« Les détournements massifs de deniers publics, un véritable cancer dont souffre le Togo », Thomas Koumou

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« Les détournements massifs de deniers publics, un véritable cancer dont souffre le Togo », Thomas Koumou

Expert en économie et président de l’association « Veille économique », Thomas Dodji Koumou continue d’ausculter l’économie togolaise. Gestion de l’aide publique au développement, flux illicites sortis du Togo, santé budgétaire : ce sont des questions essentielles qui tiennent à cœur à ce citoyen hanté par le développement de son pays.

Bonjour à tous,

Pour tous ceux qui suivent nos publications relatives au financement de notre économie, nous avons examiné les montants issus des IFRI (714 milliards de FCFA), de la dette publique (1 375 milliards de FCFA), des crédits au secteur privé (5 011 milliards de FCFA), des dons issus de la coopération bilatérale (445 milliards de FCFA). Le total nous donne 7 545 milliards de FCFA. Nous poursuivons ce matin avec l’Aide Publique au Développement (APD) et les flux illicites sortis du Togo.

Rappel :

Nos principales références : (sources : Budgets nationaux 2015-2018, www.togoreforme.com ; rapports du FMI : N°08/370 de décembre 2008, N° 15/309 de novembre 2015, N° 17/127 de mai 2017, N° 17/122 de décembre 2017 ; rapports sur la zone franc, Togo 2005-2016 de la Banque de France) ; rapport de Global Financial Integrity (GFI), illicit financial flows to and from developing countries (2013-2015), rapports ITIE Togo 2010-2015.

L’Aide Publique au Développement (APD : dons et crédits) provenant de la coopération bilatérale

Les pays occidentaux et les partenaires financiers des pays africains (considérés comme pays à faibles revenus), sont intimement convaincus que la persistance de la pauvreté dans les pays africains, est due en grande partie à l’insuffisance de l’Aide Publique au Développement (APD). Et pourtant, cela fait des décennies que l’APD afflue en Afrique subsaharienne sans aucun résultat probant. Selon le rapport de 2016 sur la zone franc, publié par le Banque de France, les montants totaux de l’APD en direction de la zone UEMOA, de la zone franc et de l’Afrique subsaharienne, entre 2009 et 2015, sont respectivement estimés à 41 610 milliards de FCFA, 54 355 milliards de FCFA et 288 382 milliards de FCFA. Soulignons en passant, qu’avec 8 pays, l’UEMOA a bénéficié de 14,42% de la totalité de l’APD destinée à l’Afrique subsaharienne sur la période.

Dans le même rapport, il est mentionné que les principales priorités de l’APD demeurent l’accès aux services publics de base (éducation, santé, gouvernance etc.), qui représentent en moyenne entre 2009 et 2015, 40% de l’APD. Le développement économique qui fait également partie des priorités des donateurs, représente en moyenne environ 17% sur la période. En examinant l’état des objectifs cités, en considérant les données du Togo (dans le document à paraitre de Veille Economique), on se demande à quoi a servi l’APD durant cette période.

En mettant l’accent sur le rôle de l’APD suite au processus d’allègement, les experts de la Banque de France estiment, dans le même rapport, que : “Si ces annulations de dette obtenues avaient pour objectifs de restaurer la solvabilité des pays pauvres, de conforter la lutte contre la pauvreté et d’encourager le développement économique, elles ne doivent pas pour autant déboucher sur un nouveau cycle de réendettement rapide et potentiellement déstabilisant”. Nous constatons avec regret que c’est malheureusement ce qui est advenu au Togo.

La moyenne de l’APD en destination du Togo entre 2009 et 2015, est estimée à 142 milliards de FCFA. Sur la période, le Togo a bénéficié de 854,17 milliards de FCFA au titre de l’APD (dons +crédits). Dans notre évaluation finale portant sur le montant total qui a financé notre économie sur la période d’étude, nous n’avons pas pris en compte l’APD. Nous estimons que ces montants figurent déjà au niveau de la dette publique et des dons.

Les flux illicites sortis du Togo sur la période

Les détournements massifs de deniers publics organisés sous différentes formes, constituent le véritable cancer dont souffre notre pays et représentent un des freins majeurs à la réalisation d’une croissance forte et durable. Au-delà des nombreux scandales révélés par les professionnels des médias dans notre pays et qui ne font l’objet d’aucune poursuite judiciaire, les rapports de l’ONG américaine Global Financial Integrity (GFI), permettent d’avoir une idée plus ou moins claire des ressources qui sortent du canal officiel d’enregistrement de l’état. Nous voulons préciser, pour ceux qui l’ignorent, que les flux illicites, sont constitués de toutes les sorties financières privées non comptabilisées, impliquant des capitaux acquis, transférés ou utilisés illégalement. Ces capitaux sont généralement utilisés par les résidents pour accumuler des actifs à l’étranger en contravention des contrôles de capitaux et des cadres réglementaires applicables. Ainsi, même si les fonds gagnés sont légaux, tels que les bénéfices d’une entreprise légalement constituée, leur transfert à l’étranger en violation des règles de contrôle des changes ou des lois sur l’impôt sur les sociétés (IS) rendrait le capital illégal.

Pendant que les partenaires mettaient 288 382 milliards de FCFA au titre de l’APD entre 2009 et 2015, à la disposition des pays de l’Afrique subsaharienne, environ 354 362 milliards de FCFA de flux illicites sont sortis de la même zone entre 2004 et 2013.

Pour ce qui concerne le Togo, le montant total de flux illicites sortis du pays entre 2002 et 2014, est estimé à 28 935 millions $ us soit environ 15 190 milliards de FCFA. Dans le cadre de notre évaluation, la valeur des flux illicites sortis du Togo sur la période considérée (2010-2014) est estimée à 6 422 milliards de FCFA.

Selon les Nations unis, les flux illicites constituent une source majeure de fuite des ressources domestiques, qui drainent les devises, réduisent les recettes fiscales, restreignent les investissements étrangers et aggravent la pauvreté dans les pays en développement les plus pauvres (sources : rapport de GFI de décembre 2013 sur les IFF from developing countries 2002-2011). Nous tenons à préciser également, que cette évaluation de 6 422 milliards de FCFA, ne prend pas en compte les ressources issues du produit du trafic de stupéfiants, du trafic d’êtres humains et d’autres activités criminelles qui sont souvent réglées en espèces. Nous programmons écrire un document sur les détournements de fonds par le biais des flux illicites au Togo.

A ce stade, nous avons le financement IFRI (714 milliards de FCFA), la dette publique (1 375 milliards de FCFA), les crédits au secteur privé (5 011 milliards de FCFA), les dons issus de la coopération bilatérale (445 milliards de FCFA), les flux illicites sortis du Togo (6 422 milliards de FCFA). Le total nous donne 13 967 milliards de FCFA.

A suivre……

Puisse la Divine providence veiller sur nous et marcher à nos côtés.

Thomas Dodji Nettey KOUMOU

Veille Economique

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