Le contraste «Faure» : Médiateur et « impopulaire » chez ses pairs

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Le contraste «Faure» : Médiateur et « impopulaire » chez ses pairs

Alors qu’il chapeaute actuellement la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’ouest (Cedeao) dont il assure la présidence en exercice depuis juin 2017, Faure Gnassingbé est, aussi paradoxal que cela puisse paraître, très contesté au pays. Le pouvoir de Lomé reste ébranlé, depuis trois mois, par des mouvements de contestation populaire dans presque toutes les villes du pays. Cette situation inconfortable semble jeter du discrédit sur le mandat du président en exercice de la Cedeao.

Faure Gnassingbé au chevet de la Guinée Bissao

Les 1er et 2 décembre derniers, une délégation de diplomates de l’espace communautaire ouest africain a séjourné à Bissao, capitale de la Guinée Bissao. Conduite par le Chef de la diplomatie togolaise, Prof. Robert Dussey, cette mission était mandatée par le Chef de l’Etat togolais, Faure Gnassingbé, actuellement Président en exercice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO). Il était question pour cette mission, de porter un message de Faure Gnassingbé aux acteurs politiques de ce pays en proie à une profonde crise politique qui dure des années déjà. Les échanges ont tourné autour de l’Accord de Conakry qui, signé en juin 2017, n’a pu permettre aux acteurs politiques de parvenir, dans les trois mois qui suivent, à une sortie de crise consensuelle, comme prévue.

A ce jour, la mission a relevé qu’aucun plan n’a été élaboré par les autorités locales, comme convenu. Par conséquent, le pays vit au quotidien des violences policières à ne point finir. D’où justement l’exhortation de la mission aux différentes parties à respecter les libertés publiques, notamment le droit de manifester pacifiquement. Tout en soulignant la nécessité urgente d’œuvrer à la mise en œuvre effective des accords de Conakry, la délégation rendra compte de cette mission lors des prochaines réunions statutaires de la CEDEAO, prévues du 12 au 16 décembre prochains à Abuja au Nigeria. Le paradoxe «Faure».

Faure Gnassingbé serait, en effet, applaudi sur le coup s’il ne se confrontait pas à un paradoxe saisissant. Le fils d’Eyadema vit depuis le 19 août dernier, une crise politique des plus sérieuses depuis les années 90. L’opposition réclame le retour à la Constitution de 1992 et le droit de vote à la diaspora. Des réclamations qui devront se décliner, en cas d’effectivité, par la limitation du mandat présidentiel à deux et un scrutin uninominal à deux tours. Si le pouvoir de Lomé ne semble pas s’opposer à cette revendication, il ne semble néanmoins pas favorable au principe de la rétroactivité qui implique le départ de Faure Gnassingbé du pouvoir en 2020. Voilà le fond de la crise qui, après trois mois de contestations populaires et répressions policières avec des conséquences dramatiques, devra finalement se dé- nouer, dans les jours qui viennent, autour d’une table de discussion.

Malheureusement, c’est un président très contesté dans son pays qui, du haut de son titre de président en exercice de la Cedeao, se mue dans la posture de «sauveur» dans un autre pays. Ce qui relève de l’intrigue et surtout, d’un paradoxe très saisissant. Ici, ce ne sont pas les compétences ou encore la capacité de Faure Gnassingbé qui sont mises en doute. Il s’agit plutôt d’une situation conjoncturelle qui va en défaveur du fils du Général Eyadema. Ces détracteurs, surtout, l’opposition Bissao guinéenne n’accorderont aucun crédit à ce médiateur qui a visiblement du mal à apaiser la tension sociopolitique dans son propre pays.

Le règlement d’une crise politique n’étant pas une affaire de baguette magique, Faure Gnassingbé gagnerait plus à vite trouver une solution à la crise sociopolitique qui le malmène dans son pays depuis trois mois. Cela donnera plus de poids à ses médiations aux yeux de l’opinion qui, pour l’heure, ne croit qu’à une farce.

Source : www.icilome.com