Vendredi à l’occasion d’une rencontre entre acteurs issus des ministères sectoriels et partenaires de la société civile et du secteur privé impliqués dans sa mise en œuvre, la Politique nationale de développement à la base (PNDB) a rendu ses premiers résultats, 7 ans après son lancement. Des résultats qui satisfont le département ministériel en charge du projet. Mais en dessous des chiffres flatteurs, se cache une triste réalité.
Adoptée en 2012, la Politique nationale de développement à la base a pour mission, la lutte contre la pauvreté. Par conséquent, une amélioration des conditions des vies des populations à la base. Après sept ans de mise en œuvre, le Ministère de développement à la base s’est finalement décidé à présenter le bilan. De ce bilan, il ressort que des avancées ont été obtenues dans chacune des 4 composantes du PNDB. En effet, selon les résultats présentés, plus de 300 unités de transformations de produits agricoles ont été installés, de plus de 1.300 microprojets ont été réalisés, pendant que la pndb a permis de restructurer et renforcer plus de 5 530 comités de développement à la base.
De même, plus de 2 600 infrastructures socio-communautaires de base (salles de classes, unités de soins périphériques, marchés, forages…) ont été réalisées, dans le cadre de la promotion des infrastructures de base.
En ce qui concerne le segment des filets sociaux, 30 000 femmes ont bénéficié de transferts monétaires. Mieux, 27 000 emplois temporaires ont été créés à travers les travaux de haute intensité. Selon la ministre chargée du développement à la base, « le pays a enregistré des résultats élogieux, puisque nous avons près de 100.000 élèves qui bénéficient d’un repas scolaire chaud, environ 30.000 ménages qui reçoivent une bourse pour subvenir aux besoins des enfants en matière de nutrition etc… ».
« Ce sont des actions qui sont reconnues très importantes dans notre pays et qui vont être portées à échelle, car telle est la volonté du chef de l’État. Voilà un peu, ce que ressort le bilan de parcourt de notre politique qui donne des résultats satisfaisants », a déclaré Victoire Tomégah-Dogbé. Pour arriver à ces résultats, plus de 92 milliards de F CFA ont été mobilisés entre 2012 et 2017.
La triste réalité…
Dans plusieurs localités du pays, il n’y a ni infrastructures sanitaires, ni sources de revenus, encore moins l’eau potable. Au Togo, presque la moitié de la population n’ont pas accés à l’eau potable. Selon l’Unicef, 39% de la population n’a pas accès à une source d’eau potable améliorée. 57% de la population rurale n’utilise pas de source d’eau d’approvisionnement améliorée comparée.
Dans certains villages, l’agriculture, la principale activité ne sert qu’à survivre. « Les gens n’entrent pas ici. Pour vendre nos vivres, il faut les transporter jusqu’à Vogan. Depuis quelques temps, les récoltes ne sont plus bonnes. Donc, on ne vend plus beaucoup, on préfère garder pour notre propre consommation. C’est comme ça qu’on vit maintenant », raconte un habitant du village d’Adjorogou (préfecture de Vo), joint au téléphone par notre rédaction. Selon les chiffres disponibles, l’incidence de la pauvreté est très élevée en milieu rural où trois ménages sur quatre sont pauvres. Comme Adjorogou, il existe des milliers de villages au Togo où les populations manquent de tout.
La région des Plateaux, en particulier la préfecture de Danyi est l’autre symbole de la précarité à la base. Dans cette préfecture, école, structures sanitaires, l’eau potable et route…tout manque. Plusieurs localités de cette préfecture qui fournit Lomé en produits viviers végètent dans la précarité.
Non loin de là, c’est le canton de Kuma, toujours dans la préfecture de Kloto qui fait face à une pénurie criarde d’infrastructures socio-collectives.
En outre, dans la région septentrionale du pays notamment à Dapaong, la précarité est la chose la mieux partagée. Dans cette région, l’incidence à la pauvreté avoisine les 80%. Dans certains cantons, les hommes et les animaux s’abreuvent à la même source. Dans le cas contraire, fautes de points d’eau les populations doivent parcourir plusieurs kilomètres pour trouver de l’eau. Ces populations sont souvent exposées aux maladies d’origine hydrique.
Malheureusement, ces réalités se retrouvent également dans certains quartiers périphériques de la capitale. Attiégou, Adidogomé, Ségbé, Djagblé, Apédokoè, Amadahomé sont entre autres les nouveaux quartiers qui s’incrustent autour de la capitale. Le développement que connaissent ces quartiers n’est pas suivi par les services socio-économiques de base. Tous ces quartiers ont des traits en commun : route, eau potable, structures médico-sociales, tout manque cruellement, à part les projets d’électricité qu’on voit déployés depuis quelques mois. La carence d’infrastructures s’invite également dans certains quartiers de l’ancienne ville.
Pourtant, le gouvernement dit faire de la lutte contre la précarité son cheval de bataille.
Au-delà de la PNDB
Dans le cadre de la lutte contre la pauvreté, le gouvernement togolais a mis en place plusieurs stratégies ayant deux objectifs principaux. D’une part, elles visent de façon explicite l’inclusion sociale en mobilisant des ressources de l’économie sociale et solidaire. D’autre part, il s’est développé une approche orientée vers la création d’entreprises, voire vers l’entrepreneuriat. Progressivement, se sont mises en œuvre d’autres stratégies qui, tout en étant centrées sur l’entreprise, sont attentives au social et aux liens avec la collectivité. En effet, entre 2007 et 2012, le Togo a élaboré 3 stratégies de réduction de la pauvreté dont la dernière est la Stratégie de Croissance Accéléré et de Promotion de l’Emploi (SCAPE 2013-2017). Elle comprend 5 axes majeurs, le développement des secteurs à fort potentiel de croissance, le renforcement des infrastructures économiques, le développement du capital humain, la promotion de l’emploi, le renforcement de la gouvernance et la création de conditions favorables pour un développement participatif, équilibré et durable. La stratégie de croissance accélérée est également un canevas de développement qui devrait permettre au Togo de réaliser un essor économique considérable et ce, dans tous les secteurs d’activités.
L’autre grand projet qui s’est donné pour objectif de réduire la pauvreté au Togo est le Fonds National de la Finance Inclusive (FNFI) inclus dans l’économie sociale et solidaire. Lancé en 2014, le Fnfi vise à rendre accessibles les services financiers aux plus pauvres, par l’entremise des banques et des Institutions de microfinance. Au FNFI, d’autres composants se sont incrustés pour toucher d’autres secteurs spécifiques.
Le dernier grand projet en date est le Plan national de développement (2018-2022). En résumé, un condensé des grands projets aux résultats mitigés de ces 10 dernières années. En effet, à l’exception du PND (dont on ne peut pas analyser les résultats à cette étape) bien que certains économistes de renommé doutent, tous les projets mis en œuvre au Togo connaissent pratiquement le même sort.
Au regard de ce qui précède, les résultats de la politique nationale de développement à la base semblent anecdotiques. Pour véritablement impacter la vie des populations à base, le gouvernement doit sortir du cercle vicieux des mesures d’urgences pour élaborer des projets pérennes . Pour y arriver, il y a encore du chemin à faire.
Source : Fraternité
27Avril.com