Dans une interview accordée à l’agence de presse Afreepress, le leader du Mouvement citoyen pour la démocratie et le développement (MCD), Me Mouhamed TCHASSONA-TRAORE s’est prononcé sur les prochaines élections législatives et régionales au Togo. Lors de cet entretien, l’acteur politique a abordé la vision de son parti dans le cadre de ces deux scrutins, la position de l’opposition togolaise et d’autres sujets relatifs à l’actualité-sociopolitique du pays.
Lisez plutôt l’intégralité de son interview !
AfreePress.tg : Bonjour Maître Mouhamed TCHASSONA-TRAORE, la CENI annonce, pour la fin du mois d’avril 2023, le début du recensement des électeurs pour le compte des prochaines élections régionales et législatives. Qu’allez-vous faire ? Allez-vous encore appeler les militants de l’opposition à se faire enrôler comme vous l’avez fait dernièrement et cela vous a couté des volées de bois verts ?
Maître Mouhamed TCHASSONA-TRAORE : Pour commencer, je profite de cette occasion pour saluer l’ensemble de la communauté nationale, qui actuellement, observe le jeûne chez les musulmans comme chez les catholiques. Ceci, pour que les retombées au niveau spirituel puissent être grandioses pour notre pays. Et que le pays puisse retrouver sa voie dans la construction d’une démocratie inclusive, sociale et économiquement viable.
Je fais le vœu également que le processus électoral dans lequel nous nous engageons puisse connaître, cette fois-ci, une organisation sans débat afin que tout le monde soit fier d’avoir participé à ce processus sans récriminations.
Revenant à la question posée, je pense que c’est normal, et c’est un devoir pour nous, de réitérer cet appel à nos concitoyens d’aller prendre la seule arme dont ils disposent pour sanctionner ceux qui gouvernent le pays. C’est une obligation républicaine. On n’a pas besoin de revenir encore sur l’importance de la carte d’électeur. Donc, nous réitérons cet appel pressant que tous les Togolais en âge de voter puissent faire ce sacrifice. Qu’ils aillent se faire enrôler. Nous savons que par endroits, il peut avoir des problèmes dans d’organisation dans les centres, aussi, il peut avoir des problèmes liés aux lenteurs des agents. Mais nos concitoyens doivent s’armer de courage et savoir que ce sont des choses qui peuvent arriver.
AfreePress.tg : Pensez-vous que l’opposition, dans son ensemble, doit faire comme vous en appelant les populations à se faire enrôler ?
Maître Mouhamed TCHASSONA-TRAORE : Sur les réseaux sociaux, des messages circulent déjà dans ce sens. Certains de mes amis de l’opposition le font, notamment le NET de Gerry Taama, l’ANC, etc. Je pense que le processus est déjà lancé et il serait insensé de remarquer qu’un citoyen ou un responsable politique soit d’une position contraire. Je garde l’espoir que les leaders de l’opposition, la société, bref tous ceux qui animent le débat politique du pays, puissent lancer cet appel à la population d’aller se faire enrôler.
AfreePress.tg : Les élections régionales et législatives approchent, comment votre formation politique se prépare-t-elle ?
Maître Mouhamed TCHASSONA-TRAORE : Nous travaillons déjà à restructurer nos bases, à mettre en place les structures fiables de notre parti et les redynamiser. Nous avons foi qu’avec tout ce que nous avons mis en place comme stratégie de mobilisation et de sensibilisation, la moisson soit bonne au soir des élections.
AfreePress.tg : Quelle est l’offre politique que le MCD présente-t-il aux Togolais dans le cadre de ces élections ?
Maître Mouhamed TCHASSONA-TRAORE : Le jeu politique aujourd’hui se focalise sur un certain nombre de thématiques importantes. Thématiques sur lesquelles chaque Togolais doit prendre position. Notre pays, qui aura bientôt 63 ans d’indépendance, doit, en réalité, dépasser certains problèmes et situations. Malheureusement, on est toujours aux prémices sur ce que devrait être la définition claire et nette des structures étatiques et privées, sur l’organisation économique de notre pays, sur ce que nous pensons de notre avenir.
Au plan fonctionnel, nous pouvons identifier un certain nombre de dysfonctionnements qui, depuis des années, retardent notre avancée sur le plan économique et social. Il y a une faible organisation de notre pays pour encourager l’installation des structures d’ordre économique et social devant permettre l’employabilité des jeunes.
Le pays doit se reprendre dans sa globalité. Il est temps de dépasser cette façon de croire que Lomé et ses banlieues sont les seuls réceptacles au niveau des demandeurs d’emploi. On sait que l’Etat ne peut pas tout faire, mais il a l’obligation de créer les conditions, de faire en sorte que les acteurs tant au niveau national qu’international puissent avoir confiance dans le Togo, pour pouvoir créer de l’emploi et donner les chances de joie, de vie et de réalisation à nos concitoyens.
Donc, ce sont des thématiques sur lesquelles nous travaillons. Notre idée, c’est de voir dans quelle mesure, il faut restructurer le pays pour qu’il puisse répondre aux besoins de nos concitoyens.
Il y a également le phénomène actuel de la vie chère avec une inflation qui ne dit pas son nom et la précarité qui se lit sur tous les visages. Cette précarité est même physique. Il est temps de faire en sorte que le Togolais puisse être épanoui.
AfreePress.tg : Que proposez-vous spécialement à la jeunesse et aux femmes ?
Maître Mouhamed TCHASSONA-TRAORE : Ce qu’il faut faire dans ce pays pour que la jeunesse trouve de répondant à ses aspirations, c’est de revoir, premièrement, le code du travail. Le code du travail doit être restructuré de telle sorte qu’il y ait une préférence nationale en termes d’emplois. On est dans un pays où on laisse beaucoup plus d’opportunités aux étrangers, ce qui devrait servir de tremplin à nos concitoyens.
