Tant que le pays vivra, il y aura toujours des commandes de produits pétroliers pour satisfaire aux besoins des populations. Pendant des décennies, ce secteur a brillé par un excès d’opacité dont beaucoup se sont servis pour se ménager des retraites dorées. Mais doit-on dénoncer la gestion passée et occulter les garde-fous devant prévenir la répétition des mêmes dégâts économiques ?
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Avec ou sans le passage d’inspections d’Etat dans les sous-sols du ministère du Commerce, les citoyens et consommateurs ne sauront sans doute jamais l’ampleur des irrégularités ayant émaillé la gestion de la commande des produits pétroliers. Le Comité de suivi des fluctuations des prix des produits pétroliers (CSFPPP) a trop longtemps excellé dans l’opacité pour que, du jour au lendemain, on connaisse l’étendue de sa mauvaise gestion. D’ailleurs, l’autorité n’a jamais été friande de la transparence dans la gestion de la chose publique. Autrement, la loi sur la déclaration des biens aurait été effective depuis belle lurette. Mais il faudra bien se résoudre à adopter une autre approche dans le secteur pétrolier.
D’abord, rendre effectif le décret n°2002-29/PR portant création du mécanisme d’ajustement automatique des prix des produits pétroliers qui dispose en son article 2 : « Le mécanisme d’ajustement automatique des prix des produits pétroliers fonctionne ainsi qu’il suit : si les prix à l’importation varient à l’intérieur de la fourchette -5 à +5% bornes comprises, par rapport au prix de la structure de référence, la marge des pétroliers supporte la totalité de la variation, les prix à la pompe et la taxe sur la Consommation des produits pétroliers étant fixes. Si les prix à l’importation varient à l’extérieur de la fourchette -5 à +5% bornes non comprises, par rapport au prix de la structure de référence, de nouveaux prix de vente à la pompe des produits pétroliers sont fixés par arrêté interministériel». Ou alors réécrire ce décret en tenant compte de l’évolution dans le processus de la commande.
En effet, il nous revient que contrairement à ce qui se faisait dans le passé, depuis quelques années, les sociétés pétrolières ou leurs gérants prépayent les produits pétroliers. En d’autres termes, elles achètent à l’avance la commande des trois prochains mois. Ce qui implique pour ces sociétés des emprunts auprès de banques avec des intérêts conséquents à payer. Cette situation va à l’encontre du décret cité plus haut qui veut un réajustement dès que la variation dépasse 5%. Sans tenir compte des stocks qui auraient pu être achetés sous un autre régime.
Un comité doit effectivement travailler pour mériter ses émoluments. Ainsi, au nom de la transparence des finances publiques, les membres du CSFPPP ont l’obligation de rendre publiques leurs décisions mensuelles de maintien ou de changement des prix du carburant. Avec des arguments qui tiennent compte du cours du dollar et du prix du baril. Il semble venu l’heure de dire aux populations les raisons des variations des prix des produits pétroliers en publiant les informations liées à la structure des prix. Toujours au nom de la transparence des finances publiques.
Et ce n’est pas tout. Reverser les fruits des prélèvements au Trésor public devient une exigence. Il n’est plus tolérable pour un pays qui recherche des financements par tous les moyens, de se permettre un décret du genre qui avait été pris par feu Eyadema, certainement trompé par ses conseillers d’alors. L’article 12 dudit décret dispose : « Pour son fonctionnement, le comité dispose de ressources constituées par les redevances du poste « Mécanisme d’ajustement » inscrites dans la structure des prix des produits pétroliers en vigueur. Elles sont gérées par dérogation faite aux principes généraux applicables en matière de comptabilité publique : un compte est ouvert à cet effet dans une banque de la place ». Lorsqu’on s’est amusé à estimer ce que récolte ce comité et qu’il dédie à son « fonctionnement », on a découvert qu’en moyenne 3,5 milliards FCFA sont gérés sans reddition de compte, une récolte de fonds qui n’a jamais pris la direction du Trésor public. N’est-il pas temps de faire autrement pour montrer patte blanche ?
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La subvention. Un autre terme dont le contribuable n’a jamais compris en quoi ça consiste. Tous les ans, cette rubrique est inscrite au budget. Ni la Cour des Comptes, ni l’Assemblée nationale n’en ont jamais fait le bilan pour savoir par rapport aux prévisions budgétaires, ce qui aurait effectivement décaissé. Avec les fluctuations du baril dans le bon sens des pays importateurs, il n’est pas possible que les prévisions ne subissent pas de modifications. Au nom de la transparence, le consommateur a le droit de savoir si cette rubrique existe toujours malgré la baisse du baril, et comment ça marche.
La déclaration des biens sera la dernière chose, plutôt la première laquelle on doit commencer la restructuration du CSFPPP et tout ce qui participe à la commande des produits pétroliers. Car, il n’est pas normal qu’à l’heure où les autorités donnent l’impression de tout surveiller en matière de finances publiques, ceux qui ont en charge le secteur pétrolier ne soient pas aussi concernés par la loi sur la déclaration des biens.
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Dans d’autres pays, parce que l’Etat ne fait pas de sentiments, parce que ceux qui aspirent à gérer la chose publique n’ont rien à se reprocher, on procède publique à la déclaration des biens en prenant à témoin le peuple. Présidents et citoyens se sont pliés à cet exercice sans faire trembler la terre. Malheureusement au Togo, pour des raisons que seuls nos « supers législateurs » connaissent, seule le Médiateur de la République pourra connaître les biens dont disposent Naka ou Kpatcha. Ce faisant, aucun anonyme ne viendra dire que ces deux n’ont pas les moyens d’acquérir ce qu’ils auront déclaré comme étant leurs propriétés. Déclarations de biens et dénonciations anonymes ne font pas bon ménage au Togo.
Godson K.
Source : Liberté Togo
Source : Togoweb.net