Ils sont nombreux ces togolais à avoir émis des doutes sur l´efficacité des actions qu’aura à poser cette énième coalition de l’opposition togolaise dite groupe des onze.
Nous avons d’un côté le CAP 2015 (ANC, CDPA, DSA, PSR, UDS, une coalition de partis politiques créée à la veille de l’élection Présidentielle d’Avril 2015), et de l’autre le groupe des six ( ADDI, FDR, Togo autrement, Les Démocrates, MCD, Parti des Togolais), un regroupement qui a récemment vu le jour.
Ces deux regroupements de partis politiques de l’opposition ont donc jugé bon d’unir leurs forces pour mieux peser face au régime de dictature des Gnassingbé.
Mais beaucoup de togolais, comme nous l’écrivions plus haut, désenchantés par les nombreuses unions de leur opposition, n’y croient pas vraiment.
Nous ne le répéterons jamais assez que c’est le refus par le régime Gnassingbé d’appliquer l’Accord Politique Global (APG) depuis une décennie qui constitue la pomme de discorde entre l’opposition et le pouvoir togolais. Et ce n’est plus un secret que le régime en place, allergique à toute idée de démocratie sincère et d’alternance politique, est le seul responsable du blocage du processus de démocratisation dans le pays.
Ayant profité de l’APG en 2006 pour acquérir un semblant de légitimité qu’il ne méritait pas vu le caractère sanglant et illégal de sa venue au pouvoir, Faure Gnassingbé ignora tout de sa signature en utilisant subterfuges de toutes sortes et mauvaise foi pour ne pas faire adopter les réformes constitutionnelles et institutionnelles recommandées par l´accord.
Bien que l’APG, si on en respectait l’esprit, contienne tout ce qu’il faut pour mettre fin à la crise politique qui dure depuis des décennies, le Président de fait du Togo se met à créer commissions et commissariats pour gagner du temps et faire de la diversion. À l’Assemblée Nationale, les députés-moutons d’UNIR, véritables traîtres à la patrie, qui constituent la majorité, ont choisi, par manque de patriotisme et pour leurs intérêts personnels de jouer le jeu du pouvoir en soutenant un homme et pas le peuple qui les a mis là.
Depuis plusieurs décennies et au lendemain de chaque élection volée dans la violence l’opposition togolaise qui en sort toujours divisée, n’avait jamais réussi à mobiliser de façon efficace les populations et faire entendre sa voix. Sous la pression de la fameuse communauté internationale elle avait toujours dû retourner à des dialogues avec la dictature dont pourtant la mauvaise foi et surtout le jusqu’au-boutisme ne sont plus à démontrer.
Fatiguées des divers échecs de leur opposition et des différentes velléités d’union qui n’ont pas abouti, les populations togolaises, assoiffées de plus de liberté et de démocratie, en sont arrivées à douter de l’efficacité des méthodes utilisées. Il était donc clair que l’appel à une opposition plus responsable et plus courageuse était devenu plus fort. Il nous faut désormais des leaders qui sachent quitter les sentiers battus en orientant la lutte, adaptant leurs méthodes aux comportements de l’adversaire. Car on ne peut pas continuer éternellement à traîter avec un adversaire politique, ennemi de la démocratie, avec des moyens démocratiques; ça ne marchera jamais.
Et c’est pourquoi toute nouvelle initiative venant de l’opposition togolaise attire l’attention des démocrates que nous sommes et réveille des espoirs. Mais les nombreuses désillusions du passé nous obligent à faire preuve de beaucoup de prudence et de vigilance et espérer que les nouvelles méthodes de lutte que proposera la nouvelle coalition de partis politiques soient vraiment une nouveauté qui tranche avec les errements du passé.
Nous avons salué l’initiative de rapprochement des deux regroupements de partis politiques de l’opposition pour former le groupe des onze. Mais en même temps, après avoir entendu les déclarations des uns et des autres au sein de la nouvelle coalition, nous craignons devoir rester sur notre faim quant à l´efficacité de la nouvelle méthode, si méthode il y a. Certes, les principaux leaders au sein de ce nouveau regroupement ont reconnu que des erreurs furent commises dans le passé et se sont même excusés auprès du peuple; mais pour une coalition qui a vu le jour pour tenir tête de façon décisive au régime de dictature, nous avons vainement attendu des décisions fortes et courageuses au sortir des différentes réunions.
« C´est une démarche unitaire pour faire bouger les choses…. »
« L’ouverture de discussion entre le Pouvoir et l’Opposition, dans les plus brefs délais, afin de parvenir au consensus nécessaire à la réalisation des réformes… »
« Ce rapprochement vise à créer un nouveau rapport de force avec le pouvoir… »
Voilà quelques-unes des déclarations des leaders
du groupe des onze.
