Littérature: Le Togo frappé par le syndrome d’abandon du livre

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Littérature: Le Togo frappé par le syndrome d’abandon du livre

L’intérêt pour la lecture baisse considérablement au Togo. Les libraires s’en plaignent, les bibliothécaires s’en inquiètent, les maisons d’édition s’en offusquent, même les éditeurs de journaux sont sous la menace de la faible vente. Un constat qui entraîne un taux en baisse des résultats scolaires. Les apprenants négligent la lecture qui est pourtant la clé du succès. Nous avons approché des maisons d’éditions, car étant dans le domaine de la production, mais aussi concernés directs, à savoir les étudiants pour plus sur ce phénomène. Le problème est réel, les solutions doivent être trouvées.

Facteur important de l’éducation, la lecture est la pierre angulaire de l’apprentissage. Elle est considérée comme le déterminant le plus important de la réussite d’un élève dans l’éducation et dans la société. Elle combat l’ignorance, aiguise l’esprit et nourrit l’âme. Bref, elle joue un rôle primordial dans la vie quotidienne.

En dépit de ces nombreux avantages, elle peine à plaire à une couche de personnes de toutes les catégories sociales ; jeunes, adultes, personnes âgées.

Joseph, étudiant en histoire nous explique les raisons de son désintéressement à la lecture : « les livres sont trop ennuyants, il faut lire plusieurs pages avant de cerner le message véhiculé. Je préfère suivre la télé ». Une autre, élève en classe de troisième, évoque dans la même optique de désintérêt : « Moi c’est Sandrine, des fois j’ai bien envie de lire, mais dès que j’ai le livre ouvert, je m’ennuie très rapidement ». C’est deux interventions, en plus d’autres personnes que nous avons interrogées résument en gros, le développement de l’oisiveté des jeunes face à la lecture. Ils ont plus tendance à accorder beaucoup plus d’intérêt aux écrans (Smartphone, télévision). Conséquences : La régression du niveau d’étude et de retard dans la société. Le constat est partagé jusque chez des éditeurs que nous avons contactés. « Celui qui ne lit pas, à peu de chance de s’en sortir à l’école et même dans la société » nous a confié Sébastien VONDOLY, Directeur des Editions Continents.

La lecture n’est pas que liée à l’épanouissement d’un individu. C’est aussi la culture d’un groupe d’individus, d’un peuple comme le dit SEWOVON Yao Sena, Directeur de communication des Editions Awoudy : « un peuple qui ne lit pas, est un peuple qui délit. La lecture n’est pas facultative, elle est impérative, elle nourrit l’âme » précise-t-il.

Beaucoup d’auteurs ont présenté la lecture comme la clé du développement, comme l’ouverture sur le monde. Le littéraire français François Mauriac disait que : « la lecture est une porte ouverte sur un monde enchanté. »

Le constat n’est pourtant pas identique dans les autres pays de la sous régions notamment la Côte d’Ivoire, le Benin où les jeunes sont réceptifs à la lecture

Par ailleurs, cette carence de lecture d’après les informations recueillies est aussi due à la pauvreté. Le niveau de vie du togolais moyen est trop faible pour lui permettre de se donner du loisir et du plaisir dans le livre. Les maisons d’éditions Graines de Pensées ont évoqué aussi cet aspect de la question : « les gens n’ont pas de quoi assurer le repas quotidien pour débourser 3000F à 10.000F CFA pour s’acheter nos livres. » Le même constat avait été fait par les Editions Continents qui pensent que leurs livres sont bien accueillis et appréciés pour la pertinence de leur contenu. Mais les acheteurs potentiels se heurtent à la question des moyens. Pour Vondoly, lorsqu’on a faim et qu’on pas les moyens pour vivre décemment, il est difficile de vouloir faire la lecture. Awoudy en ajoutera qu’il est difficile pour un élève de s’acheter un bouquin de 3000 F CFA ou 4000 F CFA, vu le niveau de vie des Togolais.

En somme, la situation générale du livre au Togo est vraiment catastrophique. Pourtant des jeunes qui s’en sortent bien en débats et discussions en société doivent leur talent aux livres: » moi quand je prend la parole, mes interlocuteurs sont attentionnés, parceque je puise des contenus des livres pour nourrir mes discussions » confie Aurélie, brillante en art oratoire. Pour elle le parcours des conte philosophiques de Voltaires aux comédies théâtrales de Molière, des poésies lyriques de……à la littérature engagée d’Albert Camus, la connaissance y est. « Je lis tout. Caméra Laye, cheikh Hamidou Kane, Aimé Césaire, Emile Zola ou même Socrate etc. Ca m’enrichit…la lecture c’est une partie de moi » confie t elle, le yeux brillants d’intelligence. Pourtant la majorité prend la lecture en ennemi face à la concurrence de la technologie.

Face à ce constat, des efforts doivent être entrepris pour sauver la connaissance.

Les maisons d’éditions, comme approches de solutions organisent des ventes foraines dans les établissements où sont vendus les livres à des prix dérisoires, dans le but de permettre aux élèves de s’en procurer.

Encore faut-il que ces livres soient réellement lus. Il incombe donc la tâche aux enseignants d’inciter les élèves à la lecture, en demandant les résumés des livres, en organisant les concours de dictées, d’art oratoire pour motiver les jeunes à la lecture.

L’Etat pour sa part doit implanter et alimenter des bibliothèques dans les écoles. C’est un travail d’ensemble qui s’impose au bénéfice de notre société.

Sinon, la menace est réelle. Nous connaîtrons une génération qui ne pourra s’inspirer des contenus des livres pour construire sa vie et son avenir avec la connaissance.

Diane Olobi (stagiaire)

Source : L’Indépendant Express

27Avril.com