Les grandes leçons des récentes élections municipales, la
candidature unique de l’opposition, la position de l’ANC, l’alternance en 2020,
Dr. Georges William Kouessan se prononce sur les grands sujets de l’heure.
Notre rédaction s’est entretenu avec le président national du parti politique «
Santé du Peuple ». Lecture !
Quelles sont les nouvelles de « Santé du Peuple » ?
Le parti se porte bien. Vous savez que depuis le mois de
mai, nous sommes porteurs d’un message que nous jugeons important pour l’avenir de notre pays. C’est autour donc de
cette vision que le parti s’organise ces derniers temps.
Quelles leçons tirez-vous des dernières élections locales ?
La première leçon est que le régime qui nous régente est
décidé à développer toutes les
stratégies de conservation du pouvoir : prendre l’opposition au
dépourvu, organiser mal des compétitions électorales, l’utiliser de manière
disproportionnée les moyens électoraux…
La deuxième est que l’opposition togolaise doit se ressaisir
pour aller vers une organisation plus sérieuse et mieux pensée.
Les maires sont connus. Quel message à leur endroit ?
D’abord un message de félicitation. Nous les exhortons
ensuite tous à travailler durement, loin de leur chapelle politique, pour que
notre pays se développe rapidement à la base, parce que tout développement harmonieux passe nécessairement par la base.
A ceux de l’opposition, nous demandons de s’organiser rapidement à connaitre le
terrain, chacun dans sa zone de compétence, pour être électoralement efficace
lors de la présidentielle de 2020.
Vous avez fait récemment une proposition dont les journaux en ont fait largement écho. Pouvez-vous nous en rappeler les grands points ?
Vous savez que le 08 mai dernier, les réformes politiques
ont été faites à l’Assemblée nationale, et qui ne limitaient pas radicalement
le mandat présidentiel. Face à cette
donne politique, nous avons estimé que seule une organisation sérieuse de
l’opposition pourra constituer une voie de salut pour le peuple togolais.
Cette organisation doit viser, selon nous, trois objectifs principaux : participer activement aux élections locales, choisir une personnalité apolitique ne participant pas, ou participant peu au débat politique pour en faire un candidat unique de l’opposition pour la présidentielle de 2020.
Il aura pour principale tâche d’organiser un lobbying diplomatique actif, basé sur la recherche de soutien diplomatique et sur l’exigence des conditions acceptables de transparence électorale, de réunir les moyens matériels et financiers nécessaires à une bonne campagne et une bonne vigilance électorales, organiser une transition d’ouverture politique, de 2020 à 2023 pour baliser la voie à une vraie alternance, porteuse de développement durable pour notre pays.
Votre idée de candidature unique ne reçoit pas l’assentiment de certains partis tels que le CAR, et l’ANC, qu’en dites-vous ?
Pour moi, ce n’est pas encore grave, tant que ces partis
n’ont pas encore organisé leur congrès pour désigner officiellement leur
candidat.
Que pensez-vous des arguments avancés par l’ANC pour justifier sa position ?
C’est vrai que nous avons suivi la sortie de certains partis
politiques rejetant l’idée de la candidature unique. Ce que nous leur avons
reproché, au cours de la plupart de nos sorties médiatiques, c’est de ne pas
avancer d’argument pour justifier leur position. C’est donc avec satisfaction
que nous avons suivi la sortie de l’ANC sur le sujet, qui a apporté des
arguments chiffrés. Cela permet de
débattre.
Les chiffres avancés par l’ANC montrent que depuis 1998, les résultats donnés par les CENI successives, inféodées au pouvoir, aux différentes élections présidentielles, n’ont jamais fait de l’opposition, détentrice de la majorité absolue.
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Avant de venir discuter de cet argument de fond, il y avait
d’autres que nous pouvons qualifier de
périphériques.
