Avec l’inculpation suivie de mandat de dépôt ordonné contre Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson et Gérard Djossou, le pouvoir de Lomé opère son grand retour aux temps forts de la dictature. Douloureuses périodes de violations à divers ordres que les togolais croyaient pourtant conjuguer au passé.
Pour museler ses adversaires politiques et d’opinion, la méthode, du Rpt à Unir, reste la même. Des accusations cousues de fil blanc, soit de «groupement de malfaiteurs», soit d’ «atteinte à la sûreté de l’État». Et visiblement, la funeste stratégie qui se veut l’arme fatale du pouvoir de Lomé, ces cinquante dernières années, marche encore plutôt bien pour Faure Gnassingbé. Malgré le semblant d’ouverture et d’apaisement politique qu’il essaie d’exhiber depuis 2005, l’héritier du 5 février n’a de cesse, œuvrer pour confirmer ce que toute l’opinion publique pense du régime politique qui régente le Togo depuis 1963, année de l’irruption fatale de l’armée dans la vie politique du pays. Ceci, au travers de l’assassinat du père de l’indépendance, Sylvanus Olympio. Le premier coup d’État du continent africain. Une tache indélébile et ineffable qui fait du Togo, la plus vieille dictature du continent africain.
Le Togo à l’épreuve de la dictature douce
Le semblant de renouveau, constaté, il y a quinze ans, avec l’arrivée au pouvoir de Faure Gnassingbé, n’aura été que du leurre. Avec la restriction des libertés publiques, le musèlement des voix dissonantes dont le dernier en date est l’inculpation de Mme Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson et Gérard Djossou, deux responsables de la Dynamique Kpodzro (DMK), le fils à Eyadèma prouve aux yeux de l’opinion qu’il n’était tout simplement qu’un loup habillé en agneau.
Et les exemples de la dictature douce sont pignons sur rue. En effet, au Togo de Faure Gnassingbé, plus aucune manifestation politique n’est acceptée. Bien curieux que des amulettes, t-shirts rouges, couteaux, machettes et trompettes, entre autres, puissent constituer, pour le Procureur de la République, le corps de délit pour attenter contre la sûreté intérieure de l’État. Au Togo, héritage de Eyadema légué à son fils Faure, la conservation dogmatique du pouvoir peut pousser à pourchasser, jusqu’à leur dernier retranchement, d’honnêtes citoyens dont le crime de lest majesté aura été de s’opposer au régime de Lomé. Les cas de Alberto Olympio, une compétence en informatique qui s’est créé une identité, autant sur le continent africain, qu’en Europe ou au Canada, mais que l’on a essayé de faire passer pour un faussaire dans son propre pays ne sont que parmi tant d’autres. Un Olympio peut en cacher un autre. Que dire de Harry Octavianus Olympio contre lequel court, dans son Togo natal, un mandat d’arrêt pendant qu’il s’est érigé en un géant du BTP au Gabon où tapis rouge lui est dressé, tel un prince. L’on ne saurait passer sous silence Gilbert Fossoun Houngbo qui malgré ses volontés affichées de réussir un alliage avec ce pouvoir retord avec ses riches carnets d’adresse fruit de ses compétences rodées aux nations unies a été contraint de prendre le large, les esprits grincheux et antiques ayant eu raison de sa lumière. Bref, au Togo, tous les moyens, même les plus viles, pour arriver à museler tout adversaire même les mieux intentionnés sont bons. La démocratie n’est que de mot et l’esprit hitlérien.
Malheureusement, cette série de violations flagrantes de la constitution se fait aux yeux et à la barbe de la communauté internationale, représentée à Lomé par le Groupe des 5 (G5), à travers son silence complice et coupable face à la mésaventure que vivent actuellement les responsables de la DMK.
Yahya Jammeh va en mourir d’étonnement …
Cette sorte de dictature douce confirme, à plus d’un titre, que le Togo de Faure Gnassingbé fait mieux que la Gambie du dictateur Yahya Jammeh dans la gouvernance par le bâillonnement.
En effet, arrivé au pouvoir en 1994, par un coup d’État, Yahya Jammeh aura passé 22 ans à restreindre la liberté de la presse et les autres formes de libertés publiques. Les droits humains donc. Une posture qui lui a valu d’être classé comme un prédateur de la liberté de la presse par l’organisation Reporters sans frontières, après la promulgation de deux lois, en 2004 et 2005, restreignant cette liberté, ainsi que depuis l’assassinat du journaliste Deyda Hydara, opposant à Jammeh, en décembre 2004. L’ex chef d’État gambien sera accusé, en juillet 2019, par un des membres du commando qui a tué Hydara d’avoir été le commanditaire de l’assassinat. Entre temps en 2016, l’expression d’un peuple meurtri et désabusé aura eu raison de la gloutonnerie politique de l’homme qui, malgré ses magouilles, aura vu le pouvoir lui échapper. La voix du peuple, étant la voix de Dieu.
À l’exception près des exécutions sommaires et le semblant de liberté de presse au Togo, Faure Gnassingbé aura rivalisé d’ardeur, en 15 ans de pouvoir, avec Yahya Jammeh en 22 ans. Aujourd’hui, de l’Anc au Pnp en passant le Car, les Fdr et l’Ufc… l’opposition togolaise, sans mordant, noyautée et quasiment interdite dans la rue, n’est donc que l’ombre d’elle-même. Réduite à la figuration par le bâillonnement du pouvoir de Lomé.
Source : Fraternité
Source : 27Avril.com