Pendant que les députés de l´opposition se font humilier et ridiculiser à cette Assemblée de moutons d´UNIR appelée Assemblée Nationale, pendant qu´une énième insulte au peuple est proférée par ce régime prédateur avec la création unilatérale de communes fantaisistes, nous croyons que c´est trop peu de faire de telles déclarations que nous avons déjà entendues à plusieurs reprises en d´autres occasions. Et parler encore d´ouverture de discussions entre le pouvoir et l´opposition nous paraît méconnaître les méthodes de l´adversaire qu´on a en face depuis plusieurs décennies.
Aujourd´hui au Togo même le dernier idiot du village sait que le régime RPT/UNIR est de mauvaise foi et qu´il cherche à s´éterniser au pouvoir. Penser encore à ouvrir de quelconques discussions avec un tel régime ne peut que venir des gens qui ont tiré leur dernière cartouche et n´ont plus rien à proposer. Plus qu´un aveu d´impuissance, c´est d´un manque de volonté et de courage politiques qu´il s´agit.
Au groupe des onze y a-t-il des raisons qui empêchent la prise de décisions fortes qui tranchent avec les bla-bla du passé?
Y a-t-il des intérêts inavoués qui font que la troupe à Apévon, Fabre, Gogué… a si peur du mot « révolution » ?
Oui il faut une révolution pour faire partir ce régime qui ne veut pas entendre raison. Et le peuple togolais fatigué attend de son opposition qu´elle l´aide à s´organiser pour ce faire.
L´adoption en cavalier seul à l´Assemblée Nationale par UNIR de la scélérate loi sur la création de communes doit nous interpeller en tant qu´opposant et nous amener à nous demander si nous faisons vraiment ce qu´il faut pour faire plier ce régime. Les déclarations de principe, les dénonciations ou les menaces vides sont-elles suffisantes pour créer un rapport de force qui pourrait faire reculer ce pouvoir qui prend tout le peuple togolais comme un tas d´idiots?
Des leaders d´un parti politique pas des moindres nous avaient déjà prédit la fin du régime de dictature à la fin de l´année 2015, sans pour autant en avoir les moyens. On appelle ça du populisme. On ne fait pas la politique en comptant sur le hasard.
Nous sommes curieux de savoir ce que le groupe des onze pense, par exemple, de la position du PNP. Le président Tikpi Atchadam de ce parti a une position claire et sans équivoque : s´organiser pour faire entendre la voix de l´opposition, donc des populations togolaises, et si le régime refuse et s´enferme dans son entêtement, le chasser du pouvoir. Cette position du parti du cheval est-elles si stupide à tel point que le groupe des onze puisse l´ignorer au moment de passer en revue les méthodes à choisir?
Imaginons la panique qu´un éventuel meeting au cours duquel Jean-Pierre Fabre, Aimé Gogué, Tikpi Atchadam, Paul Dodji Apévon prendraient tour à tour la parole pour haranguer l´assistance ferait au sein du pouvoir.
A-t-on tenté d´approcher Tikpi Atchadam? Nous ne disons pas qu´il a la baguette magique, mais il est actuellement l´un des rares leaders à pouvoir drainer les foules et tout le monde peut imaginer le Tsunami que toutes les foules de tous ces partis de l´opposition représenteraient.
Les ego, les jalousies ou autres travers qui avaient tiré l´opposition togolaise vers le bas dans le passé font partie des erreurs dont les leaders du groupe des onze ont parlé et pour lesquelles ils se sont excusés.
Peut-on s´excuser pour une faute en continuant à commettre la même faute?
Dans l´un de mes articles d´il y a quelques semaines je terminais la conclusion en ces termes:
« …Il ne sert à rien de faire le bilan de la lutte en termes de longévité en tant qu´opposant, mais en termes de résultats… »
En commettant son énième coup de force vendredi 23 juin à l´Assemblée Nationale, le régime RPT/UNITR vient une fois encorte nous rappeler qu´il ne reculera devant rien pour continuer à règner en divisant les Togolais. Et je me demande comment nos députés de l´opposition retourneraient dans cette chambre d´enregistrement, et comment ils regarderaient leurs collègues moutons de députés d´UNIR. Nous avons toujours critiqué la présence de l´opposition à cette Assemblée, et on nous a à chaque fois répondu qu´autrement le pouvoir aurait un boulevard devant lui pour faire ce qu´ il veut.
Quand c´est clair aujourd´hui que ce sont plutôt les parlementaires de l´opposition qui servent de boulevard de légitimation à ce régime aux abois pour redorer son blason, il serait difficile pour le groupe des onze, si on en restait là, de prendre des décisions courageuses qui pourraient vraiment menacer le pouvor vomi des Gnassingbé.
Et alors, par peur pour certains de perdre des avantages immédiats, notre opposition risque une fois encore de sacrifier le salut du peuple sur l´autel des intérêts egoïstes. Mais je souhaite vivement pour le bonheur des populations togolaises que les évènements des prochaines semaines ou prochains mois puissent me faire mentir.
Samari Tchadjobo
Allemagne
27Avril.com