La récente nouvelle pénurie d’essence dans plusieurs quartiers de Lomé et autres villes a fait couler beaucoup de salive. Cette pénurie, survenue du 12 mai au milieu de la semaine dernière, est due à des perturbations dans l’approvisionnement de certaines stations-service, selon le communiqué du ministère du Commerce, de l’artisanat et de la consommation locale. Après avoir fait état de «zones de tension sur le réseau de distribution de produits pétroliers ces derniers jours sur le territoire national», le ministère a précisé que des dispositions diligentes sont prises pour un retour rapide à la normale, tout en mettant en garde les gérants des stations-services contre le non-respect de de la réglementation sur la concurrence : «Le refus de vente aux consommateurs, constitue une infraction à la loi n°99-011 du 28 décembre 1999 portant organisation de la concurrence au Togo. et sera sanctionné conformément à la réglementation en vigueur dans le pays».
En attendant les sanctions dont vont écoper les contrevenants, ce sont les commerçants de carburant illicite qui ont fait la loi, eux qui spéculent à qui mieux mieux, et les consommateurs n’ayant pas trouvé de carburant ailleurs, se ruent sur leur offre qui coûte plus cher, jusqu’à 1500 le litre.
C’est quand même étonnant que presque chaque semestre, les autorités soient confrontées à «un retard dans la livraison des produits pétroliers», à «des difficultés d’approvisionnement dans certaines stations-services». Une situation qui devient récurrente depuis septembre 2023.
A cette lancinante pénurie il faut ajouter le délestage chronique à l’abri duquel les Togolais croyaient être lors des campagnes électorales. Mais les résultats du double scrutin sont à peine connus que les Togolais ont renoué avec des quotidiens sans électricité. Un état de choses qui hypothèque littéralement la vie de bien des citoyens, surtout ceux qui ne peuvent avoir accès à l’eau , attendu que les forages qui sont alimentés par l’électricité ne fonctionnent pas. Le calvaire est le même du côté de tous ces commerçants qui font dans la vente de produits congelés et qui, faute d’électricité, ont dû essuyer de grosses pertes en raison des produits décongelés.
Où est donc passé Faure Gnassingbé du 27 avril 2023 qui disait tout le bien qu’il pense de la bonne gouvernance sans avoir le moins du monde aidé ses compatriotes à quitter la précarité ? Dans l’interview accordée aux journalistes de la chaîne privée togolaise New World Tv ce jour anniversaire (le 63ème) d’indépendance du Togo, Faure Gnassingbé faisait l’éloge de la bonne gouvernance et déclarait ceci en substance : «Quand je vis au Togo, je dois avoir la satisfaction de certains besoins sociaux : l’eau, l’électricité, la santé, l’éducation, et la fibre internet».
Le Togolais lambda vit bien au Togo, mais on ne peut pas dire qu’il a la satisfaction de l’eau, l’électricité, la santé, l’éducation. Il en est même la plupart du temps privé. Loin de s’améliorer, les coupures d’électricité sont devenues récurrentes, et la situation s’est même empirée au lendemain de la proclamation des résultats. On a juste l’impression que les autorités attendent juste que les élections soient finies pour qu’on puisse à nouveau serrer la vis aux pauvres citoyens qui n’ont pas demandé à ces établissements publics administratifs qui ont accumulé des impayés vis-à-vis de la Compagnie d’Energie Électrique du Togo (CEET).
Le plus consternant est qu’au moment où les populations souffrent le martyre, Faure Gnassingbé faisait la pluie et le beau temps au siège de l’UNESCO à Paris, où s’est déroulé le premier sommet mondial sur la cuisson propre en Afrique le 14 mai dernier. « Je suis convaincu que l’Afrique doit parler d’une seule voix sur la question de cuisson propre. La transition vers ce mode de cuisson est controversée, car elle implique souvent de subventionner les énergies fossiles comme le gaz liquéfié. Il est alors important pour l’Afrique de faire valoir que des exceptions doivent être envisagées. Nous devons être réaliste, c’est pourquoi je préférerais que nous parlions de cuisson plus propre que de cuisson propre » a martelé le Président togolais, apôtre de « la vulgarisation accrue de la cuisson par gaz liquéfié très efficace pour réduire les émissions de gaz à effets de serre, la cuisson électrique et les foyers améliorés et le financement des projets liés au crédit carbone ».
Pendant que beaucoup de Togolais suffoquent faute d’électricité, Mila Aziable, ministre déléguée chargée des Mines et de l’énergie, également dans la délégation, dit s’engager « à explorer des solutions durables pour améliorer les conditions de cuisson, ce qui contribuera à réduire les impacts sur la santé, le climat et les conditions sociales», elle qui n’est pas fichue de situer les Togolais face à cet engrenage.
Oui à la cuisson plus propre, oui à la vulgarisation de la cuisson par gaz liquéfié, mais comment faire comprendre au fils de Gnassingbé Eyadema que les populations sont tout sauf intéressées par cette vadrouille qu’il ne cesse de s’offrir à ses dépens ? Pendant que Faure Gnassingbé va faire tapisserie dans des sommets où il a toujours ses entrées, ses compatriotes vivent sur la paille, n’ont ni eau, ni électricité. Après deux semaines de perturbations désespérantes, la CEET a finalement jugé bon d’informer les clients par le truchement d’un communiqué en date du 17 mai. On y apprend dans un premier temps que «la persistance de la crise énergétique dans les pays de la sous-région n’épargne pas le Togo», qu’en « dépit de la mobilisation des moyens de production nationale, le déficit en approvisionnement s’est accentué depuis le début du mois de mai 2024, suite aux difficultés d’approvisionnement en gaz naturel au plan régional ayant entraîné des restrictions de nos fournisseurs externes» et que la CEET est non seulement «la CEET est amenée à mettre en œuvre un plan de rationnement de la fourniture d’électricité qui sera régulièrement actualisé et mis à la disposition de la population», mais qu’elle «travaille activement à la régularisation de la situation dans les meilleurs délais et recommande que les appareils soient débranchés lorsqu’une coupure intervient et ne soient remis en service qu’après le retour de l’électricité».En guise de conclusion, la société «présente ses excuses à ses abonnés pour le désagrément et les remercie pour leur bonne compréhension». De quoi apaiser les cœurs meurtris ? Un texte aussi laconique ne saurait justifier autant d’indifférence, de mépris pour les Togolais qui n’ont de toute façon jamais pesé dans l’équation gouvernementale. Trêve de circonlocutions.
Les Togolais, qui ne sont pas davantage lotis en termes d’éducation, de santé ont l’habitude… Parler de climat au moment où tout s’écroule dans son propre pays, il faut s’appeler Gnassingbé pour le faire.
Sodoli Koudoagbo
Source: Le Correcteur / lecorrecteur.info
Source : 27Avril.com