Togo, Mobilisation contre le pouvoir Faure Gnassingbé : Le peuple décidé à atteindre sa « Terre promise » !

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Après les événements des 18 et 19 octobre derniers, très peu d’observateurs s’attendaient à une forte mobilisation des populations. Sans toute qu’au sein du sérail même, on aurait parié sur la démobilisation, avec les stratégies de menaces et d’intimidations déployées. Mais visiblement, le pouvoir a tiré à terre, au vu des masses populaires qui ont encore déferlé dans les rues de Lomé et de l’intérieur ces 7, 8 et 9 novembre. Et manifestement, il en faudra plus pour pousser les populations à renoncer à la lutte…

Togo, Mobilisation contre le pouvoir Faure Gnassingbé : Le peuple décidé à atteindre sa « Terre promise » !

De fortes mobilisations…

Ils étaient des centaines de milliers de Togolais dans les rues ces mardi 7, mercredi 8 et jeudi 9 novembre, à l’appel de la coalition des 14 partis de l’opposition, pour manifester une fois de plus leur lassitude du pouvoir cinquantenaire incarné par Faure Gnassingbé. Les revendications sont restées les mêmes : retour à la Constitution de 1992, vote de la diaspora, réformes électorales pour rendre les élections démocratiques, libération de tous les détenus politiques, arrêt de la terreur sur les populations…

Les Togolais ne se sont pas laissé conter l’événement. A Lomé, que ce soit à Atikoumé, à Adéwui ou à Bè Gakpoto, les points de départ ont été pris d’assaut par les populations assoiffés d’alternance, et au fur et à mesure que les cortèges avançaient, ils étaient rejoints par d’autres citoyens et ce sont des marées humaines qui ont arpenté les différentes rues des itinéraires retenus pour finalement chuter à la plage. On pouvait redouter la fatigue, d’autant plus que ce sont des manifestations étalées sur trois jours. Mais la mobilisation n’a jamais faibli durant tous ces jours ; au contraire, elle était allée crescendo et a vu les cortèges déferler dans les rues et chuter à la plage côté Hôtel Sancta Maria, pour écouter les messages des leaders de la coalition de l’opposition. Pendant que la tête du cortège arrivait au point de chute, une bonne partie était encore au niveau du carrefour Deckon.

La mobilisation pareille à l’intérieur du pays. Kpalimé, Tchamba…les populations sont autant sorties pour exprimer les mêmes aspirations, à savoir l’alternance au pouvoir. Même dans les villes assiégées où la terreur règne, comme Sokodé, Bafilo, les populations ont bravé les entraves pour manifester, avant d’être violentés et contraints d’y renoncer.

…malgré les violences et la terreur

Très peu de personnes auraient parié sur ces fortes mobilisations, au regard de la violence institutionnalisée et surtout des événements des 18 et 19 octobre derniers. Il s’agit évidemment du déploiement des milices par le pouvoir et des exactions commises sur les militants de l’opposition ou simples citoyens. Ces individus lugubres habillés en civil, cagoulés pour certains et armés de machettes, de gourdins cloutés et même de fusils automatiques, ont soumis les populations de Lomé à des violences inédites et marqué les esprits.

Leur déploiement visait à terroriser les populations et leur enlever le goût de la contestation. Cela venait s’ajouter à la répression systématique des manifestations par la soldatesque et qui se soldait déjà par morts d’hommes. En l’espace d’à peine trois (03) mois, on en est à une vingtaine de citoyens tués…A l’intérieur du pays, c’est une chape de plomb qui est instaurée dans certaines localités, avec les militaires, des bérets rouges notamment, qui tuent, bastonnent et terrorisent les populations. Mais tout cela ne les a pas dissuadées de sortir. Et ce courage, la coalition de l’opposition l’a relevé.

« En dépit des intimidations, des menaces et de la répression féroce des dernières semaines, vous êtes restés mobilisés. Ni l’interdiction illégale des manifestations publiques par le gouvernement, ni le recours aux milices qui ont semé la terreur dans toute la ville de Lomé, les 18, 19 et 20, octobre 2017, n’ont entamé votre détermination à aller au bout de la lutte que nous avons engagée ensemble pour nous libérer du régime dynastique des Gnassingbé qui pille le Togo et opprime les Togolais depuis plus de cinquante (50) ans. Vous n’avez pas non plus été trompés par les mesures dites d’apaisement, annoncées par le gouvernement la veille de nos manifestations, le 6 novembre », a-t-elle relevé dans sa déclaration sanctionnant le 3e jour de mobilisation le jeudi 9 novembre.

Les Togolais veulent aller à « Canaan »

La mobilisation était palpable ces trois jours, au grand dam de Faure Gnassingbé et de sa minorité d’une voracité certaine. « Mobilisation record », glose France24, au sujet de la masse jeudi. La contestation gagne d’ailleurs du terrain. La bonne nouvelle de ces manifestations, c’est l’entre en lice de bien d’autres villes jusque là restées en marge du mouvement. Pour la première fois, les populations ont manifesté à Aneho, Afagnan, Vogan, Gboto, Ahépé, Tabligbo, Tsévié, Kévé, Notsé, Badou, Guérin-Kouka, Gando et Mô.

Voilà qui doit remettre en cause les prévisions de Faure Gnassingbé, qui misait sur un essoufflement de la lutte. En effet, selon les indiscrétions, au cours de sa descente improvisée le vendredi 3 novembre dernier à Dapaong et qui l’a vu visiter certains chantiers, il aurait confié, devant un groupe de personnes reçu, que la contestation n’est juste qu’ « un vent » et que « ça passera ». Et il met les moyens (sic) pour casser la mobilisation. C’est la même stratégie utilisée depuis des lustres. Mais pas sûr que ça marche cette fois-ci, au vu de la détermination des Togolais. Il devra composer avec la détermination des populations à aller au bout de la lutte.

« Nous leur avons démontré que nous sommes vraiment fatigués. Ils comptent sur notre fatigue pour ne plus nous voir nombreux dans les rues ce mercredi. Mais oui, vous avez démontré que nous sommes vraiment fatigués d’eux, c’est pourquoi vous êtes sortis nombreux et nous penserons que nous sortirez encore plus nombreux que ça jeudi (aujourd’hui, NDLR) ». Nathaniel Olympio, qui tenait ces propos, Jean-Pierre Fabre, Tikpi Atchadam, Adjamagbo-Johnson et leurs collègues peuvent compter sur les populations pour la suite. « Nous irons à Canaan, notre Terre promise (…) », a confié religieusement une manifestante, toute confiante. C’est Faure Gnassingbé qui a du souci à se faire…

Alex Koffikan

Source : La Nouvelle N°0026 du 15 Novembre au 15 Décembre 2017

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