Cette fois, c’est dans un registre familier que Francis Pedro Amuzun assène ses quatre vérités à Faure Gnassingbé sur la situation sociopolitique du pays. Dans son coup gueule, l’ancien Vice-président de la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) n’a pas mâché ses mots. Ce lieutenant de l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC) interpelle la conscience du chef de l’État sur la crise profonde que traverse le pays. Il lui demande par ailleurs de faire la paix avec son petit frère Kpatcha Gnassingbé. Lisez plutôt!
Qu’il me soit permis de m’adresser à toi par ce biais compte tenu de la mentalité actuelle d’un certain nombre de Togolais qui confondent tout. Aussi, sais-je que tu peux me lire directement toi-même.
Et donc, ai-je délibérément choisi le style direct pour te parler, et cela n’est que l’expression de la franchise qui me caractérise et par ricochet, la nécessité pour moi de toucher, intuitu-personae ta conscience.
Je n’ai, d’ailleurs, aucun mérite mais permets-moi de te dire certaines choses qui certes vont te fâcher mais je te prie de prendre tout ton calme pour me lire jusqu’au bout, peut être tu conviendras avec moi de l’opportunité de ces choses, ce que je souhaite, en vue d’y remédier et de penser à les corriger pour le bien de nous tous. Il est donc temps que tu prennes la mesure de la situation dramatique de notre pays. Il est temps que tu fasses ton examen de conscience pour jauger le poids de ta gouvernance sur notre pays.
Il est temps que tu regardes la réalité en face, en te posant l’unique question : « suis-je vraiment au service de mon pays ? ». Et subsidiairement, demandes-toi « ai-je apporté le bonheur à mes concitoyens que je dirige depuis un certain temps ? ».
Bien sûr que, tu trouveras cocasse mon interpellation, mais, je voudrais t’inviter à la méditation pour qu’enfin tu te résolves à prendre en compte les souffrances de notre pays.
C’est donc, sans complaisance que je vais décliner des faits qui, à mon sens, doivent te servir de sujets de méditation. Ces faits, tu les connais mieux que moi, mais, de ma part, ce n’est qu’un rappel.
Ces faits les voici. Et je voudrais aussi faire abstraction du passage de ton père à la tête de notre pays. À y voir de près, ta gouvernance depuis plus de 16 ans est un calvaire pour les Togolais que nous sommes, un véritable chemin de croix qui étouffe notre pays.
Cette gouvernance n’est faite que de clientélisme, de délations, de violations des droits de l’homme les plus élémentaires, de tueries et de razzias sur les richesses de notre pays, le tout dans une cohorte de hold-up électoraux honteux.
Comment peux-tu garder le silence lorsque dans le pays où tu t’es fait premier responsable, ceux des Togolais qui sont sous le drapeau, tirent à bout portant sur la population, et plus révoltant, sur des enfants à qui appartient l’avenir de notre pays ?
Comment peux-tu te taire quand des individus aux intentions macabres, brûlent des marchés, soubassements de l’économie de notre pays pour la simple raison de mettre en difficulté tes adversaires politiques ?
Comment acceptes-tu que nos régies financières échappent au contrôle lorsqu’on nous parle de détournements et autres évasions fiscales dans une proportion systémique ? Comment l’administration nationale, la police nationale et l’armée nationale deviennent-elles l’apanage de certains des Togolais au détriment d’autres ?
Mon souci n’est pas de t’accabler mais de mettre le doigt là où cela fait mal le plus pour que tu envisages un revirement de situation salutaire pour nous tous.
Un pays n’est ni la propriété de personne, ni l’héritage d’un groupe d’individus. Il appartient à tous ceux qui l’habitent et la seule façon juste de faire participer tout le monde à son développement, n’est ni moins, ni plus l’organisation des élections transparentes. Or, tu n’as jamais gagné à aucune des élections auxquelles tu as participé. Tu as les rênes du pouvoir aujourd’hui parce que certains de nos compatriotes se sont offerts pour traficoter les résultats en ta faveur dans le seul but d’avoir sonnantes et trébuchantes en leur possession.
Il ne fait plus du tout bien qu’après chaque élection dans notre pays, nous soyons à discutailler sur le sexe des anges. En un mot il faut arrêter ces honteuses manies des juges constitutionnels, des présidents de la CENI, des présidents des CELI, des membres des bureaux de votes, des préfets et autres commandants de gendarmerie et commissaires de police y compris des officiers et éléments des forces armées togolaises qui se croient investis de mission pour modifier le cours normal des processus électoraux.
Le point qui me tient véritablement à cœur, c’est l’éducation au sens complet du terme.
D’abord, l’éducation parentale a volé en éclats tant le mensonge est devenu la norme dans notre pays. Des enfants qui rabrouent leurs géniteurs parce que dehors ils voient leurs aînés hauts placés arboré des postures indignes de la personne humaine et de leur rang social. Le tout argent a pris le pas sur l’honnêteté, la dignité, la responsabilité, toutes valeurs morales qui naguère conféraient à nous autres Togolais une place de choix sur tout le continent africain. Il nous faut revenir à l’enseignement de la morale dans nos écoles y compris dans nos Universités.
Bien sûr que l’éducation nationale doit être revue de fond en comble. Le système d’enseignement que nous avons aujourd’hui ne peut plus permettre au togolais d’affronter les difficultés de la vie. Ce système a fini par résigner beaucoup de nos compatriotes à faire l’âne pour avoir le foin. Or, apprendre à pêcher est mieux qu’offrir du poisson.
Sur un autre plan, la famille est le soubassement de la vie. Quand elle s’effiloche, plus rien ne va. L’adage dit que L’ÉQUILIBRE FAMILIAL PEUT RECEVOIR UN COUP MAIS AU GRAND JAMAIS NE ROMPT POINT. Quel que soit les problèmes entre frères et sœurs, cela finit toujours par se résoudre car on est frère et sœur à vie. Et c’est pour cela, quoique cela ne me concerne véritablement pas, je voudrais joindre ma voix aux éminentes personnalités qui m’ont précédées, pour te demander de faire la paix avec tes frères et sœurs en libérant ton petit frère Kpatcha qui depuis 12 ans croupit à la prison civile de Lomé. Ce sera un gage pour nous les Togolais que tu es sur le point de revoir les choses en mettant au centre de toute action, l’Homme.
Que ne voudrais-je te dire beaucoup de choses ? Je te sais suffisamment aguerri pour saisir le fond de ma pensée, qui se résume au bien-être de tous les Togolais.
Je prie le seigneur notre Dieu pour toi pour qu’en cet instant et à jamais ton cœur et tout ton esprit soient soumis à la Visitation divine.
Puisse Dieu le père, Dieu le fils et Dieu le Saint-Esprit t’assister et t’éclairer pour tes choix futurs.
Ce texte m’a été inspiré en l’an de grâce 2021 et le dimanche 17 juillet en la paroisse Sainte Fatima d’Avédji au cours de la messe de 11 h.
Francis Pédro AMUZUN
Source : icilome.com