France, notamment celle d’Aurélien Saintoul, député insoumis des Hauts-de-Seine et secrétaire de la Commission de la Défense Nationale et des Forces Armées.

Le 15 avril au soir, il a contacté la conseillère parlementaire du ministère des Affaires Étrangères, Helena Robyn, qui s’est d’abord montrée rassurante sur la situation du journaliste. Mais le 16 avril, aucune de ses tentatives de communication par SMS ou appel n’a obtenu de réponse, d’après lui.

Selon Aurélien Saintoul, c’est dans la soirée que Helena Robyn lui a finalement envoyé un message indiquant que Thomas Dietrich « avait un visa incomplet, retranscrivant presque mot pour mot les allégations fantaisistes des autorités togolaises ».

Dans la foulée, le ministère des Affaires Étrangères a ajouté que l’ambassade avait eu à plusieurs reprises l’avocat de M. Dietrich au téléphone et une fois M. Dietrich lui-même lors de sa garde à vue de courte durée, ce que l’intéressé dément. « J’ai passé environ 29 heures en détention, ce qui n’est pas vraiment de courte durée. J’ai eu l’ambassadeur au téléphone pendant environ 15 secondes. Il voulait savoir si j’avais été maltraité, mais l’officier de police judiciaire se trouvait à côté de moi à ce moment-là. Dire qu’ils ont suivi la situation avec attention est absolument dingue. L’ambassade n’a pas répondu aux appels de Reporters Sans Frontières ou de journalistes qui s’inquiétaient de mon sort entre lundi et mardi », poursuit Thomas Dietrich.

Pour lui, si les autorités françaises n’ont pas réagi promptement à sa mésaventure au Togo, c’est simplement pour éviter de froisser le régime au pouvoir et de voir le pays tomber les bras d’une puissance étrangère, comme la Russie. « Elles n’ont pas communiqué sur cette affaire. Ce serait bien que la diplomatie française se positionne sur les violations des droits d’un journaliste, plutôt que de les laisser être maltraités. Elle est complètement tétanisée, n’osant plus rien dire, par peur de froisser le Togo et de le voir tomber dans les bras d’une puissance étrangère, comme la Russie. Il y a une véritable perte de puissance de la France », conclut-il.

Thomas Dietrich annonce sa volonté de porter plainte pour violences contre les autorités togolaises.

Source : icilome.com