Olatokunbo Ige, le symbole des errements des Nations Unies au Togo

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Olatokunbo Ige, le symbole des errements des Nations Unies au Togo

Lorsqu’elle débarquait en juin 2005 à Lomé, Olatokunbo Ige faisait partie d’une mission onusienne, dépêchée à Lomé pour évaluer les violations des droits humains au lendemain des tueries de 2005. S’est-elle prise de passion depuis pour ce pays où, pour un oui ou un non, on ôte la vie et fait couler si facilement le sang des citoyens ? Ces douze dernières années qui correspondent au règne de Faure Gnassingbé, dame Ige a plus résidé au Togo qu’ailleurs. Peut-être même pas prête de partir de si tôt.

Ce mercredi, la Représentant résidente du Centre des Nations Unies pour la Paix et le Désarmement (UNREC) est allé faire ses adieux à Faure Gnassingbé. La énième fois, devrait-on dire. Sa mission à la tête de l’UNREC prend donc fin. Comme plusieurs fois par le passé, ses missions ont pris fin, sans que la Nigériane ne quitte vraiment le Togo.

Si elle a foulé le sol togolais dès juin 2005, les Togolais ne la connaîtront vraiment que lorsqu’elle reviendra au Togo, avec dans sa valise, une organisation nommée Haut-Commissariat des Nations-Unies aux droits de l’Homme (HCDH). Elle va retrouver un certain Gilbert Bawara, dont le bureau n’était pas loin du sien au siège des Nations-Unies à Genève en Suisse. Les deux s’entendent comme larrons en foire. Inévitablement, le jeu ne passe pas inaperçu aux Togolais. Et quand en 2008, ces derniers apprennent son départ, c’est avec soulagement qu’ils accueillent la nouvelle (comme d’ailleurs chaque fois qu’ils apprendront plus tard la fin de ses interminables missions au Togo). Personne ne se doutait que dame Olatokunbo Ige a fini par tomber amoureuse du Togo qu’elle fera tout pour y revenir quelques années plus tard.

En septembre 2011, la nouvelle tombe, comme un coup de massue. « La Représentante résidente du Haut-commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme (HCDH) au Togo de 2006 à fin 2008, Mme Ige Olatokunbo, connue pour ses accointances avec le clan au pouvoir, revient à Lomé. Il est fort probable qu’elle prenne fonction aujourd’hui, pour le malheur du peuple togolais », avaient alerté nos confrères de Liberté, dans un article repris sur icilome.com. « Malheur », c’est le terme utilisé par l’auteur de l’article pour qualifier le retour de la diplomate, « fervente chrétienne », dans nos murs. Le terme rappelle comment, dans la sainte Bible, les habitants de la Terre avaient été avertis à la chute du diable.

De 2011 à 2015, c’était effectivement l’enfer avec le « pasteur Ige ». La diplomate onusienne, qui était censée militer pour la protection des droits de l’Homme, s’est muée en trouble-fête au sein de la société civile togolaise. Elle y avait fait son tri, rapprochant d’elle ses « enfants chéris » qu’elle a tellement gâtés que certains sont même devenus trop puissants au point d’étouffer les autres. Ige ne s’est pas contentée de couvrir de dollars directement ou indirectement « sa société civile » qui, à son tour, en même temps qu’elle faisait preuve d’obséquiosité vis-à-vis du pouvoir, traite sans ménagement l’opposition, au nom d’une curieuse indépendance qui, du reste, est plutôt orientée. De son côté, Olatokunbo Ige s’acharnait à enfoncer les organisations « rebelles » à qui elle bouchait tous les horizons financiers. Au fil des années, les organisations autrefois solides et qui inspiraient respect, ont fini par être fragilisées, affaiblies, poussées même à l’affrontement. Quand le HCDH fermait ses bureaux en 2015, la société civile togolaise était dominée par une poignée d’organisations jusque-là portées à bout de bras par le HCDH. Deux années plus tard, mêmes celles-là sont dégonflées, laissant le pouvoir en roue libre, créant le besoin de nouvelles coalitions. Le scénario a visiblement bien marché. Mais heureusement que certaines organisations ont pu trouver le moyen de se réorganiser pour rebondir, après le départ du HCDH.

Le HCDH a donc fini d’exécuter sa mission, officielle et officieuse. Mais celle qui a été au cœur de tout le dispositif, fait tout pour ne pas quitter le Togo. Elle rebondit au Centre des Nations Unies pour la Paix et le Désarmement (UNREC). Au grand dam des Togolais, qui une fois encore ont espéré, en vain, voir s’éloigner du Togo celle qui semble devenue plus un soutien du régime que tout autre chose.

De 2015 en 2017, Olatokunbo Ige, se rapproche davantage du pouvoir. Sans scrupule. Pourtant revêtue de son manteau de diplomate, elle s’introduit, selon nos informations, à la Présidence, avec fracas, avec sous les aisselles, un projet de prière. En compagnie d’autres pasteurs dont des très proches de Gnassingbé, ils animent des séances de prière à la Présidence de la République chaque trois mois. Comme on peut le constater, à la tête de son église des «Rachetés de Dieu», elle ne s’occupe pas seulement du désarmement physique. Elle va plus loin dans le désarmement spirituel à la Présidence, au point parfois d’écarter certains pasteurs de ce business. Une diplomate onusienne, membre d’un groupe de prière à la Présidence de la République togolaise. Surréaliste, n’est-ce pas ? C’est comme, en Syrie, un diplomate onusien puisse s’introduire dans un pseudo groupe de prière avec Bachar Al Assad, au palais de ce dernier. Comment donc se fait-il qu’une diplomate onusienne peut se laisser aller à ces légèretés dans sa connivence avec un pouvoir duquel elle est supposée se tenir à l’écart?

On voit bien qu’au Togo, les Nations Unies se fourvoient totalement ou se laissent aller à des provocations auxquelles elles n’auraient même pas songé sous d’autres cieux. On se rappelle comment le représentant des Nations Unies en Afrique de l’Ouest, Ibn Chambas, vient jouer des rôles troubles à Lomé, se permettant même de dire à un opposant qu’il est encore jeune, d’attendre que Faure Gnassingbé prenne encore un mandat supplémentaire. Comme s’il lui revenait de désigner qui et quand un Togolais peut faire valoir son droit de citoyen et postuler à la magistrature suprême.

C’est au Togo qu’on a pu voir qu’un organe des Nations Unies, le PNUD, a aménagé un poste spécialement pour la fille de la Directrice de cabinet du Chef de l’Etat, sans même que cette dernière ait la qualification pour. D’ailleurs, la trop grande complaisance des Nations Unies au Togo embarrasse tellement les autres représentations diplomatiques que le fameux Groupe des Cinq qui regroupait les ambassades européennes et le système des Nations, a volé en éclats. Ou disons plutôt que cette dernière a été éjectée du groupe. Comme quoi, sans être Togolais, même les diplomates occidentaux, eux-mêmes, en sont arrivés à ne plus supporter les agissements louches de leur désormais ancien compagnon de route. Le Togo étant une mine d’or, il est fort à parier que même après sa mission pour le compte de l’ONU, celle qui vient de dire ses adieux à Faure Gnassingbé s’installe au Togo cette fois-ci sous le manteau de pasteur, puisqu’après tout, les pécheurs togolais doivent être «rachetés par Dieu».

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