Mais avant tout cela, ma première remarque, c’est qu’en
2015, nous nous sommes battus, après un conclave de plus de 3 mois, à dégager
un candidat unique. Ce n’était pas facile, j’avais même salué l’engagement de
tous ceux qui étaient restés, tant le chemin était difficile. C’est pour dire,
qu’il y a seulement quatre années, nous y croyons tous fermement, nous qui
composions le CAP 2015. Ma question est de savoir, en l’espace de 4 ans, qu’est
ce qui a pu fondamentalement changer pour que l’ANC pense aujourd’hui que la
candidature unique n’est plus importante, quand je sais qu’avant 2015, la
plupart des membres de l’ANC avaient déjà passé au moins 20 ans, sinon 25 ans
en politique ?
Premièrement, j’ai constaté que l’ANC, pour appuyer sa
position, disait que Me Agboyibo n’est pas d’accord, le professeur Wolou n’est
pas d’accord avec la candidature unique. Pour rappel, le CAR n’était pas
d’accord avec nous en 2015, mais cela ne nous avait pas empêché d’évoluer,
parce qu’on y croyait.
Concernant l’argument selon lequel, avec la candidature
unique, il y aurait un seul représentant de l’opposition par bureau de vote,
alors que plusieurs candidats fourniraient plusieurs représentants de
l’opposition par bureau de vote, nous croyons qu’il y a une question à laquelle on doit répondre :
combien de candidats pourront placer combien de représentants dans combien de
bureaux de vote ? Nous nous pensons humblement qu’avoir un seul représentant,
bien formé (techniquement et psychologiquement) et bien traité (matériellement
et financièrement), dans 90 à 95% des bureaux de vote, est mieux qu’avoir 5 à 6
représentants moyennement formés, moyennement traités, dans peut-être 30 à 40%
des bureaux de vote.
Concernant la réticence que montreraient les militants de
certains partis vis-à-vis du candidat unique au premier tour alors qu’ils seraient plus enclins à le faire au second
tour, nous pensons que cela ne peut s’avérer que si certains partis politiques
ont développé la haine plutôt que la simple concurrence entre leurs partisans,
et je pense que ce n’est pas le cas ici. Et même si ce l’était, ce serait
valable au premier comme au 2eme tour, car la haine ne connait pas de tour.
En tout état de cause, je reste convaincu que le désir de
voir partir le régime en place dépasse toute adversité qui peut exister entre
les partis de l’opposition.
Il y a enfin quelque chose de très important qui était dit :
il faut des candidatures multiples, mais pas beaucoup de candidatures, des
candidatures sérieuses. Voilà le nœud de tout le problème : quand la vanne sera
ouverte, comment ferait-on pour séparer les candidatures sérieuses des non
sérieuses ? Comment arriverait-on à convaincre certains que leur candidature
n’est pas sérieuse et qu’il faut qu’ils les retirent, au moment où la
constitution le leur permet et au moment où ils verront 2, 3 ou 4 candidatures
au sein de l’opposition. ? On pourra ainsi se retrouver avec 20 candidatures «
non sérieuses ». Et si chaque candidature « non sérieuse » recueillait en
moyenne 0.25% des suffrages exprimés, cela ferait un total de 5% des suffrages
exprimés. 5% dans une élection comme celle-là, cela pourrait se révéler déterminent, on ne sait
jamais. C’est pour cela que nous nous pensons qu’il ne faut pas ouvrir. Quand
il y aura un seul candidat, qui ne se serait pas choisi, mais choisi par les
autres, on pourra s’y plier au nom de la discipline collective.
Venons maintenant à l’argument principal, qui établit que la
candidature unique n’est pas importante parce que l’opposition, d’après les
résultats successifs donnés par le pouvoir en place, ne serait pas détentrice
de la majorité absolue.
Nous pensons que se baser seulement sur cet argument pour
rejeter la candidature unique, c’est inconsciemment mépriser la dynamique
populaire que cela peut créer, c’est inconsciemment mépriser la mutualisation
des moyens que cette dernière peut permettre d’espérer, et par ricochet, la
certaine potentialisation des résultats de l’opposition, car il est plus facile
de changer les résultats, par exemple,
de 60% à 45%, que de 80% à 49,99 %.
