L’Étonnante Comédie d’une Certaine Opposition au parlement Fantoche du Togo

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AImé Tchaboré Gogué de l'ADDI et Brigitte Djamagbo-Johnson de la CDPA/DMP

«…Le RPT/UNIR aura tout fait pour forger un système politique bâtard, qui lui permet de s’attribuer à tous les coups, tous les sièges de l’Assemblées nationale et de faire élire le chef de l’exécutif tous les six ans, par le parti majoritaire, donc le RPT/UNIR, un système qui offre une voie de contournement de la limitation des mandats et permet à Faure Gnassingbé de demeurer au pouvoir ad vitam aeternam. Au total, les Togolaises et les Togolais auront compris que dans le seul but de se maintenir indûment et indéfiniment au pouvoir, Faure Gnassingbé et le régime RPT/UNIR tentent de restaurer et d’institutionnaliser la dictature du parti unique, parti-Etat que le peuple togolais souverain a congédiée par l’adoption de la Constitution de 1992.» (Jean-Pierre Fabre, président national de l’ANC)

Après les mascarades électorales du 29 avril 2024 et après le non-évènement que constitue la promulgation de la nouvelle constitution du RPT-UNIR par Faure Gnassingbé, beaucoup de choses se sont passées. L’ANC a décidé que son seul «élu», Monsieur Jean-Pierre Fabre, n’aille pas sièger au parlement fantoche, les FDR, représentées par Dodji Apévon, réfléchissent encore, nous dit-on. Madame Brigitte Adamago, l’heureuse rescapée de la DMP, et le désormais chef de file de l’opposition Aimé Tchabouré Gogué, avec deux députés, le leader du parti ADDI, suivi de son collègue WONYRA Kossivi Paul, ont pris la surprenante décision d’aller faire de la figuration dans un supposé parlement à la Faure Gnassingbé. Droite dans ses bottes, la première responsable de la DMP n’est pas du tout gênée de se retrouver là avec des hommes et des femmes pas du tout élus, mais qui ne sont que le résultat d’un passage en force, désignés lors des mascarades du 29 avril 2024. Madame Adjamago n’est pas gênée d’avoir pris la décision d’aller siéger après avoir dénoncé la manière dont ces «élections» se sont déroulées et après en avoir rejeté les résultats. Elle va même plus loin en regrettant que tous les 5 «députés» de l’opposition, tolérés par Faure Gnassingbé et son entourage, n’y soient pas allés. «Nous avons raté une occasion à la veille de la session de droit de nous retrouver à 5, mais les discussions se poursuivent. Des gens ont raison de demander que nous harmonisons nos points de vue. Des efforts sont en train d’être faits dans ce sens et même au-delà de l’opposition parlementaire, il faut une harmonisation des points de vue. Il faut définir des stratégies communes pour prendre un nouveau départ dans cette lutte.»

