Togo / Arrestations d’adversaires politiques en pleine période de l’EPU : La difficile métamorphose d’un régime autoritaire

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Le Togo enregistre de nouveaux prisonniers politiques. Cette situation qui intervient en pleine période du passage du Togo à l’Examen périodique universel (EPU) dénote de l’enracinement des pratiques anti-démocratiques et de la culture de la violation des droits de l’homme dans le pays.

« Dans la nuit du jeudi 27 au vendredi 28 janvier 2022, monsieur Sébabé-Guéffé Tchassanti Nouridine, Trésorier-adjoint du Parti national panafricain (PNP), monsieur Alfa Ibrahim, Togolais résidant à Hambourg en Allemagne en séjour à Lomé, avec d’autres citoyens, ont été enlevés par des forces de sécurité et emmenés à une destination inconnue ». Cette déclaration signée du Secrétaire Général du Parti national Panafricain (PNP), Dr Kossi Sama date du vendredi 28 janvier 2022.

Pour une nième fois, le parti de Tikpi Atchadam dénonce et condamne le harcèlement soutenu d’Etat dont il est victime ainsi que ses militants et sympathisants depuis sa création. Il exige aussi la libération immédiate et sans condition de toutes les personnes enlevées, ainsi que la libération de tous les prisonniers politiques. En outre, le PNP martèle que « l’état de terreur et la privation de liberté qui se confirment chaque jour davantage au Togo, exposent un pouvoir illégal et illégitime dans une logique de violence et de vengeance permanente contre le peuple togolais, un peuple épris de paix, de justice et de liberté ».

L’arrestation d’adversaires politiques n’est pas une première au Togo. Depuis des décennies, les Togolais sont régulièrement inquiétés pour leur appartenant politique ou pour avoir exprimé des points de vue qui ne caressent pas le régime cinquantenaire des Gnassingbé dans le sens du poil. Déjà une centaine de prisonniers politiques ont été recensés par les organisations de défense des droits de l’homme. La majorité de ces détenus politiques portent des patronymes à consonance Tem, l’ethnie du président du PNP, Tikpi Atchadam.

Il faut donc comprendre à travers ces arrestations que le quota recherché par le régime pour être satisfait de son butin de prisonniers politiques n’est peut-être pas encore atteint. On peut ainsi s’attendre à d’autres rafles. Mais ce qui est hallucinant, c’est qu’à des milliers de kilomètres de Lomé se déroule un événement de taille. Depuis le 24 janvier 2022, le Togo prend part à la 40ème session de l’Examen périodique universel (EPU). Un exercice destiné à évaluer les pays en fonction de leur situation des droits de l’homme. A cette occasion, le Togo a été indexé pour différentes violations des droits de ses citoyens. Le vendredi, alors que la délégation togolaise à Genève recueille les 224 recommandations formulées par les pays examinateurs, des adversaires politiques sont encore arrêtés.

Pourtant, dès la journée du lundi 24 janvier 2022, une première série de recommandations a été formulée. Le Conseil des droits de l’homme évoquait, entre autres, la révision de la législation pour garantir le droit à la liberté d’expression et de la presse, la garanti du droit de réunion pacifique, et surtout la libération de toutes les personnes détenues pour avoir exprimé leur droit à la liberté d’expression. Sans avoir pris la peine de finir avec l’EPU, le régime relance la machine de la répression contre les adversaires politiques.

Sous d’autres cieux, ce comportement digne d’un Etat qui n’a aucune considération pour les institutions internationales aurait étonné. Mais étant au Togo, la surprise n’est pas de mise, puisque ce n’est pas la première fois que de telles actions de défiance sont posées. En septembre 2019, suite à la modification, un mois plus tôt, de la loi Bodjona portant sur les conditions de manifestations dans le pays, des rapporteurs spéciaux des Nations Unies ont saisi le gouvernement. Dans une longue lettre, ils ont fait remarquer l’incompatibilité du nouveau texte avec les instruments internationaux auxquels le Togo est partie. Plusieurs mois après, nous avons assisté à des retouches en deçà des exigences des rapporteurs spéciaux. L’interdiction systématique des manifestations est toujours d’actualité.

Ces nouvelles arrestations opérées au moment du passage du Togo à l’EPU n’augurent pas d’un lendemain radieux pour le pays. Aussi, la situation renseigne sur le sort qui sera réservé aux recommandations du Comité des droits de l’homme de l’ONU. Les signes que le régime sera réfractaire à l’application des recommandations sont évidents. D’ailleurs, sur la situation des droits de l’homme, il n’y a eu aucune amélioration au Togo depuis son dernier passage devant le Comité en 2016. Au contraire, le pays est devenu plus dangereux en termes de respect des droits humains.

G.A.

Source : Liberté / libertetogo.info

Source : 27Avril.com