Entre la candidature unique et les conditions de transparence, qu’est-ce qui est plus important ?
Les deux. Pour nous, les deux sont consubstantielles pour
deux raisons : la première est que, face à un pouvoir comme celui de Lomé 2,
aucun atout n’est négligeable, la deuxième est que, pour réclamer les
conditions de transparence, il faut un cadre, il faut une organisation, il faut
donc un porte-parolat. Le cadre de la candidature unique nous paraît le cadre
le plus simple, parce que dans un environnement où les intentions de
candidature sont déjà exprimées, le choix d’un porte-parole serait déjà un
exercice pas simple.
La candidature unique de l’opposition, face au candidat du pouvoir, n’a souvent pas marché. Quelles sont aujourd’hui les chances de réussite de cette initiative ?
D’abord, on n’a pratiquement jamais eu une véritable
candidature unique. La seule fois, c’est en 2005. C’est donc en tirant les
leçons de tout cela que nous avons fait notre proposition qui consiste à
choisir une personnalité apolitique pour porter le flambeau.
Les deux atouts principaux sur lesquels nous comptons pour la réussite de cette initiative cette fois-ci, c’est le caractère apolitique de l’origine de la candidature, avec surtout une personnalité plus ou moins acceptable par le régime en place, et le projet, à postériori, d’une transition de large ouverture politique.
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En dehors de ces deux principaux éléments, il y a d’autres
qui nous font dire que la présidentielle de 2020 serait une présidentielle
particulière, et qui sont à l’avantage des forces démocratiques tels que, les
réformes mal faites qui doivent galvaniser les populations à aller massivement
voter, l’historique 19 août qui fragilise psychologiquement les soutiens
diplomatiques du pouvoir, l’émergence du PNP qui a entraîné une scission électorale
préjudiciable au régime en place, les élections locales qui permettent à
l’opposition de contrôler aujourd’hui certaines communes, l’acquisition par
l’actuel chef de l’Etat d’une immunité constitutionnelle qui devrait le rendre
moins réfractaire à l’abandon du pouvoir…
Que pensez-vous des problèmes au sein de l’opposition à quelques mois de la présidentielle de 2020 ?
Nous, nous avons vu venir ces problèmes. C’est pour cela que
nous avons tiré la sonnette d’alarme depuis notre sortie du 23 juillet 2019.
Cela n’est donc pas une très grande surprise pour nous. Ce qui, par contre en
est une, c’est l’allure que les choses ont prises, c’est l’origine de la crise.
Ce n’est pas bien, cela n’honore guère l’opposition. C’est pour cela que nous
avons rendu public un communiqué pour appeler les uns et les autres à plus de
retenue. Aujourd’hui, Dieu merci, les choses se calment progressivement.
L’alternance, vous y croyez, à quelles conditions ?
Nous ne sommes pas Dieu pour savoir ce qui peut arriver
demain, mais nous croyons que la
stratégie gagnante, c’est celle d’une bonne organisation de toute l’opposition
autour d’une unicité de candidature.
Avec les candidatures déclarées, les chances d’une unicité de candidature ne s’amenuisent t- elles pas ?
Il est vrai que cela fragilise l’initiative. Nous avons dit
que notre cible principale, c’est l’ancienne C14. Donc tant qu’il n’y a pas de
congrès pour la désignation officielle d’un candidat au sein des partis ayant
composé la C14 première version, nous continuons par y croire. A ce jour, on
est encore au stade des intentions.
Georges Kouessan, candidat en 2020 ?
Georges Kouessan est président de parti et un parti politique doit participer à toutes les élections. Mais vu les conditions de notre pays, ce qui nous importe aujourd’hui, c’est le choix d’une personnalité apolitique pour une candidature unique.
Source: lanouvelletribune.net
Source : Togoweb.net