Si des Togolais, poussés par le bon sens et révoltés par ce qui se passe d’inadmissible sur le plan politique dans leur pays, demandent à ce qui reste de l’opposition de se concerter pour harmoniser les différents points de vue, ce n’est pas pour que les 5 «députés», dont 4 chefs de partis, choisis par le pouvoir pour l’accompagner, aillent siéger. Pour définir «des stratégies communes pour prendre un nouveau départ dans cette lutte», comme le dit Madame Brigitte Johnson Adjamago, on ne va pas siéger pour aider le régime de dictature qu’on combat depuis des décennies, à améliorer son image souillée. Pour arriver à ses fins en se moquant encore une fois de l’opposition et surtout de ses chefs participationnistes, le pouvoir de fait du Togo, a bien pris soin de ne désigner que des présidents de partis, Jean-Pierre Fabre, Dodji Apévon, Brigitte Adjamago, Aimé Tchabouré Gogué, pour les mettre devant leurs propres contradictions et destabiliser le reste de l’opposition. Seules l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC) et les Forces Démocrtatiques pour la République (FDR) semblent avoir compris le petit jeu, en refusant d’aller cautionner la nouvelle constitution de Faure Gnassingbé. Tout argument qui tenterait d’expliquer ou de cautionner le fait que l’opposition devrait envoyer ses quelques «élus» faire face à 108 individus-marionnettes qui ne sont nommés que pour baliser la voie à Faure Gnassingbé pour un règne à vie, ne serait que tiré par les cheveux. Ce qui est encore plus surprenant, c’est quand des personnalités, qu’on n’attendait pas forcément sur ce terrain, essaient d’argumenter pour ne convaincre personne. C’est le cas de l’homme politique togolais installé en Allemagne, Dr Christian Spieker. Monsieur Spieker nous dit que l’opposition au parlement, bien qu’elle ne puisse pas faire grand’chose, pourrait au moins critiquer et dénoncer les décisions ou lois adoptées. Comme exemple, il cite la conférence de presse animée par Madame Adjamago pour informer sur ce qui s’est passé lors de la première session au fameux parlement. Donc pour Dr Spieker la lutte du peuple togolais pour se libérer des griffes de la dictature impitoyable des Gnassingbé depuis plus de trois décennies, se résume aujourd’hui, en 2024, à critiquer et à dénoncer, pendant que le régime de dictature togolais continue son petit bonhomme de chemin, avec tout ce que cela implique comme gabégies financières de toutes sortes, d’apauvrissement des populations, de violations massives des droits de l’homme, avec en prime l’impunité assurée aux criminels et aux voleurs autour du sérail. Pour l’homme politique togolais résidant en Allemagne, critiquer et dénoncer, sans que cela puisse affaiblir le régime en place, devraient suffire pour expliquer le bien-fondé de la présence de la représentante de la DMP et des deux «élus» de l’ADDI au parlement aux couleurs bleues. Bizarre quand même comme argumentation. Ceci nous renvoie au dicton populaire, «le chien aboie, la caravane passe». Aujourd’hui le travail de la vraie opposition togolaise qui cherche vraiment le départ de Faure Gnassingbé du pouvoir, devrait consister à résister de toutes ses forces contre l’illégal changement de la constitution togolaise qui fait passer notre pays à la 5e république. En tant que Togolais, où que nous soyions, nous avons le droit et devoir de montrer, par notre résistance, à celui qui se prend comme le dieu du Togo et à son entourage, qu’ils n’ont pas ce droit de toucher à la constitution qui reste exclusivement le domaine réservé du peuple souverain.

Il devrait être clair pour tout le monde, et surtout pour ceux qui ont décidé de se sacrifier pour prendre les devants de la lutte, que le Togo est toujours dirigé par un régime de dictature qui devient de plus en plus impitoyable. C’est pourquoi, malgré les ratés, côté opposition, inévitables dans une lutte contre une dictature militaro-tribalo-clanique, comme celle que nous avons au Togo, la priorité devrait consister à serrer les rangs au sein de l’opposition, à parler d’une voix et à montrer au pouvoir d’en face qu’on a un but précis: son départ. L’apparente démobilisation des populations togolaises, synonyme de manque d’engouement pour participer aux meetings ou à toutes autres manifestations, pourrait s’expliquer par le manque de clarté et d’homogénéité des priorités et surtout d’union au sein des leaders de l’opposition. Et on le voit justement après les fameuses élections législatives où les uns sont allés siéger dans un parlement taillé sur mesure pour le RPT-UNIR et Faure Gnassingbé, pendant que les autres ont pris la bonne décision de ne pas aller redorer le blason à un dictateur en perdition. Heureusement, l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC), lors d’une conférence de presse vendredi, 31 mai 2024, après avoir réitéré sa décision de ne pas aller cautionner cette inacceptable forfaiture, a, à travers son président national, Monsieur Jean-Pierre Fabre, tenu à corroborer davantage sa position: «L’ANC réitère avec force son total rejet du processus électoral du 29 avril 2024 émaillé de violences et de fraudes en tous genres ainsi que les résultats entièrement préfabriqués proclamés par des institutions partisanes et exige la reprise de ces élections… L’ANC réitère également et avec autant de force, son total rejet de la constitution «pirate» sortie de nulle part comme par magie, pour s’appliquer en lieu et place de la Constitution actuelle du 14 octobre 1992, encore légalement en vigueur…En outre, nul ne saurait obliger l’opposition à siéger à cette Assemblée au prétexte que c’est le peuple qui l’y a envoyée. Car le Peuple n’a envoyé personne à l’Assemblée nationale sous l’égide d’une constitution perfide qui ne le concerne pas et encore moins pour aller siéger en application de cette constitution, issue d’un coup d’Etat constitutionnel ubuesque…Enfin, il est totalement incohérent de rejeter sans appel la Constitution frauduleuse de Faure Gnassingbé et de siéger dans le même temps dans la nouvelle Assemblée que le RPT-UNIR tente de faire fonctionner sous l’empire de cette nouvelle Constitution.»

