Togo, Insalubrité à Lomé : L’ANASAP, une aiguille perdue dans les Ordures

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Togo, Insalubrité à Lomé : L’ANASAP, une aiguille perdue dans les Ordures

Face à l’agonie constatée du service de la Voirie depuis des décennies, le Chef de l’Etat a choisi de mettre en place depuis 2013, une agence investie de la mission d’assainissement et de la salubrité publique dans les villes du Togo dénommée Agence Nationale d’assainissement et de salubrité (ANASAP). Malgré les tractations de certains pontes pour étouffer la mise en scelle de cette agence, l’ANASAP s’est lancée sur le terrain en 2015 et s’est vu dotée à ses fins de moyens à la fois matériels et humains non négligeables. Mais après cinq ans d’activité de l’ANASAP, le constat mérite commentaires !

Les causes du mal

Les causes de l’insalubrité de la ville de Lomé sont multiples. D’ailleurs depuis pratiquement une décennie que ce mal pernicieux ronge la ville, personne n’a pu établir clairement un diagnostic fiable. Et pourtant, l’une des raisons est évidente et tombe sous le coup des sens : Lomé est sale et insalubre parce que les ordures ne sont pas correctement ou pas du tout ramassées.

Le système de gestion des ordures solides ménagères est un ensemble d’opérations qui va de la pré-collecte, à la collecte et à leur traitement, voire à leur transformation. La gestion des déchets solides urbains dans la commune de Lomé était du ressort de la mairie qui assurait ce service en régie. Plus tard, le ramassage des déchets solides urbains a été confié par la mairie à une société privée, la Société Togolaise d’Enlèvement des Ordures Ménagères et d’Assainissement (SOTOEMA). Elle faisait la collecte porte à porte, par des camions bennes. Elle utilisait aussi, pour la desserte de certains quartiers, des bacs à ordures dans lesquels les ménages allaient déposer eux-mêmes leurs ordures. Mais malheureusement, plusieurs raisons ont conduit progressivement la SOTOEMA à une dégradation de la qualité des prestations et puis, à la rupture du contrat. Dès lors, se sont développés, à travers la capitale, divers systèmes de collecte privés des déchets solides urbains, dont notamment, le ramassage porte à porte. Mais problème, ces sociétés privées ne font pas mieux.

Entre la guerre de certaines personnes pour le contrôle du business des ordures et de la saleté d’une part et d’autre part, le manque de moyens et de compétence des entreprises commises à la tâche, il est difficile de trouver la vraie raison du non ramassage des ordures. Même lorsque cela est fait, une partie des ordures ramassées se retrouve lors de leur transport sur la voie publique, pour cause de matériel non adapté à la tâche.

Le secteur est tellement désorganisé que les Loméens ne savent pas comment se débarrasser correctement de leurs ordures. Des quartiers entiers ne disposent pas de bennes à ordures ni même de poubelles. Les ménages n’ayant pas toujours les moyens de payer ces particuliers ou pré-collecteurs d’ordures, leurs ordures leur restent sous les bras et se retrouvent nuitamment (pour les moins courageux et les plus scrupuleux) sur le trottoir ou dans le caniveau ou encore sur la première aire libre rencontrée.

Ces derniers mois, certaines sociétés qui œuvrent dans la fabrication du biogaz passent dans certains quartiers avec les bennes à ordures pour recueillir les déchets. La façon dont les populations se précipitent à l’arrivée des collecteurs témoigne de la forte demande.

Pour réguler tant soit peu le problème, le gouvernement a créé en 2013, l’Agence nationale d’assainissement et de salubrité. Cinq ans après, l’ANASAP s’est agitée mais elle peine « à prendre le taureau par les cornes ».

L’ANASAP, une aiguille perdue dans les ordures

L’ANASAP est un organisme d’appui-conseil et d’aide à la prise de décision dans le domaine de la salubrité. Elle vise à instaurer et maintenir un cadre de vie de meilleure qualité favorable au bien-être et à l’épanouissement des populations sur toute l’étendue du territoire national en assurant une veille permanente des normes et actions en matière d’assainissement et de salubrité publique. Elle promeut, assure et veille à la concertation, à la coordination et au contrôle de toutes les actions et interventions en matière d’assainissement et de salubrité publique. Mais face à la taille du chantier, il faut déduire que la conception de l’agence a été expéditive sinon improvisée. La preuve le même Etat qui a mis en place l’Anasap ouvert le marché depuis quelques mois à des privés.

L’expression tangible que l’Agence nationale se révèle trop petite devant la réalité du travail. En effet, un tour dans la capitale montre que nombres de rues sont jonchées de détritus qui indisposent tellement les usagers, des caniveaux quoique récemment construits sont remplis d’ordures, des eaux usagées stagnantes en pleine agglomération. Le comble, c’est qu’aux abords de ces caniveaux (si l’on peut encore les appeler ainsi), il y a des commerces. On y vend de la nourriture.

Plusieurs fois les citadins ont vu les agents de l’Agence se pencher sur l’assainissement des trois lagunes de la capitale et leurs abords, mais aujourd’hui le décor semble n’avoir jamais été touché.

Face aux difficultés, l’ANASAP a adopté un plan stratégique 2018-2022. Le document qui a été validé, en janvier dernier, constitue le principal outil de planification des actions de l’Agence sur les prochaines années dans la dynamique de recherche continue de solutions appropriées à la problématique de l’amélioration du cadre de vie. Selon les sources, son exécution coutera plus de 90 milliards de FCFA. Une lueur d’espoir ? Peut-être.

Pour l’instant l’ANASAP, ressemble à une aiguille perdue dans les tas d’ordures. Son action se limite, au balayage de certaines rues, à l’assainissement d’une partie de la lagune et ainsi qu’à l’entretien de certains lieux publics. Encore surprenant, la plupart des lieux publics reste aussi sale comme avant sa création. En ce mois d’octobre où les services météorologiques annonces de fortes précipitations, les services de l’ANASAP semblent perplexes face à la situation. Les Loméens doivent continuer de s’occuper d’eux-mêmes en attendant.

Koffi Miboussomékpo

Source : Fraternité No.289 du 17 octobre 2018

27Avril.com