Le code du travail doit être revu pour que le départ à la retraite et le remplacement puissent se faire de manière aisée. Il est aberrant qu’on trouve dans l’administration, des gens qui sont admis à la retraite et qui restent à leur poste comme s’il n’y avait pas d’autres Togolais qui pouvaient remplir valablement cette fonction.
Aussi, il faut que l’État crée des mécanismes de reconversion. Parce qu’un concitoyen formé dans une filière qui n’est pas accessible sur le marché de l’emploi, doit être capable de s’orienter dans d’autres domaines qui ne seront pas trop loin de sa formation initiale.
L’autre point, c’est de mettre en place une réflexion par rapport à l’accompagnement des jeunes sur l’entrepreneuriat. L’entrepreneuriat que nous préconisons doit avoir du contenu. On aide les jeunes à savoir quels sont les secteurs dans lesquels ils peuvent progresser. On les amène à se regrouper selon leurs centres d’intérêt et le FNFI qui, aujourd’hui, semble être la panacée pour le gouvernement, doit être réarticulé et mis à la disposition de ces jeunes. Il faut également encourager la mise en place des centres d’enseignements techniques et professionnels sur l’ensemble du territoire national.
Par rapport aux femmes, nous travaillons déjà sur le côté inclusion pour qu’elles soient davantage engagées en politique et qu’elles puissent aider à définir leur priorité. On a besoin que les femmes viennent parler d’elles-mêmes, de quoi elles ont besoin, leurs projections, etc.
AfreePress.tg : Est-ce que vous pensez aujourd’hui que les conditions sont réunies pour la tenue de bonnes élections au Togo ?
Maître Mouhamed TCHASSONA-TRAORE : Dans aucun pays au monde, surtout dans les pays en développement, on ne saurait dire que toutes les conditions sont réalisées à 100 % avant d’aller aux élections.
C’est un processus en construction et nous devons travailler pour l’améliorer à chaque fois que nous allons aux élections. Au CNAP et au CPC, nous avons fait des propositions pour aménager le code électoral… Maintenant, toute la question réside dans la capacité que ceux qui sont en charge de l’organisation de ces élections, pourront faire comme efforts dans l’implémentation de ces réformes qui ont été engagées pour que nous puissions être fiers que, pour une fois, le Togo s’est engagé dans un processus électoral inclusif et transparent.
Ceux qui sont à la CENI sont appelés à travailler pour le Togo et non pour leur chapelle partisane. Nous sommes déçus que dans le choix des membres de la CENI et de ses démembrements, même nos amis de l’opposition extra-parlementaire n’ont pas voulu jouer le jeu des nouvelles montures que la loi prévoit. Aujourd’hui, nous ne parlons pas d’opposition parlementaire, mais de l’opposition extra-parlementaire. Les places qui reviennent à ces partis désignés à la CENI devraient être composées avec l’ensemble des partis extra-parlementaires. Mais nous sommes déçus de constater que ADDI comme l’ANC aient choisi de se comporter comme s’ils avaient réussi à un concours en excluant les autres. Nous déplorons cela, mais nous faisons le vœu qu’ils instruisent leurs délégués dans ces démembrements de la CENI à travailler pour l’ensemble de l’opposition et la communauté nationale, ceci, dans l’intérêt supérieur de la nation.
Nous sommes prêts à aller à ces élections. Et rappelons qu’une élection met en exergue trois choses fondamentales.
Premièrement, une élection, c’est une foire à idées lors de laquelle le peuple et sa classe politique ont rendez-vous. C’est le moment où les gens proposent leurs projets de société au peuple pour qu’il puisse choisir.
Deuxièmement, une élection permet de jauger la conscience du peuple, sa liberté de choisir, de sanctionner et de proposer.
Le troisième élément repose sur les mécanismes d’organisation. Donc, on n’a jamais eu des garanties à 100 % pour aller à une élection, mais nous faisons le vœu que chaque rendez-vous électoral puisse être des occasions d’amélioration du cadre électoral. Et nous sommes conscients et optimistes qu’on avance.
AfreePress.tg : Vous voulez dire que le CNAP a travaillé pour améliorer le cadre électoral actuel et que tout est bon ?
Maître Mouhamed TCHASSONA-TRAORE : Bien sûr. Au CNAP, il y a plusieurs dispositions du code électoral qui ont été revues et modifiées sur la demande de la classe politique de l’opposition. Maintenant, le problème restant, c’est au niveau de la mise en œuvre. C’est pourquoi nous appelons à la conscience de nos amis qui sont à la charge de l’organisation de ces scrutins au niveau de la CENI et de ses démembrements.
AfreePress.tg : Un mot de fin…?
Maître Mouhamed TCHASSONA-TRAORE : Mon mot de fin, c’est d’encourager les Togolais à garder la flamme de l’espoir. Nous savons que beaucoup sont découragés, il y a en a, qui disent que les élections n’ont pas de sens et qu’il faut encore les boycotter. Mais nous sommes déjà conscients de ce que nous avions déjà perdu avec les différents boycotts qu’on a connus dans le pays depuis 1993 à ce jour. Il est temps qu’on aille aux élections. Le boycott a toujours profité à ceux qui gouvernent le pays. Nous faisons le vœu que tous les Togolais apprêtent leur carte d’électeur pour qu’au moment venu, ils puissent se prononcer. Il n’est plus question du jeu de la chaise vide. Les choses vont s’améliorer pour que le Togo puisse aller de l’avant.
Interview réalisée par Olivier A. et Anika A.
Source : icilome.com