Voilà la position que l’opposition dans son ensemble devrait adopter pour dire non au changement unilatéral de la constitution togolaise pour que Faure Gnassingbé ne quitte jamais le pouvoir, pour dire non aux mascarades électorales, pour rejeter les résultats fantaisistes, préfabriqués que le RPT-UNIR s’est attribués; enfin pour refuser l’humiliation réservée aux partis politiques de l’opposition, avec seulement cinq (5) députés. Monsieur Jean-Pierre Fabre, dans la déclaration de son parti, exige la reprise des élections. Avec quelles lois électorales? Nous ne croyons pas que si d’aventure le scrutin était repris,- ce qui est improbable avec ce régime-, l’ANC acceptera d’y aller avec la même CENI, avec la même cour constitutionnelle, et surtout avec le même découpage électoral ségrégationniste que la formation orange a toujours dénoncé. Il s’agit aujourd’hui pour l’opposition et pour le peuple togolais de réclamer que tout soit remis à plat. C’est pourquoi nous parlons depuis longtemps d’amnistie générale, de libération des prisonniers politiques, de retour des exilés et de la tenue d’assises nationales. Beaucoup de compatriotes au Togo, comme Nathaniel Olympio du Parti des Togolais, et dans la diaspora, pensent et disent la même chose. Nous sommes conscients que Faure Gnassingbé et son entourage ne voudraient pas le faire volontairement pour perdre le pouvoir absolu qui est le leur aujourd’hui. Mais en étant unie, en parlant d’une voix, en sachant vraiment ce qu’elle veut, l’opposition togolaise pourrait réorganiser le peuple et faire pression sur le régime de dictature togolais. C’est pourquoi, ce n’est pas en allant siéger au parlement de Faure Gnassingbé pour faire de la figuration, et surtout pour conforter le dictateur dans ses dérives, qu’on pourrait mettre fin à la dictature. Nous espérons que du côté des trois «députés» de l’opposition qui siègent actuellement au parlement du RPT-UNIR, à savoir, Madame Brigitte Adjamago de la DMP, Tchabouré Aimé Gogué et WONYRA Kossivi Paul de l’ADDI, les pertinentes déclarations de l’ANC ne sont pas tombées dans les oreilles de sourds. Car il n’est jamais trop tard pour mieux faire. Rester en tant qu’opposition au parlement pour se limiter aux critiques et aux dénonciations pendant toute la durée de la législature, prendre plaisir comme Aimé Tchabouré Gogué le fait, en jouant au doyen d’âge, sans aucun impact positif sur la lutte contre la dictature, n’est qu’une perte de temps, synonyme d’une comédie qui ne dit pas on nom.

Samari Tchadjobo
Allemagne

Source : 27Avril.com