« Faites-vous les choses dans l’optique de recevoir une reconnaissance de l’extérieur, ou faites-vous les choses par passion pour vous ? » (Nicolas Robert)
Les 49 militaires ivoiriens arrêtés à Bamako dont une grande partie issue des forces spéciales, vont être libérés. Cette affaire d’Etat a empoisonné pendant plusieurs semaines les relations entre Bamako et Abidjan. Les autorités de la transition au Mali ayant accusé la Côte d’Ivoire de « tentative de déstabilisation par un pays tiers ».
En attendant, trois femmes du contingent ont été élargies samedi 03 septembre à titre humanitaire. Du côté togolais, on n’a pas hésité à pousser un cri d’orfraie de la victoire diplomatique de Faure Gnassingbé. Le ministre togolais des affaires étrangères a tenu d’ailleurs à préciser dans un communiqué que c’est sous la « médiation togolaise » que les trois soldats ont recouvré la liberté et réaffirme la « disponibilité ainsi que la détermination » de Faure Gnassingbé à « poursuivre les pourparlers avec les deux parties aux fins de la libération des autres soldats ».
C’est tout à l’honneur du régime togolais de reconnaître qu’il y a d’autres personnalités et organisations qui sont impliquées dans le dénouement heureux de cette crise diplomatique. Le président algérien Abdelmadjid Tebboune joue un rôle prépondérant dans la médiation. De même que ses homologues du Sénégal, et président en exercice de l’Union Africaine, Macky Sall et du Burkina Faso, Paul-Henri Damiba.
Il est beau de voir Faure Gnassingbé s’activer inlassablement pour la libération des soldats ivoiriens. Il serait encore mieux vu dans son propre pays, s’il fait diligence pour faire libérer les détenus politiques qui croupissent dans les geôles de la dictature depuis plusieurs mois. Depuis la grave crise sociopolitique de 2017-2018 qui avait ébranlé le régime de Faure Gnassingbé, une vague de répression s’est déchainée contre les responsables et militants de l’opposition. Faite d’arrestations et de détentions arbitraires de militants de droits humains, d’opposants politiques, de traitements inhumains, cruels et dégradants, de décès en détention, etc.
A ce jour, plusieurs dizaines de militants et responsables politiques sont maintenues en prison dans des conditions épouvantables. Notamment des personnes arrêtées lors des manifestations de novembre et décembre 2018, celles emprisonnées dans la sombre affaire de « Tiger Révolution », celles de l’affaire Aziz Goma et ses codétenus, des militants du Parti National Panafricain (PNP) kidnappés, des membres de la diaspora enlevés… Ils sont plus d’une centaine d’innocents politiques à moisir en prison.
Le régime de Faure Gnassingbé qui a toujours montré son vrai visage répressif et de terreur, est resté indifférent aux supplices des innocents politiques, pendant qu’il se réjouit d’avoir facilité la libération des soldats ivoiriens.
« Comment pouvez-vous vous réjouir de faire libérer des mercenaires, tout en gardant dans vos cellules, des Togolaises et des Togolais innocents? Comment pouvez-vous vous réjouir d’oeuvrer pour la paix entre le Mali et la Côte d’Ivoire – ce qui est bien-, alors que vous faites encore et toujours la guerre à votre propre peuple, le peuple africain du Togo? Acceptez de subir une épreuve du Miroir et regardez en face ce que vous avez fait de votre propre ressemblance! Seriez-vous vous-mêmes vos pires ennemis? » s’interroge l’écrivain et professeur de philosophie Franklin Nyamsi.
Ces questions légitimes, les Togolais se les posent aussi. Sincèrement, quel mérite y a-t-il à œuvrer pour la libération des soldats ivoiriens quand on maintient ses propres frères en prison ?
Médard Ametepe
Source : Liberté / libertetogo.info
Source : 27Avril.com