‘‘Chassez le naturel, il revient toujours aux galops’’. On l’a toujours dénoncé depuis des années, mais certains croient que cela n’arrive qu’aux autres. La vétusté des installations pour l’exploitation et le traitement des phosphates togolais reste pour les agents de la SNPT un danger à ciel ouvert comme le minerai même l’est pour les populations riveraines. Il vous souvient qu’on a toujours déploré le fait qu’à cause d’un matériel vétuste, les employés soient souvent victimes des accidents de travail.
Amputations par-ci, mort par-là, quotidiennement les travailleurs de la SNPT côtoient le danger. Les installations qui permettent jusqu’ici d’extraire et de traiter le premier minerai de notre pays remontent à l’époque coloniale. En 2015, pour toucher du doigt cette triste réalité et sensibiliser les dirigeants à ce sujet, nous avions séjourné à Kpémé afin de faire des investigations. Appuyés par une camera cachée, nous avions publié outre, des révélations, mais aussi et surtout un album photo d’un maillon de cette usine de traitement qui ne valait qu’un tas de ferraille. Mais tout cela n’a pas changé grand-chose.
Les installations sont restées les mêmes. Bien avant notre visite, les autorités en avaient conscience, mais devant l’argent la gestion publique au Togo perd la tête. C’est ainsi qu’en 2007, alors que les autorités s’apprêtaient à consentir un prêt de 30 milliards CFA auprès de la BAD, la représentation du personnel s’y est opposée en démontrant que l’entreprise peut s’autofinancer, tout le reste n’est que mauvaise gestion. Ainsi de 2008 à 2014, d’après un courrier du président Kloméga Ignace du conseil d’administration adressé à la représentation du personnel de la SNPT, plus de 65 milliards CFA, sur fonds propres, sont injectés dans la rénovation de la filière phosphate. Mais cela n’avaient pas suffi pour la rénovation tant désirée. C’est alors que les accidents de travail ont continuer par faire le lot des fonctionnaires qui, jusqu’ici revendiquent, tant bien que mal, des conditions de travail décentes et loin du danger permanent. Parmi les grands maillons de cette usine de traitement, se trouvent 5 chaînes passantes tirées par d’épaisses bandes transporteuses.
De la matière brute déversée par les wagons au lieu de chargement dans les bateaux en passant par le centre de traitement, ces bandes ou chaînes transportent le minerais d’un endroit à un autre. Ces chaînes sont tombées en désuétude l’une après l’autre. Par la faveur d’une certaine réhabilitation, les chaînes ont commencé par reprendre vie tant bien que mal. Entre-temps, nous dénoncions que ce soit l’éternel conseillé Barqué BARRY Moussa, un des coupables de l’actuelle déconfiture, qui soit derrière la réhabilitation d’une des chaînes en délabrement et dont les travaux ont coûté plusieurs milliards. Tout récemment, une autre chaîne est mise en réhabilitation. Un Israélien, HAZAN, assistant technique au service bureau d’étude et rénovation des installations, en est le maître d’ouvrage. Il finit son travail de réfection et rend compte au maître des lieux, l’autre IZRAELIEN du nom de Edery, le vrai patron.
C’est lui qui gouverne de main de maître, l’exploitation de ce minerais en échange de la sécurité de son excellence ‘’le roi Gnassingbé II’’ du Togo. Cet Israélien, à son tour, commet un autre expert du nom de JIMY RABINOVIC pour venir contrôler le travail. Agé de 79 ans, l’expert arrive et était en train de parcourir la chaîne réhabilitée pour évaluer le travail. Alors qu’il était sur une hauteur, tout à coup, il marche sur une ferraille rouillée et pourtant bien peinturée à côté de la bande plastique qui véhicule le minerai. Le temps de se rendre compte, il s’est retrouvé en contacte violent avec le béton au sol et rend l’âme sans autre forme de procès. Il n’avait même pas d’ambulance, en panne depuis longtemps, pour évacuer le corps. C’est un directeur technique qui a libéré sa double cabine pour transporter le corps à la morgue d’Aného. La chaîne N° 5 qu’on vient de réhabiliter et peinturer n’était en effet qu’une « occasion peinturée » qui vient de faire sa première victime dans le rang, non plus des Togolais habitués à ces genres d’accidents, mais des Israéliens. C’était triste et regrettable qu’un vieux innocent de 79 ans soit victime d’une situation qu’il n’a pas créée. Mais c’était ainsi les dégâts.
