Si Shinzo Abe était dirigeant africain !

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Shinzo Abe du Japon

« Il n’y a pas pire combat que de vouloir rester au sommet de l’État tout en se sachant malade comme si rester en poste est une thérapie en soi » (Abdel-Hafidh Ossoukine)

Shinzo Abe passe la main. Le Premier ministre japonais a annoncé vendredi 28 août, lors d’une conférence de presse sa décision de rendre le tablier en raison de problèmes de santé. « J’ai décidé de démissionner du poste de Premier ministre », a annoncé Shinzo Abe.

Il souffre depuis l’adolescence d’une rectocolite hémorragique, une maladie inflammatoire chronique des intestins qui s’est aggravée. « Suivre un traitement et être affaibli physiquement fait courir le risque de ne pas pouvoir prendre les décisions et d’obtenir des résultats », a expliqué le chef du gouvernement face aux médias. Shinzo Abe dont le mandat prend fin dans un an, a indiqué qu’il continuerait à remplir ses fonctions jusqu’à la nomination d’un nouveau Premier ministre.

Quitter le pouvoir pour raison de santé ? Fait est inimaginable en Afrique. Même grabataire et exhalant son dernier souffle, le dirigeant africain s’accrochera au pouvoir comme une chauve-souris. L’exemple typique nous vient du Gabon où Ali Ben Bongo Ondimba, terrassé par depuis par un accident vasculaire cérébral (AVC) dont il traîne toujours les séquelles, continue à s’arc-bouter au pouvoir.

Juste en regardant le président gabonais, on sent des signes ostentatoires de sa fébrilité intellectuelle et physique. Ali Bongo n’a pas toutes les capacités nécessaires pour diriger le Gabon. Dans un pays normal, après cette grave attaque cérébrale dont il a été victime, le dirigeant gabonais devrait s’éloigner des tracas liés aux charges présidentielles et au train-train quotidien et prendre un repos bien mérité après tant de bons et loyaux services rendus à la nation gabonaise pendant 11 ans pour se soigner convenablement aux fins de retrouver sa santé. Mais il sert de marionnette aux caciques du régime afin qu’ils puissent continuer à jouir de leurs privilèges et prébendes au sommet de l’Etat.

On a eu l’exemple également en Côte d’Ivoire où l’ancien Premier ministre Amadou Gon Coulibaly, affaibli par la maladie et faisant d’incessants allers-retours entre Abidjan et les capitales européennes pour subir des soins, est maintenu à son poste et a été désigné dauphin d’Alassane Ouattara et candidat à la présidentielle d’octobre 2020. Il se surpassera pour démontrer aux Ivoiriens qu’il garde toutes ses capacités physiques pour devenir le prochain président de la Côte d’Ivoire. Il s’écroulera en plein conseil de ministres et décédera.

Ils sont nombreux, ces dirigeants malades qui nous gouvernent sur le continent. De nature, l’homme africain est hostile au changement politique et à l’alternance au pouvoir. Il se soude encore plus solidement au pouvoir se sachant malade. Dans nos pays, l’état de santé d’un dirigeant relève d’un mystère, un secret d’Etat le mieux gardé qui peut, dans bien des cas, valoir la prison. Même si le président de la République est malade, on laisse croire qu’il est en parfaite santé, qu’il se porte comme un pont neuf. Ils finissent par contracter deux graves maux : la maladie physique et la maladie du pouvoir.

Pour Bruce Bueno, dans les systèmes autocratiques, un traitement médical ne peut être entrepris qu’au risque de perdre le pouvoir. « Personne n’aime aller chez le docteur. Mais pour un dirigeant politique, la seule nouvelle d’une visite chez le médecin parait sonner le glas de sa carrière politique », estime-t-il.

« Il faut tenir compte de la mentalité très particulière de ces malades qui nous gouvernent et qui refusent d’une part, de considérer leur état de santé comme incompatible avec la direction d’un pays ou d’une armée, et d’autre part, d’admettre que les conséquences de leur maladie peuvent être graves pour leurs concitoyens », renchérissent Pierre Rentchnick et Pierre Accoce dans leur livre « Ces malades qui nous gouvernent ».

Médard Ametepe

Source : Liberté

Source : 27Avril.com