Quelle relation y-a-t-il entre la campagne de vaccination anti Covid-19 du gouvernement togolais et la pièce de théâtre « Nicodème » de Pierre Corneille ? Réponse dans cette chronique de David Kpelly. Lecture!
Peut-on voir un orgueil à votre orgueil égal ?
Ma chronique d’aujourd’hui, et je n’ai le moindre doute que beaucoup l’ont déjà deviné, portera sur la vaccination contre la Covid 19 au Togo. De quoi aurais-je pu parler d’autre en ces jours ?
Plus un soleil ne se lève, depuis deux ou trois semaines maintenant, sans que ne sorte, dans une administration publique ou privée, une note pour exiger ce vaccin aux employés et conditionner les services à la présentation d’un carnet de vaccination anti Covid 19.
Des ministères à la Société Togolaise des Eaux, en passant par l’Université, les notes ont fusé de partout. Si certaines ont adopté un ton plutôt doucereux voire sympathique, d’autres, au contraire, se sont tellement montrés va-t-en-guerre qu’en les lisant on se demande si elles n’ont pas été tirées de quelque passage du Livre de l’Exode. Comme par exemple celle de la police nationale qui s’articule ainsi : « Nul ne peut avoir accès aux unités de la Police nationale soit pour le dépôt du dossier d’établissement de la Carte Nationale d’Identité, soit pour la légalisation ou autres, s’il ne présente la preuve de vaccination contre la Covid 19. »
J’entends déjà des voix qui s’excitent pour me demander si je suis pour ou contre le vaccin anti Covid 19 au Togo. Parce que dans cette affaire, c’est pile ou face : soit on est pro-vaccin soit on est anti-vaccin. Pas de position centriste possible.
Eh bien, pour rapidement répondre à cette question, je vais relater une histoire qui a enflammé la toile togolaise ces derniers jours. Un parlementaire a porté plainte contre un citoyen suite à son retrait d’un groupe Whatsapp.
L’histoire du député qui porte plainte contre un citoyen
Le parlementaire, selon sa plainte dont une copie a circulé sur les réseaux sociaux, reproche à l’accusé de l’avoir retiré d’un groupe Whatsapp et traité d’escroc quand il a essayé de comprendre les raisons de son retrait. Il demande donc au procureur de faire appliquer la loi dans toute sa rigueur contre cet hérétique qui a osé le sortir du groupe.
Quelle est donc la relation entre le vaccin anti Covid 19 au Togo et ce fait divers pas même digne d’alimenter les causeries d’un cabaret de quartier secondaire ?
Eh bien, la relation est simple : le grand éclat de rire qu’on laisse s’échapper en lisant l’affaire du parlementaire et du groupe Whatsapp est le même quand on voit comment le Togo gère cette affaire de vaccination.
Depuis décembre 2019 que la pandémie au coronavirus a étalé son lugubre voile sur la terre des hommes, les pays les plus avancés sur le plan scientifique et technologique, les pays dignes de ce nom donc, se sont mis à réfléchir sur un vaccin pour sauver leurs populations du mal.
Le Togo, comme presque tous les pays d’Afrique subsaharienne où rien de significatif ne se fait dans aucun domaine, où à chaque fois qu’un mal frappe la terre on s’assoit, les mains entre les cuisses, pour attendre une solution de l’Occident, le Togo donc, a attendu, comptant les nuages dans la voûte céleste, pendant ces longs mois où ailleurs, dans les laboratoires, on s’activait.
« Qu’auriez-vous fait si d’autres n’avaient pas découvert ce vaccin ? »
Mais voilà notre pays qui devient le plus zélé et le plus agressif au monde dans l’inoculation d’un vaccin dont il n’a participé en rien à l’élaboration, dont il ne connaît rien de la composition, dont il n’a testé l’efficacité en aucune circonstance. Et tout ceci au moment où, même dans les pays où ces vaccins ont été fabriqués, on laisse la parole aux intellectuels, médecins, philosophes, juristes, pour donner des avis, au moins des avis, sur la vaccination.
On a même entendu notre Première ministre, devant les parlementaires (dont celui qui a porté plainte parce qu’on l’a retiré d’un groupe Whatsapp puis traité d’escroc), arguer qu’il faille faire peur aux populations togolaises pour les vacciner.
Imaginons le grand éclat de rire qu’aurait suscité cette scène où un génie ( qui ne craindrait donc point un emprisonnement à vie pour son audace) se présenterait devant notre Première ministre, au moment où elle demandait qu’on use de la peur pour vacciner les Togolais, pour lui poser la question suivante : « Qu’auriez-vous fait pour protéger votre population si d’autres n’avaient pas découvert ce vaccin ? »
La Première ministre, confuse, n’aurait, bien sûr, pas répondu. Mais le génie, connaissant la réponse à sa propre question, aurait répliqué : « Vous auriez continué à bayer aux corneilles. » Et sûrement que cette expression antique lui eût rappelé ce vers de Pierre Corneille dans la pièce « Nicodème » : « Peut-on voir un orgueil à votre orgueil égal ? »
Source: Amaniainfo
Source : icilome.com