Quand nous martelons tous les jours que ce site est un danger de tous les jours, les gens croyaient que ce sont les employés de la SNPT qui nous manipulaient pour plaider leur cause. Mais en réalité, nous réclamions un environnement décent pour tout le monde qui est en contact avec ces installations car certains pensent que cela n’arrive qu’aux autres. Hier c’était les pauvres Togolais qui mouraient dans l’indifférence. D’ailleurs, une semaine avant cet accident mortel, le couvre arrière d’un caterpillar en activité tombait sur un pauvre contractuel togolais que l’usine refuse présentement de prendre en charge sous le fallacieux prétexte qu’on ne connaît pas le tâcheron qui l’a recruté. Et pourtant il est totalement défiguré par sa blessure et broyé aux orteils car il n’était pas en chaussure de sécurité. Aujourd’hui, c’est un ‘’noble Israélien’’ qui est tué par la ferraille, demain à qui le tour ? Peut-être un tout puissant ministre togolais qui sera, comme ils le font souvent, en train de démontrer sous les caméras de la TVT comment l’entreprise se porte très-bien. « Quand un enfant refuse le sommeil à sa maman, lui aussi doit s’apprêter à ne pas dormir ».
La SNPT c’est l’histoire tragique d’une exploitation d’un minerai. Malgré la sonnette d’alarme des représentants du personnel dans leur différent mémo, rien ne bouge. Les précédents dossiers que nous avions publiés vous avaient informés que le minerai a été découvert en 1952 à l’époque avec une réserve de 60 millions de tonnes. L’exploitation va commencer en 1957 avec la CTMB, Compagnie Togolaises des Mines du Bénin. En 1974 le minerai se nationalise avec le fameux accident de Sarakawa que Eyadema a toujours brandi comme un fait de guerre. Nos recherches nous avaient permis de vous publier que le business mondial du phosphate a connu des périodes de vaches-grâces entre les années 197O et 1980. En 1989, le phosphate togolais était à son plus haut niveau de production avec 3.390.000 tonnes par an au moment où la matière se négociait toujours à prix d’or. Présentement ça fait 60 années d’exploitation, le Togo n’a pas pu remplacer les installations avec lesquelles est née l’usine.
D’une main à l’autre, les maîtres des lieux n’ont toujours fait que du replâtrage en changeant de nom à la structure comme si la solution à une mauvaise gestion se cachait dans la dénomination de la structure. Nous vous publions aussi, en 2015 dans l’édition N°262, l’extrait d’un rapport de la Banque de France qui, parlant des phosphates de mon pays, déplorait le fait que « les revenus engrangés sur les années 70-80 n’aient pas pu être convenablement gérés afin d’anticiper le vieillissement de l’outil de production… ».
En 2003 la tendance baissière plombait la structure. De 20% du PIB en 1989, le phosphate tombe à 5 %. En mai 2007 IFG est devenu SNPT, Société Nouvelle des ¨Phosphates du Togo, la production est déjà à 1 million de tonne l’an, les prix sur le marché international eux ont paradoxalement flambé de 59%. Les dizaines de milliards investis chaque année n’ont pas suffi pour remplacer les maillons clés, on continue par faire du copie coller, des occasions peinturées. Finalement, l’exploitation des phosphates est devenue une honte nationale quand, dans son rapport de 2013, l’Initiative Togolais pour les Industries Extractives, ITIE, conclut que le Togo ne connaît pas les quantités de phosphates exportées. Les tonnages qui sortaient étant plus sous le contrôle des Israéliens que du système SYDONIA de la douane togolaise qui devait normalement quantifier les sorties.
En 2015, le gouvernement parlait d’une baisse de dividendes de 40%, le trésor public devait donc juste encaisser 3 milliards de CFA de la SNPT contre 5 milliards en 2013. Mais alors qu’on a pas fini de s’inquiéter de cette situation alarmante, en fin 2016, lors du vote du budget national pour l’exercice 2017, sur interrogation des élus du peuple, le ministre des finances et le directeur du trésor public révèlent tristement que « depuis 2014, la SNPT n’a versé aucun rond au trésor public ».
Plus le temps passe, plus cette exploitation est victime des installations vétustes et plus les Togolais en ont honte, vraiment honte. Honte d’être pris en otage par des messieurs qui, bien qu’ils disposent de la 4ème réserve et de la 2ème qualité mondiale de phosphates, n’arrivent même pas à s’organiser pour puiser ce minerai tricalcique à ciel ouvert et vendre sur le marché mondiale, toujours demandeur. Pire, pour une certaine sécurité d’un chef de l’Etat, soit-il le plus important des Togolais, ils remettent lâchement l’exploitation à une bande d’Israéliens qui commencent par être, eux aussi, victimes de la ferraille de Kpémé. Nous ne croyons pas si bien dire quand nous publions dans un précédant dossier qu’à défaut de bien gérer, il vaut mieux faire économie de cette exploitation villageoise pour que les générations à venir en tirent au moins un petit profit du peu de réserves de phosphates tricalcique restant.
Vous n’êtes pas sans savoir qu’à côté de ce minerais tricalcique en finition, il reste à exploiter deux milliards de tonnes d’un nouveau phosphate, dit carbonaté, qui est plus précieux que le premier et qui se loge à environ 100 m de profondeur. Avec de tels messieurs, ce minerais aussi risque le même sort que le finissant. Honte à vous autorités togolaises.
Abi-Alfa »Le Rendez-vous » N° 299 d’hier jeudi 09 mars 2017
www.icilome.com