Le Vatican refuse de valider la candidature de Johnny Ibrahim à l’ambassade du Liban près du Saint-Siège, en raison de son appartenance à la franc-maçonnerie, selon le quotidien italien Il Messaggero,.
Pour devenir le nouvel ambassadeur près du Saint-Siège, le gouvernement libanais avait choisi Johnny Ibrahim, 48 ans, consul général à Los Angeles (États-Unis) depuis 2012, marié et père de 3 enfants. Celui-ci devait succéder à Georges El Khoury, en poste au Vatican depuis 2008.
Mais selon le quotidien italien Il Messaggero, le pape François aurait refusé de donner son approbation pour cette nomination. Et ce pour deux raisons. D’une part, parce que le nom de Johnny Ibrahim a été divulgué dans des médias locaux et les cercles ecclésiastiques avant que le Saint-Siège ait donné son « agrément ». Or de telles fuites, qui vont à l’encontre des protocoles diplomatiques, sont généralement interprétées de manière négative.
D’autre part, parce que Johnny Ibrahim serait engagé dans la franc-maçonnerie, une société fermée à l’égard de laquelle le pape François s’est toujours montré très critique.
Les « lobbys de la cupidité »
Ainsi, dans l’avion de retour des JMJ de Rio de Janeiro, en juillet 2013, le pape s’était fermement opposé aux groupes de pression infiltrant l’Église, dénonçant « les lobbys de la cupidité, les lobbys politiques, les lobbys maçonniques ».
De même, lors de sa visite apostolique à Turin, en juin 2015, pendant son discours aux jeunes, le pape argentin avait critiqué l’influence des francs-maçons et leur hostilité envers l’Église?: « À la fin du XIXe siècle, il régnait les pires conditions pour le développement des jeunes?: la franc-maçonnerie était en plein essor, l’Église ne pouvait faire quoi que ce soit, il y avait des anticléricaux, il y avait aussi des satanistes… C’était l’un des pires moments et l’un des pires endroits de l’histoire de l’Italie. »
De source diplomatique au Liban, on confirme la raison de ce refus du Saint-Siège. De son côté, le consul Johnny Ibrahim a admis faire partie de la franc-maçonnerie, en précisant toutefois ne plus y être impliqué « depuis longtemps ».
« En état de péché grave »
La position officielle de l’Église à propos de la franc-maçonnerie n’a pas varié ces dernières décennies. Le 23 novembre 1983, le cardinal Joseph Ratzinger avait affirmé?: « Les fidèles qui appartiennent aux associations maçonniques sont en état de péché grave. » Et le 23 février 1985, celui qui était alors à la tête de la Congrégation pour la doctrine de la foi avait précisé?: « Une telle appartenance constitue objectivement un péché grave ».
Tandis que, selon l’ancien Code de droit canonique de 1917, les catholiques affiliés à la franc-maçonnerie encouraient « ipso facto » l’excommunication (canon 2 335), le nouveau Code de 1983 ne mentionne plus expressément la franc-maçonnerie. Il se contente d’énoncer?: « quiconque adhère à une association qui agit contre l’Église doit être puni d’une juste peine mais quiconque soutient ou dirige une telle association doit être frappé d’interdit » (canon 1 374).Ainsi, les catholiques qui adhèrent à la franc-maçonnerie ne sont-ils plus automatiquement excommuniés comme autrefois. Toutefois, en mai 2013, un curé de Haute-Savoie, qui appartenait à une loge du Grand Orient de France, a été démis de ses fonctions par l’évêque d’Annecy, Mgr Yves Boivineau, à la demande de Rome.
Les motifs essentiels pour lesquels l’Église continue de condamner la franc-maçonnerie sont au nombre de quatre?: le naturalisme (non pas tant nier l’existence de Dieu que refuser d’en tirer les conséquences)?; l’anticléricalisme et le laïcisme?; le relativisme doctrinal (la franc-maçonnerie proclame la relativité de toute vérité, ce qui a pour conséquence, sur le plan religieux, le refus de tout dogme et de toute révélation)?; et enfin le secret maçonnique (un franc-maçon étant censé ne jamais dévoiler, pas même en confession, ni l’identité de ses frères ni le contenu des travaux de sa loge).
Mais certains évêques font preuve d’ouverture sur cette question, notamment Mgr Jean-Charles Thomas, évêque émérite de Versailles, qui avait publié une étude en 1994 à ce sujet et qui prône un « dialogue librement consenti entre des responsables de l’Église catholique et des obédiences maçonniques pour permettre l’écoute mutuelle aboutissant à une vraie connaissance réciproque, sans jugement préalable ».
Selon Mgr Thomas, « le fidèle éclairé doit réfléchir sérieusement aux risques qu’il court en acceptant l’initiation à une loge maçonnique?: il lui appartient, ainsi éclairé, de s’appliquer éventuellement la sanction de ne pas communier s’il a conscience d’avoir librement, volontairement, prit une décision qui le mettait en état de rupture grave avec Dieu ».
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