Togo : Au nom du père, du fils et de… Mey Gnassingbé

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« La monarchie est un déficit démocratique que nous subissons par héritage » (Mario Scolas)

La famille Gnassingbé tient fermement la barre de contrôle du Togo depuis 55 ans. Avec le 5ème et dernier mandat théorique de Faure Gnassingbé en 2025, la famille aura régné 63 ans sans partage sur le Togo. Mais si on n’y prend garde, ce règne au long cours pourra se prolonger indéfiniment. Après le père et le fils, il se pourrait qu’un autre fils, Mey Gnassingbé prenne la gouvernance du Togo. Cette théorie, a priori farfelue, ferait son chemin dans le serail au point qu’un média panafricain, « le journal de l’Afrique » l’a reprise dans son édition du 16 février 2022.

« Mey, le plan B de Faure ? » Telle est l’interrogation du journal qui écrit : « Alors que la pression s’intensifie sur les chefs d’Etat des pays de la Cedeao, notamment à cause des renversements de présidents « à vie », qui aménagent les Constitutions à leur guise, Faure Gnassingbé, au pouvoir depuis 16 ans, doit aujourd’hui penser à l’avenir (…) Il est aussi très proche de l’armée, qui l’avait mis au pouvoir en 2005. Ce qui dissipe, dans une certaine mesure, les craintes d’un coup d’Etat potentiel au Togo. Néanmoins, dans le cas où Faure Gnassingbé devait quitter le pouvoir un jour, il cherche à placer un ou plusieurs potentiels successeurs. Là où Mey Gnassingbé intervient, c’est qu’il a grandement participé au plébiscite de son demi-frère dans leur fief de Kara ».

Le journal poursuit : « Là-bas, Faure Gnassingbé jouit d’une popularité réelle. Mey, lui, entretient une « politique de proximité » avec les populations, notamment grâce au football et à une multitude d’œuvres philanthropiques. Dans le même temps, Mey Gnassingbé reste loin des radars de la presse internationale, surtout lorsqu’il s’agit d’accusations de corruption ou de détournements de fonds. Un dauphin fabriqué intelligemment, donc, que certains observateurs verraient bien être propulsé au pouvoir à l’horizon 2034. Une date encore très lointaine, mais avec les nombreux coups d’Etat en Afrique de l’Ouest, on n’est jamais trop prudent ». Est-ce un ballon d’essai pour tâter le pouls des Togolais ou un véritable projet bien mûri au serail pour préparer les esprits à accepter cette nouvelle dévolution monarchique du pouvoir? Rien n’est impossible dans ce Togo. Surtout avec une armée dévouée corps et âme à la famille Gnassingbé et prête à tout pour garder le pouvoir dans le giron familial. Et une complaisance inexplicable de certaines puissances étrangères qui adoubent la dictature presque soixantenaire.

Comme par hasard, subtilement, le journal glisse un prénom Ewé du sud dans « Meyebine-esso Kwamé Gnassingbé », le potentiel successeur ou dauphin annoncé de Faure Gnassingbé, pour servir de pont entre le nord et le sud comme on l’avait fait pour le frère président en 2005. L’idée que l’autre fils du père prenne le pouvoir est justifiée par le journal par le fait que les opposants ne s’entendent pas. Une intoxication savamment distillée dans l’opinion par le régime. Comme le disait Steve Biko, «l’arme la plus puissante de l’oppresseur est la manipulation de l’esprit de l’opprimé ». Il nous revient qu’un ministre très proche de Faure Gnassingbé nous a servi, l’air grave, le même disque, nous jurant par tous les saints que « vos frères opposants ne prendront jamais le pouvoir dans ce pays ».

Comment peut-on exiger des leaders d’une centaine de formations politiques de s’entendre parfaitement ? On ne peut demander l’impossible à Dieu. Le pouvoir ou la souveraineté appartient au peuple qui se choisit librement ses dirigeants. Si le peuple porte son choix sur un opposant, comment peut-on lui dénier ce droit sous le fallacieux prétexte que l’opposition n’est pas unie, et tripatouiller les résultats issus des urnes ? Un ancien ministre a affirmé que le régime qui régente le pays depuis bientôt 60 ans représente à peine 10% de l’électorat. En clair, le père et le fils n’ont jamais gagné une élection dans les règles de l’art. Ils se sont toujours imposés par la force brute, la violence, la corruption, la fraude, la ruse, etc. Il en sera ainsi pour l’autre fils si on venait à l’imposer lui aussi, comme gouverneur du Togo…

Médard Amétépé

Source : Liberté / libertetogo.info

Source : 27Avril.com