Par Pierre S. Adjété
Sous la bannière de la démocratie, «Il faudra peut-être songer un jour à couper les deux bouts de l’omelette pour que les gens raisonnables gouvernent ensemble et laissent de côté les deux extrêmes qui n’ont rien compris du Togo» disons-nous, aujourd’hui encore, pour paraphraser Alain Juppé. C’est aussi cela l’échec de Faure Gnassingbé : n’avoir pas su réconcilier le Togo en un tour de mandat, n’avoir pas su succéder à son père autrement que par la continuité d’une gouvernance désuète en brutalité et en clientélisme ; n’avoir jamais su précipiter le Togo dans la modernité.
Les jours passent, et le Togo recule désespérément. Comme dans l’éducation des enfants, les citoyens aussi apprennent par l’exemple de leurs dirigeants. Obnubilé par les friandises du pouvoir, Faure Gnassingbé ne fait pas exemple ; il n’a jamais su quoi faire de noble, et de déterminant, à la tête du Togo. Le résultat est lamentable : une douzaine d’années pour rien, et même la destruction du dialogue sociopolitique entre toutes les solitudes togolaises. Le Togo reste figé !
Mais la question togolaise n’est pas une question de division ethnique ou d’antagonisme politique. Le problème togolais est celui, clair et sans équivoque, centrale et sans extrême, de la compétence politique et de l’audace républicaine. Faure Gnassingbé ne possède ni l’un ni l’autre ou n’en a donné la preuve suffisante, douze années durant.
À l’école du pouvoir, aux côtés de son père Gnassingbé Eyadema, Faure Gnassingbé n’aura manifestement retenu que le mutisme, la tromperie et la brutalité en politique, en plus de ne pas aimer la contradiction jusque dans son prétendu cercle de confiance. En ces temps nouveaux, il faudra beaucoup plus que la distribution de l’idolâtrie encapsulée pour servir le Togo. Tout bouge partout. Le Togo ne peut échapper au permanent changement des choses et des êtres.
La démocratie sauve… Le temps presse… Le monde change
En politique, rouler et enfariner ses adversaires est une voie non pérenne, sans aucune issue et avec nul lendemain. Autant, manquer d’arguments et n’exhiber que la force de sa position transforme, très rapidement, les proches en aplatis courtisans et en fieffés Adowuinon. D’ailleurs, tout le monde se rabat sur le Togo pour des affaires et des choix de carrière, non pas parce que le Togo va bien, mais parce qu’il y a à manger jusqu’à confondre ventres et tambours.
Faure Gnassingbé a échoué de restituer la dignité humaine aux Togolaises et aux Togolais, en comparaison avec les peuples frères voisins du Bénin, du Burkina Faso et du Ghana. Un peuple à dignité bafouée est un peuple en colère. Dans les circonstances, le meilleur service à offrir à Faure Gnassingbé est de lui faire la démonstration que son pouvoir n’a d’avenir que dans l’audace de la renonciation aux indolences de l’inaction et de l’indécision, et au profit d’un appel franc et sincère au Grand Pardon ; lequel reste un acte éthique d’humilité, plutôt que de simples paroles incantatoires.
Le modèle togolais de renaissance reste à inventer. Pour autant, il ne s’agit pas de réinventer la roue : tant d’exemples existent à nos portes mêmes. L’avenir du Togo est probablement hors de vision de Faure Gnassingbé qui ne semble plus être partie lié au pays qu’il dirige. Le modèle togolais à assumer reste dans l’engagement de Faure Gnassingbé à passer à l’histoire aux côtés du peuple togolais lui-même. Aucune autre issue n’existe. Le salut de Faure Gnassingbé réside dans son adhésion, sans restriction aucune, à la démocratie pure, toute la démocratie, rien que la démocratie au Togo. Le monde a changé. Depuis lors, seule la démocratie peut sauver durablement.
Du Nord au Sud, dans l’opposition comme dans les rangs de son parti auquel chacun adhère rien que pour se protéger de la brutalité du régime et pour se sucrer le bec, Faure Gnassingbé doit concevoir que l’avenir réside dans la dissidence et dans le courage de la transgression des règles obsolètes d’un Togo périmé. Le temps presse. Faure Gnassingbé doit se rendre à l’évidence que c’est à lui de s’adapter au Togo qui bouillonne de partout, et non demander le contraire. Tous ces bruits grinçants que tout citoyen entend, c’est le Togo Faure Gnassingbé qui se déboulonne. Immanquablement, un autre Togo se lève.
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