L’Afrique, ou la société politique du chaos permanent [Tribune]

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La mort du président Tchadien Idriss Déby Itno, suivie de sa succession par son fils, en violation des dispositions constitutionnelles, rappelle à notre réalité que la plupart de nos états en Afrique demeurent des jungles politiques. Oui l’Afrique demeure une jungle, non pas parce que celle-ci couvre certaines parties du continent. L’Afrique demeure une jungle du fait que seule la volonté du plus fort compte. La volonté du plus fort n’est même pas égale à la loi, elle en est au-dessus, en l’espèce ici au-dessus de la constitution.

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Pour certains, cette violation dans le cas du Tchad peut se justifier par la situation sécuritaire qui prévaut au Sahel et le rôle important que joue l’armée tchadienne dans le maintien de cette fragile stabilité. Ce raisonnement porte en lui-même le germe de sa contradiction.

Déjà le pouvoir central au Tchad sous Déby était menacé par une rébellion qui conteste la légitimité de ce dernier qui n’offrait aucune perspective démocratique de prise de pouvoir par un processus inclusif. D’ailleurs, Déby lui-même n’est-il pas venu au pouvoir par les armes ?

En avalisant encore une prise de pouvoir par l’armée en violation de la constitution, le message envoyé au rebelle est clair : Si votre puissance de feu arrive à surpasser celle du pouvoir central, nous prendrons acte et nous composerons avec vous au nom d’une politique dite du « réel ».


C’est à croire que quand il s’agit de l’Afrique, le réel et la loi se trouvent dans deux univers parallèles. Qui donc a appris aux africains qu’on ne doit pas respecter la loi pour un motif tiré d’un prétendu réalisme ? Si donc la loi échappe au réel, pourquoi se donner la peine de l’édicter ? Ou alors, édictons des lois qui collent au réel. Dans le cas du Tchad, le président du Sénat aurait dû assurer l’intérim quitte à se faire entourer de militaire pour constituer un cabinet et suivre leurs recommandations dans la prise de décision. En principe rien n’empêche cela. Sauf peut-être l’irrévérence de nos dirigeants quant au respect de la loi.

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Tout ceci contribue au chaos permanent. Si les rebelles existent, c’est parce qu’ils savent qu’ils seront bien accueillis au nom de ce réalisme qui foule au pied toutes lois, par la communauté nationale mais surtout internationale.


L’Afrique doit se ressaisir. Ces crises permanentes ne sont pas politiques mais plutôt civilisationnelles. Quel type de société voulons-nous bâtir ? Une société du chaos permanent à chaque disparition de l’homme fort qui prend son pays en otage en attendant le prochain homme fort qui prendra la relève? Ou devons-nous bâtir une civilisation de droit où le respect de la loi et donc de la pratique institutionnelle prime sur toute autre considération ?

Boris Toble


Source : Togoweb.net