Opinion muselée, système électoral verrouillé, fausse limitation des mandats, etc. Des signes du long règne en vue de Faure Gnassingbé

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Musellement de l’opinion, obstacles à l’exercice des activités des organisations de la société civile, interdiction des manifestations publiques pacifiques, maintien de l’Etat d’urgence sanitaire malgré la fin de la maladie à coronavirus, composition des institutions de la République, contrôle des pouvoirs législatifs et judiciaires par l’Exécutif, armée non républicaine, verrouillage du système électoral… tous les ingrédients sont réunis pour un long règne de Faure Gnassingbé.

Le 25 juin 2022, le meeting d’information et de sensibilisation programmé par la Dynamique Monseigneur Kpodzro n’a pu se tenir. La faute au gouvernement qui, à travers le ministre de la Sécurité et de la Protection civile, Général Yark Damehame, a estimé que les risques sécuritaires étaient graves. En toile de fond, la menace terroriste brandie comme un alibi pour interdire cette manifestation pacifique. « Il est rapporté que certains partis politiques regroupés au sein de la DMK projettent d’organiser un meeting ce samedi 25 juin 2022 à 14 heures dans le quartier Bè à la place dite Kodjindji dans la commune de Golfe 1 (…) Tenant compte des contraintes qu’imposent les nouvelles menaces à l’appareil sécuritaire de notre pays et des renseignements de dernières minutes, et surtout du risque majeur qui pourrait en découler pour la sécurité des personnes et des biens (…)le meeting prévu est interdit», écrit le Général de Brigade.

Bien évidemment, les arguments avancés par le ministre ne convainquent personne. Au sein de la DMK, on prend acte de la décision tout en se projetant sur le mois de juillet, plus précisément le 16 pour la tenue de ce meeting avorté. « Ils ont reconnu la pertinence et la justesse des propos des membres de la délégation de la DMK, mais ont dit que la décision d’interdiction ne peut être révoquée car étant liée à des raisons sécuritaires qui priment sur toute autre considération », a déclaré la Dynamique.

Ce refus d’exercer une activité politique fait partie de toute une série de décisions consistant à museler l’expression d’opinions divergentes. Il ne serait pas une surprise d’apprendre, le 14 juillet 2022, que telles qu’avancées précédemment, des raisons sécuritaires contraignent le gouvernement à refuser encore la tenue du meeting. Nous sommes au Togo.

C’est donc le déroulement du plan de musellement de l’opinion. Il y a quelques mois, le gouvernement a pris des textes restreignant les activités des Organisations de la société civile, notamment des ONG qui sont désormais contraintes de demander une autorisation aux préfets avant de procéder à des dons et autres activités. Pour la création des associations et syndicats, les dispositions ont été durcies. Une réaction à l’insomnie donnée au pouvoir par les enseignants regroupés au sein du Syndicat des enseignants du Togo (SET) dont des responsables et membres sont actuellement dans les geôles de la dictature. Certains ont été licenciés après avoir été retirés de la fonction enseignante.

Depuis l’élection présidentielle de février 2020, le Togo est rentré dans une nouvelle ère, celle de l’impossibilité d’exprimer des opinions contraires à celles du gouvernement. Paul Missiagbéto, Djimon Oré, Agbéyome Kodjo, Brigitte Adjamagbo-Jonhson, Gérard Djossou – la liste n’est pas exhaustive – ont fait les frais de leur audace. Ils le paient très cher. En plus de cela, le Togo est un pays en Etat d’urgence sanitaire. Peut-être le seul au monde qui a quasiment éliminé la maladie à coronavirus. Malgré la situation sanitaire presque normale, l’Etat d’urgence sanitaire est maintenu. Deux ans déjà que le pays y est contraint.

Les restrictions des espaces de liberté se manifestent aussi par l’interdiction de marche pacifique dans le pays. Tel que les conditions ont été définies, les manifestations ne peuvent avoir lieu que dans la brousse, loin des marchés, des représentations diplomatiques, des lieux de forte fréquentation, loin des bâtiments de l’administration… Or, une manifestation est faite pour attirer l’attention de la population et non de la faune et la flore. Malgré la réaction des Nations Unies appelant l’autorité au Togo à revoir les dispositions restrictives contenues dans l’ancienne loi Bodjona, rien n’y fit. Le chien aboie, la dictature avance.

Avec une armée non républicaine et à laquelle on attribue des faits aussi graves que la torture, les assassinats et autres, le Togo est loin de réunir les conditions pour sortir de la main du régime autoritaire vieux de plus de 50 ans. Au pouvoir de 2005, Faure Gnassingbé a le soutien de l’armée. D’aucuns disent même qu’il en est le visage civil. Et pour longtemps d’ailleurs.

Et pour cause, outre les situations évoquées plus haut, Faure Gnassingbé est dans la posture d’un dirigeant éternel. En mai 2019, l’Assemblée nationale adopte la limitation du mandat présidentiel tout en ouvrant une brèche pour l’actuel chef de l’Etat. Alors que l’on croyait cette limitation acquise, le Togo s’oppose à l’adoption du protocole de la CEDEAO sur la limitation à deux des mandats présidentiels. Si cette disposition est adoptée, Faure Gnassingbé n’aura plus la possibilité de sauter le verrou comme l’avait fait son père en 2002.

L’autre danger du Togo qui laisse à croire que le règne de Faure Gnassingbé n’est pas près de finir est la composition des institutions de la République. Les sont toutes aux mains de personnalités acquises à la cause du pouvoir à vie du fils d’Eyadema. De la Cour constitutionnelle au Médiateur de la République, tout est contrôlé par des hommes et femmes qui chantent et dansent chaque fois qu’ils réussissent les coups de forces électoraux pour s’assurer le pillage des ressources du pays.

Le comble, les pouvoirs judiciaire et législatif n’existent que de nom, étant tous des obligés de l’exécutif qui en a fait des bras armés, pour que Faure Gnassingbé règne longtemps.

G.A.

Source : Liberté / libertetogo.info

Source : icilome.com