A peine deux rencontres et le premier couac signalé au 29ème dialogue inter-togolais baptisé Concertation nationale des acteurs politiques (CNAP).
Le Comité d’action pour le renouveau (CAR), le parti du regretté Me Yawovi Agboyibo, chantre du dialogue, vient de claquer la porte à ces discussions ouvertes en décembre dernier au cabinet du ministre de l’administration territoriale, sous la direction du maitre des céans.
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Le pouvoir pensait avoir tourné définitivement la page de la présidentielle du 22 février dernier puisque le sujet ne figurait pas à l’ordre du jour de cette concertation. Malgré cela les parties prenantes n’avaient émis aucune objection à part la Dynamique Mgr Kpodzro (DMK) qui a d’ailleurs boycotté ce énième pourparlers demandant que le contentieux de la présidentielle soit soldé.
La DMK marginalisée, le dialogue pouvait démarrer sur les chapeaux de roue. Erreur ! A la deuxième séance, le CAR délègue, le virevoltant Jean Kissi. Ce dernier tire un coup de semonce à la fin de cette séance. « On ne peut normaliser la question togolaise sans parler des crises électorales successives que nous avons connues dans le pays.
Le problème togolais c’est élections contestées-répression sanglante et dialogue qui souvent n’aboutit pas. Il faut finir de façon définitive avec ces crises et normaliser la situation politique qui a des rebonds sur la situation économique », avait déclaré le conseiller municipal de Golfe 5 avant de poursuivre qu’il va aller faire un point à sa formation politique.
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Faute de règlement de la crise née de la dernière présidentielle, le CAR claque la porte des discussions. Ce départ inattendu du parti des déshérités, quoique sapant l’opération de com que le pouvoir voulait mener avec son opposition « docile » devenu « compréhensif », met beaucoup plus l’Alliance nationale pour le changement (ANC), le parti de Jean-Pierre Fabre dans l’embarras que le pouvoir.
A scruter la réaction de l’ANC
En effet, de tout temps et tout au long des différents dialogues qui ont jalonné trois décennies de lancinante marche du peuple togolais vers la démocratie, ces deux formations, les principales de l’opposition : d’abord le CAR et l’UFC ensuite le CAR et l’ANC ont toujours affiché des positions communes au cours des différentes négociations.
Le plus souvent c’est au cours des conférences de presse communes que cette position est dévoilée. Aujourd’hui, voir le CAR faire cavalier seul au moment où son partenaire de l’opposition demeure à la table des négociations peut être difficile à comprendre par une bonne partie de l’opinion nationale acquise à cette opposition. Surtout que la revendication dont est porteur le CAR est celle-là même qui a amené le parti orange à marcher durant cinq ans dans les rues de la capitale à la suite de la présidentielle de 2010.
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Aujourd’hui, balayer du revers de la main la revendication légitime de la DMK, ne pas s’y associer, ne pas poser le problème au cours de ces discussions en cours comme si de rien n’était, comme si la victoire du candidat du parti au pouvoir est sans tâche, risque d’être interprété comme si l’ANC sacrifie la lutte du peuple togolais sous l’autel de ses intérêts personnels et ça risque d’écorner l’image du parti de Jean-Pierre Fabre déjà en perte de vitesse.
Même si ce parti ne digère pas jusqu’à présent le résultat de la dernière présidentielle et qu’on peut admettre que l’ANC est la formation politique de l’opposition qui a le plus perdu lors des trois derniers scrutins, il ne doit néanmoins pas perdre de vue les fondamentaux de la lutte, la soif du peuple togolais à l’alternance.
C’est en cela que le changement stratégique de ce parti au point de déclarer qu’il ne boycottera plus aucune consultation électorale dans le pays inquiète plus d’un. Il est interprété comme un blanc-seing accordé au pouvoir dans l’organisation des consultations électorales même si les conditions de transparence de celles-ci ne sont requises.
D’ailleurs, ce changement de l’ANC consécutif à sa débâcle réjoui le parti au pouvoir qui ne cesse désormais de parler en bien de ce parti or quand un pouvoir parle en bien de son opposition, il faut savoir que cette dernière ne fait plus peur ou qu’elle a fait une bêtise. Tel est certainement le cas de l’ANC qui, à la fin du deuxième round des discussions, son vice-président Patrick Lawson déclarait qu’ils vont se mettre au travail dans le cadre du dialogue au moment où leurs collègues de l’opposition posaient des conditions à leur participation au dialogue.
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Dans nos pays à démocratie balbutiante, l’opinion n’est pas habituée au pouvoir et à son opposition qui tiennent le même langage. Cela a d’ailleurs fait le lit du radicalisme. Gilchrist Olympio en a fait les frais au lendemain de la signature de l’accord dit « des braves » signé entre l’UFC, son parti et le RPT. Aujourd’hui, après la débâcle de février dernier, voir l’ANC et le pouvoir à la table des négociations alors que la DMK et le CAR seraient dans les rues, Jean-Pierre Fabre et les siens risquent de le payer cash dans les urnes.
C’est en cela, le retrait du CAR de la table des négociations pose beaucoup plus de problème à l’ANC qu’au pouvoir qui en dehors de soigner son image à l’international ne perd rien.
De la capacité du parti orange à aborder le dialogue et sa position par rapport au problème soulevé par le CAR et la DMK dépendront sa « remontada » dans le cœur des Togolais.
Togoscoop
Source : Togoweb.net