Au Togo, on a l’impression que dès qu’une activité permet aux jeunes de s’en sortir un peu, certaines personnes cherchent absolument des moyens pour arrêter ça.
Pendant plusieurs années, j’ai été l’un des plus grands soutiens de l’ l’Arcep, car leur décision allaient souvent dans le sens de l’intérêt du peuple, contre les grosses sociétés de téléphonie, surtout mobile. Quelle mouche les a piqués subitement pour changer de fusil d’épaule ? Je n’en sais rien ? Ont-ils changé de directeur ou de logiciel ? Je me le demande.
De quoi s’agit-il en fait ? Aujourd’hui, pour ouvrir un wifi zone, il faut donc faire une déclaration à l’Arcep et payer une licence de 100 000f. (Si mes informations sont bonnes) et ensuite souscrire à une offre spécial wifi zone à Togocom d’une valeur de 200 000f mensuels. Entre nous, quel chiffre d’affaire les wifi zone font pour arriver à payer autant? C’est la fermeture d’office pour plusieurs opérateurs. Mais cela ne suffisait pas. Ils ont, pour corser l’addition, sorti cette nouvelle décision.
J’ai trois reproches à faire à cette décision.
La première est qu’elle ne définit pas clairement ce qu’est un wifi zone. Les fournisseurs d’accès internet installent chez tous les particuliers un point d’accès dont la portée est de 300m sans obstacles et 50m entre les murs. Et aujourd’hui, plusieurs applications permettent de vendre sa connexion internet directement depuis le point d’accès de Togocom ou canal box. En gros, chaque particulier qui se fait installer une connexion internet à son domicile dispose d’un wifi zone. Allons-nous être forcés d’aller tous nous déclarer à l’Arcep ? Cette décision devrait clairement difinir le wifi zone comme un point d’accès exploité à des fins commerciales.
La seconde est que l’Arcep impose donc aux wifi-zones une contrainte quasiment impossible à réaliser, et qui devrait, si elle était appliquée, sonner l’arrêt de mort des wifi zone. C’est l’identification des clients ou utilisateurs. La chose est assez cocasse. Quand tu arrives à l’aéroport international Gnassingbé Eyadema, tu as accès à un wifi zone gratuit, qui ne te demande aucune identification, car c’est ce qui se fait partout dans le monde. Mais si tu veux te connecter au wifi zone du petit du quartier, il faut t’identifier. J’hallucine. Et si on veut aller vraiment loin, il faudra par conséquent présenter une pièce d’identité avant de se connecter. Qui pour dire à nos amis de l’Arcep que seulement 25% de la population togolaise dispose d’une pièce d’identité, la carte d’électeur n’en étant pas une. Celle-là, il fallait vraiment la trouver. Comme on aime les bench-mark au Togo, il faudra nous montrer le pays au monde qui pratique une règlementation aussi draconienne en termes d’accès aux wifi-zone. C’est quasiment du flicage.
La troisième est la contrainte géographique. Si je suis à Dapaong et que je veux ouvrir un wifi zone qui ne me donne même pas 50 000f de bénéfice par mois, je dois descendre à Lomé pour faire ma déclaration, alors que c’est l’agence locale de Togocom qui m’installe ma connexion. C’est de la pure discrimination.
Personnellement, je crois que cette décision est un abus d’autorité et que les propriétaires de wifi zone devraient saisir rapidement le juge administratif. Mais c’est un recours que peu de personnes font au Togo.
Mais concrètement, tant que la définition de wifi zone n’est pas clarifiée, cette décision, comme beaucoup d’autres de nos administrations, aura beaucoup de mal à être appliquée. Un particulier qui habite un grand domaine peut installer un poteau avec un point d’accès pour amplifier le signal. Devra-t-il se déclarer à l’Arcep pour un usage domestique ? Jusqu’à ce jour, le seul moyen dont dispose Togocom pour identifier les wifi zone est la consommation de volume de données, ce qui conduit à des coupures de connexion abusives d’ailleurs, car une maison remplie d’étudiants en vacances qui regardent des films et tiktok à longueur de journée, va consommer plus de datas qu’un wifi zone installé à Elavagnon avec 10 clients journaliers. De mon point de vue, ceci ne va pas changer grand-chose. C’est comme pour l’identification des numéros. Aujourd’hui encore, des gens te vendent, devant les agences Togocom et Moov, des numéros de téléphone au vu et au su de tout le monde. Je pourrais citer d’autres décisions qui souvent ne sont pas applicables, mais qu’on prend parfois pour satisfaire soit des règlementations internationales, ou simplement pour nous emmerder.
La question que je me pose toujours est la suivante. Si nos autorités troquaient le zèle qu’elles mettent à tout réglementer contre le zèle à aider à la création des emplois et à l’accès aux crédits, ce n’est pas mieux ? C’est quel pays où chaque matin quand tu te réveilles, c’est les choses seulement on interdit, tu n’entends jamais qu’on autorise quelque chose ? C’est comme quand les jeunes trouvent un créneau pour s’en sortir, ça énerve certaines personnes et ils bloquent ça vite fait.
Bref, en attendant, nous sommes nombreux à ne pas mettre de code sur les points d’accès que Togocom nous installent, pour aider les jeunes du voisinage. Même quand on met code, les jeunes cassent ça vite fait. La seule façon pour l’Arcep d’atteindre ses objectifs de contrôle, serait d’interdire l’installation de tout point d’accès dans le pays. Et on fait comme avant avant, que des modems filaires.
Bien entendu que je vais interpeller madame Cina Lawson sur cette nouvelle décision. Parfois on dirait qu’on aime faire une chose et son contraire dans ce pays. La ministre reconnaît que l’offre des data mobiles est encore très chère au pays, et la seule voie qui permettait de contourner ce coût, on bloque ça aussi. Ko ! Identifier les clients et utilisateurs. Vous voulez faire du Togo un hub numérique et vous imposez des mesures qui prennent le chemin contraire. Je suppose que les règles d’accès au wifi zone de l’aéroport vont changer, et nous faire perdre toute compétitivité à ce niveau.
Gerry Taama
Source : icilome.com