Togo, Présidentielle 2020 : Refus de la mission d’observation électorale au CEJP, le Pouvoir humilie Mgr Nicodème Barrigah

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Extrait de La Une de Fraternité No.344 du 22 janvier 2020

L’Organisation de la société civile Conseil Episcopal Justice et Paix (Cejp) n’observera pas la présidentielle du 22 Février prochain. Sa demande a été rejetée par le gouvernement pour motif de manque de crédibilité et de financement douteuse. Ce refus qui vient après celui de décembre 2018, pour le compte des dernières législatives se veut vraisemblablement un message fort, mieux l’expression d’un ressentiment qu’éprouve le Pouvoir togolais vis-à-vis de l’église catholique.

Jamais deux sans trois !

Par courrier en date du 16 janvier 2020, le gouvernement togolais, au travers du ministère de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités locales vient de rejeter la demande d’observation électorale formulée par le Conseil Épiscopal Justice et Paix (Cejp). Ceci, partant d’une conclusion aussi laconique qu’avionique selon laquelle, cette organisation n’est pas qualifiée pour assurer une observation neutre et crédible d’une élection. L’exercice de motivation de cette affirmation n’est donc que des arguments visiblement tirés par les cheveux.

Boukpessi dans ses démonstrations

En effet, pour le ministre Payadowa Boukpessi, la Conférence épiscopale du Togo (Cet) dont le Cejp se réclame un outil a, ces dernières années, pris ouvertement des positions qu’il juge «partisanes» dans la crise politique qui secoue, depuis Août 2017, le pouvoir togolais. Et de citer, en illustration, le dernier message de la Conférence des Évêques du Togo en date du 21 novembre 2019. Un message qui, selon le ministre, a repris en compte, les réclamations de l’opposition, notamment sur la Ceni, la Cour Constitutionnelle et le code électoral. «Comment peut-on comprendre que la Conférence des Évêques du Togo demande le 21 novembre 2019, la révision électorale pour une élection prévue conformément aux dispositions constitutionnelles au 22 février 2020?», se demande Payadowa Boukpessi qui dit voir une coïncidence troublante entre les réclamations de l’Anc et la C14 et les demandes de la Cet. Cela, poursuit le commissaire du gouvernement, ajouté au «refus» de cette organisation de communiquer sur les sources de financement devant lui permettre de déployer quelques 9000 observateurs paraissent, à ses yeux, la preuve que cette opération est téléguidée par une ou plusieurs organisations que la Cet ne veut pas dévoiler.

Pourtant, la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) s’était entretenue, dans une ambiance conviviale avec les premiers responsables du Cnjp. Entretien au cours duquel, les conditions d’observation de cette organisation ont été discutées, sur un air de satisfaction. Cet énième refus, non seulement caricature un ministre plutôt militant que serviteur du peuple mais aussi démontre à plus d’un titre, la dépendance de la Ceni pourtant censée être neutre et indépendante de toute injonction des chapelles politiques bien que composées majoritairement des délégués des formations politiques. Et cela repose à juste titre la nécessité d’une Ceni plutôt technique que politique dans nos états, surtout africains où les institutions de la République sont souvent à la solde du pouvoir.

Mgr Barrigah humilié par le Pouvoir de Lomé

Cette situation, loin de paraître étonnante, décrit si bien les relations conflictuelles existant, depuis peu, entre le Pouvoir de Lomé et l’église catholique qui n’y va pas du dos de la cuillère pour s’opposer catégoriquement à toute idée de quatrième mandat de Faure Gnassingbé. Et cette position, l’église l’a toujours maintenue sans ambiguïté aucune, au regard des réalités sociopolitiques caractérisées, le plus souvent par des conflits post électoraux. Lesquels débouchent malheureusement sur des morts, des blessés et des milliers de déplacés.

Aussi, ce refus du gouvernement à accréditer le Conseil Épiscopal Justice et Paix n’est en réalité que la difficile digestion, par le Pouvoir de Lomé, de l’engagement de l’Archevêque Émérite de Lomé , Mgr Kpodzro aux côtés des forces démocratiques en faveur de l’alternance en 2020. En clair, c’est un procès fait à l’église catholique du Togo entière de prendre position pour l’opposition. Ce qui est loin d’être la réalité, en ce sens qu’en tant qu’entité morale, l’église a toujours motivé sa prise de position par son rôle d’éveilleur de conscience et d’ambassadeur de la paix et de la quiétude.

Le fruit de l’ingratitude !

Au-delà du conflit ouvert entre l’église catholique et le Pouvoir de Lomé, ce refus d’accréditation se veut également une humiliation que Faure administre au nouvel Archevêque de Lomé, Mgr Nicodème Barrigah qui n’est autre que le Président de la Commission Épiscopale Nationale Justice et Paix au sein de la Conférence des Évêques du Togo. L’on peut aussi associer, les sorties «gênantes» du Prof Magloire Kokouvi, membre influent de cette organisation. C’est dire donc que l’attitude de Faure qui était bien à la prise de fonction de Mgr Barrigah avec tout son gouvernement, il y a quelques jours seulement, n’est donc que l’expression d’une duplicité qui ne dit pas son nom. Mieux encore du mépris au regard du rôle social ô combien important que joue l’église pour la paix, l’unité et le développement dans le pays. De la Conférence Souveraine Nationale à la Commission- Vérité- Justice et Paix (Cvjr), l’église à toujours été sollicitée pour jouer le premier rôle. Ce qu’elle a su faire tant bien que mal, à la satisfaction générale de tous les acteurs sociopolitiques.

L’église ne fléchira point !

Qu’à cela ne tienne, fidèle à sa mission d’être source de lumière et d’espérance pour les laissés pour compte, ceux qui ne savent plus à quel saint se vouer, l’Eglise, ne saurait rester indifférente devant la détresse du peuple ainsi exploité, asservi et traumatisé par ceux-là mêmes qu’il élit ou soutient pour assurer son bonheur, a déclaré le clergé dans son dernier message. «Ce combat est motivé par la conviction que la foi est d’abord un engagement aux côtés de ceux qui souffrent et qui crient leur détresse vers le Seigneur toujours attentif aux appels des malheureux», a précisé la Cet. Un coup isolé ne saurait arrêter le combat, celui de dénoncer ce mal endogène qui gangrène la classe politique, éclairer les consciences sur la voie à suivre pour sortir le Togo du cercle infernal dans lequel l’enferment ses propres fils et filles qui le gouvernent ou qui aspirent à le gouverner. Le mépris, l’humiliation, la médisance et le faux jugement paraissent aussi le prix à payer pour le bonheur du peuple togolais qui continue à croupir dans une misère indescriptible. Toutefois, les Évêques du Togo, victimes de la justesse de leur lutte citoyenne ne se lasseront point dans leur engagement de procéder à un changement fondamental du cœur indispensable à une paix et un vivre ensemble durables, à l’avènement d’un Etat de droit, juste et prospère.

Source : Fraternité No.344 du 22 janvier 2020 (fraternitenews .info)

Source : TogoActu24.com