L’Evêque de Dapaong compatit à la douleur des « files et filles de Mango »

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Dans un message, l’Evêque de Dapaong, Mgr Dominique Banléne GUIGBILE a compati à la douleur des fils et filles de Mango qui ont subi la répression militaire les 20 et 21 septembre dernier. Voici le message !

MESSAGE DE SOLIDARITÉ, DE COMPASSION ET DE PAIX AUX POPULATIONS DE MANGO EPROUVEES PAR LES VIOLENCES SOCIOPOLITIQUES

‘‘Seigneur, fais de moi un instrument de paix.’’
Bien chers Diocésains,
chers fils et filles de Mango,

C’est par cette prière de saint François d’Assise que je désire commencer ce message à votre endroit pour vous inviter à ne jamais céder à la tentation de la vengeance et de l’intolérance. « Ne vous laissez pas vaincre par le mal, mais soyez vainqueurs du mal par le bien » (Rm 12, 21).

En effet, Mango, une des villes de notre diocèse dont les limites géographiques correspondent à celles de la Région des Savanes au Nord Togo, a connu ces derniers jours du mois de septembre des moments sombres de violences inouïes. Des manifestations des partis politiques antagonistes organisées le même jour ont débouché sur des affrontements dramatiques des populations entre elles, et avec les forces de l’ordre et de sécurité ; c’est bien ce que les Evêques du Togo voulaient éviter en prévenant les leaders politiques de notre pays dans leur Déclaration du 14 septembre dernier.

Mon déplacement personnel sur les lieux m’ont fait découvrir que cette bataille rangée a fait d’énormes dégâts matériels : des maisons, des voitures, des motos, des boutiques, des étalages des commerçants ont été brûlés, vandalisés et pillés. En quelques heures des personnes et des familles entières ont vu se volatiliser des biens qu’elles ont mis des années à acquérir au prix d’intenses efforts et de durs labeurs.

Les dégâts humains sont également importants. On déplore de nombreux blessés, des arrestations suivies d’emprisonnements, des enlèvements, la fuite des populations pour trouver refuge hors du pays, et surtout des pertes en vies humaines : un enfant d’une dizaine d’années fauché par une balle perdue et deux jeunes morts par noyade dans le fleuve Oti.

Les populations de la ville de Mango et ses environs sont restées profondément choquées, traumatisées et meurtries par cette sorte de guérilla urbaine qui a duré plusieurs jours. Ces évènements malheureux ont fragilisé davantage la paix et la cohésion sociale déjà mises à mal par des tensions sociopolitiques à répétitions enregistrées ces dernières années. Un climat de psychose, de peur, de méfiance et de suspicion s’est installé au sein des populations, compromettant dangereusement leur aspiration fondamentale et légitime à la fraternité et au vivre-ensemble dans le respect de leur diversité.

En ma qualité de premier responsable du peuple de Dieu qui est dans la Région des savanes, j’exprime la compassion et la solidarité des pasteurs, des fidèles et des communautés chrétiennes de l’Eglise catholique à tous ceux et celles qui ont été touchés par ces évènements. En leur nom et au mien propre, je présente nos sincères et priantes condoléances aux familles éplorées. Tout en souhaitant une prompte guérison aux blessés, nous prions pour le retour rapide des réfugiés dans leurs familles respectives, avec l’espoir qu’ils ne seront pas systématiquement poursuivis.

Nous condamnons fermement ces violences aveugles d’où qu’elles viennent et exprimons notre profonde indignation face à cette manière brutale et atroce de se traiter entre concitoyens. Nous en appelons à la conscience de chacun et demandons qu’une justice équitable soit faite aux victimes ; que des innocents ne soient pas punis à la place des vrais coupables ; qu’un traitement humain soit garanti à tous, dans le respect des droits et de la dignité de la personne humaine.

Nous invitons enfin les uns et les autres à renoncer à toutes formes de violence pour s’engager résolument dans la voie exigeante de la vérité, du respect de l’autre, de la tolérance, du pardon et de la culture du vivre-ensemble, indispensables à la paix et à la cohésion sociale que tous les Togolais appellent de tous leurs vœux.

Oui, il est temps que le « plus jamais ça sur la terre de nos aïeux », (constamment souillée par le sang de ses enfants versé par leurs propres frères et sœurs) se réalise effectivement. Pour ce faire, il faut absolument désarmer nos cœurs des rancœurs destructrices et meurtrières qui minent la vie individuelle et empoisonnent les relations interpersonnelles et sociales.

Le caractère sacré de la vie de la personne humaine créée à l’image et la ressemblance de Dieu est une des valeurs fondamentales partagées par tous les togolais quels que soient leurs origines, leurs religions et leurs groupes d’appartenance. Ayons à cœur de préserver ce précieux patrimoine, en étant des constructeurs de paix, des promoteurs de la vie qui l’emporte sur la culture de la violence et de la mort.

Chers fils et filles de Mango, frères et sœurs en Christ, en Dieu et en humanité, je vous assure de la proximité et des prières de tous les membres de l’Eglise-Famille de Dieu qui est dans la Savane togolaise. Nous vous confions quotidiennement à la tendresse et à l’amour miséricordieux de Dieu, par l’intercession maternelle de notre Dame du Rosaire, consolatrice des affligés et Mère de l’espérance.

Que le Dieu de nos Pères et Seigneur de tendresse qui tient en ses mains le cœur des hommes et garantit les droits des peuples, aide tous les fils et les filles de notre cher pays le Togo, à œuvrer généreusement dans la vérité, la justice et l’équité, à la construction de la Cité terrestre dans sa marche vers la Cité céleste. AMEN.

Bien fraternellement dans le Seigneur et à son service.

Fait à Dapaong, le 4 octobre 2017,

en la mémoire de saint François d’Assise.

Mgr Dominique Banléne GUIGBILE

Evêque de Dapaong

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