Les rues ont encore grouillé de monde hier, pour le compte du second jour du 3e round des manifestations organisées par la coalition de l’opposition. Comme attendu, la mobilisation était encore au rendez-vous, pour réclamer le retour à la Constitution de 1992, le vote de la diaspora…le départ du pouvoir de Faure Gnassingbé. Au RPT/UNIR, c’est la panique totale. A défaut de pouvoir tenir encore des contremarches, la réponse se résume à chanter LA PAIX, comme depuis le début des manifestations populaires drôlement conçues comme une menace à la paix. Si seulement les comportements du pouvoir pouvaient suivre cette vertu chantée dans les rangs des ennemis du peuple !
La paix, la chanson du pouvoir
C’est le mot le plus prononcé, mieux, le plus chanté au RPT/UNIR depuis bientôt deux mois, notamment depuis la manifestation déclic du Parti national panafricain (PNP) le 19 août dernier. Et pour cause, elle est conçue comme une menace à la paix, et peut-être une déclaration de guerre au régime en place, et Tikpi Atchadam et ses militants peints comme des gens qui veulent remettre en cause la paix « si chèrement acquise » au Togo. De même que toutes celles organisées par la coalition de l’opposition qui s’est formée par la suite. Et en face, on répond en chantant la paix dans toutes les initiatives prises.
Marche pour la paix, c’est avec ça que le RPT/UNIR a inauguré sa série de contremanifestations le 29 août 2017, et qui a vu déambuler dans les rues de Lomé les marcheurs recrutés contre des billets de 5000, 2000 ou 1000 F et conviés à Lomé de l’intérieur du pays. Rebelote quelques jours plus tard.
Concert pour la paix, c’est la seconde initiative. Il s’agit d’un concert gratuit organisé le 1er septembre et auquel était conviée la jeunesse. « Touche pas à ma paix » était le message fondamental sur les tee-shirts et les banderoles.
Parallèlement, loin des yeux et des regards indiscrets, des séances de prières sont organisées pour implorer la bénédiction du Tout-puissant sur le Prince afin qu’il sorte de cette mauvaise passe ; des conférences de presse et autres activités sont tenues par les petites associations supporting clubs de Faure Gnassingbé.
La der des ders, ce sont les meetings pour la paix dont le dernier en date s’est tenu le mercredi 4 octobre, à défaut pour le régime de pouvoir organiser encore des marches, parce que la plupart de ses marcheurs recrutés sont des élèves appâtés à coup de 2000 ou 1000 F et ils ne sont plus disponibles à cause de la rentrée. La TV UNIR, que dis-je, la TVT a fait une sorte de vox populi, promené le micro dans la masse des pseudos militants et tout ce que l’on a entendu, c’était la paix. Des organisateurs au commun des jeunes désœuvrés convoyés sur le terrain de Forever et qui ont tous laissé entendre s’être transportés spontanément sur les lieux, tous n’ont chanté que la paix.
« La paix dans tous ses états », ainsi titrerait Julien Lepers, l’ex-animateur du jeu « Question pour un champion » sur TV5, dans la rubrique « le quatre à la suite », pour qualifier cette obsession du parti au pouvoir.
Des actes aux antipodes de la paix
La paix, ce n’est pas un mot, c’est un comportement. Ces propos chers à l’ancien président ivoirien Félix Houphouët-Boigny sont encore d’actualité. Implorer ou chanter la paix recommande de se comporter et s’investir pour son avènement. Et cela devrait se remarquer dans les actes posés, lesquels doivent prêcher cette vertu chère à tous. Mais les comportements de Faure Gnassingbé, de son parti, de la minorité pilleuse et de sa soldatesque professent plutôt la guerre ; du moins sont à des années-lumière de la paix criée.
Accéder aux revendications du peuple, c’est la seule action qui vaille à Faure Gnassingbé pour arracher cette paix et éviter toute la coulée d’adrénaline actuelle. Justement le peuple veut le retour à la Constitution de 1992, le vote de la diaspora, les réformes électorales. Mais il a fermé les yeux sur ces aspirations légitimes des populations et les députés RPT/UNIR se sont permis de voter un projet de loi de révision constitutionnelle permettant à leur champion de rempiler, au mépris des aspirations légitimes du peuple. Les amendements faits par l’opposition – 48 au total – et qui devraient y répondre ont été rejetés.
La paix, c’est la non violence. Mais ceux qui la chantent à tue-tête n’ont que la force brute comme mode d’emploi. Le Prince et le RPT/UNIR n’hésitent pas à envoyer aux trousses des manifestants aux mains nues, la soldatesque qui réprime sans ménagement. On en est déjà à sept (07) morts depuis le début des manifestations populaires, sans compter les blessés. Les fameux pacifistes vont jusqu’à tirer sur des enfants, bastonner des femmes pour le simple fait qu’elles ne se soient pas mariées. Même les animaux ne sont pas épargnés…C’est la terreur qui est réservée aux populations du nord, notamment à Mango, avec des militaires à la besogne, et plusieurs habitants sont obligés de fuir et se réfugier au Ghana voisin.
La paix, c’est ce que veulent les églises catholique, presbytérienne et méthodiste, qui ont brisé le silence et montré la voie à suivre : répondre aux aspirations du peuple, opter pour le dialogue. Le clergé catholique est même prêt à assurer la médiation entre la classe politique. C’est ce que recommandent aussi les ambassadeurs occidentaux accrédités dans notre pays et le Secrétaire Général des Nations Unies, Antonio Guterres. Mais Faure Gnassingbé et le RPT/UNIR sont restés opaques à cette issue et veulent organiser un référendum, dans ce climat de tensions extrêmes. Il va sans dire que l’issue s’annonce heurtée.
Il faut le dire, la tension monte dangereusement. Mais pendant que le Prince et le RPT/UNIR crient et chante la paix, ils se comportent en belliqueux, poussant le peuple à recourir aux solutions extrêmes.
Tino Kossi
Source : Liberté
27Avril.com