Depuis leur interdiction il y a vingt ans, les mutilations génitales féminines ont fortement reculé. Au point que le plus petit pays francophone ouest-africain fait figure de modèle sur le continent.
Comme chaque jour à Tchamba, dans le centre du pays, Aïchatou rend visite à sa mère, Abiba. Assises devant la ferme familiale, les deux femmes conversent de leur quotidien. Celui d’Aïchatou est difficile, pénible. Mal dans son corps, mal dans sa vie depuis l’âge de 15 ans, elle souffre des conséquences de l’excision réalisée par sa propre mère, ancienne praticienne « repentie ».
« Pour mes deux premiers enfants, j’ai énormément souffert, j’ai dû accoucher par césarienne. Et comme j’ai mal et que je ne ressens aucun plaisir durant l’acte, mon mari est devenu polygame », explique-t-elle d’une voix timide. Abiba ne manifeste aucune empathie pour sa fille : « C’était la tradition, c’était comme ça. Si tu as mal, va à la pharmacie, ou demande des plantes au voisin », lance-t-elle d’un ton sévère.
Jusqu’à cinq ans de prison
Elle n’a qu’un seul regret : « J’étais exciseuse par héritage, mais je n’ai pas pu transmettre cette tradition à ma fille. » Aïchatou, regard sombre, assure que, s’il ne s’agissait pas de sa mère, elle l’aurait « traînée en justice ». À 25 ans, elle est certainement l’une des dernières de sa génération à avoir été excisée. « Les femmes de mon âge ne connaissent plus ça », observe-t-elle.
Quand la fille mourait, on attribuait ça à son destin, pas à l’excision
Au Togo, la loi du 17 novembre 1998 interdit en effet « toutes les formes de mutilations génitales féminines » avec une peine pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et une amende de 1 million de F CFA (1 500 euros). Il a ensuite fallu attendre quatorze ans pour que ne soit célébrée la déclaration d’abandon de cette tradition, le 29 novembre 2012.
Jeune Afrique