Désertion au sein de l’Armée Togolaise : Plus de 400 soldats ont quitté les rangs en 2018

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Désertion au sein de l’Armée Togolaise : Plus de 400 soldats ont quitté les rangs en 2018

Que se passe-t-il au sein de la grande muette au Togo ? Silencieusement, mais assurément, de plus en plus d’hommes abandonnent de façon brutale le métier des armes et prennent la clé des champs. Et contrairement à ce qui se dit, ils sont très nombreux à avoir fui. Une situation qui met très mal à l’aise le régime. Surtout que tout ce beau monde connait le maniement des armes.

Combien sont-ils à avoir franchi les frontières de tous côtés pour ne plus avoir à traiter avec la hiérarchie militaire togolaise ? Quelles sont les causes de ce désamour de tant de soldats envers le drapeau togolais ? Ces interrogations surgissent après que nous avons échangé avec ceux qui peuvent dire avec exactitude les conséquences du malaise qui secoue l’armée togolaise.

Lorsqu’on prend en compte l’armée, la Gendarmerie nationale, la Police et l’administration pénitentiaire, ils sont environ plus de quatre cents soldats togolais à avoir déserté dans des conditions peu rassurantes. Surtout pour le régime qui n’aime pas se voir opposer des arguments de persuasion. Aussi, l’effectif annoncé par La Lettre du Continent il y a quelques mois est très loin de la réalité.

Au Togo, policiers, gendarmes, militaires, gardiens de l’administration pénitentiaire ne sont pas autorisés à obtenir de passeport. Tous ceux qui partent en missions de maintien de la paix voient leur pièce d’identité de service retirée à leur arrivée sur les zones de conflits. Et une fois la mission terminée, la hiérarchie au pays collecte les passeports dès qu’ils foulent le sol, au niveau de l’aéroport. Il arrive que des hommes en treillis soient réformés. Même en retournant à la vie civile, la Direction générale de la documentation nationale (DGDN) n’est pas autorisée à délivrer de passeport à tout réformé. Comme s’ils étaient marqués à vie. Pas de congé annuel pour les militaires, ni de permissions autorisées en cas de décès d’un parent où d’un membre de leur famille.

Parmi tous les corps habillés de l’armée togolaise, les bérets verts sont traités comme des moins que rien sur tous les plans, sans considérations, comme des bêtes et des sous hommes par leurs hiérarchies.

La gestion des carrières constitue un autre motif de frustration. Au sein de l’armée togolaise, ne montent en grade que ceux qui sont dans les bonnes grâces de leurs supérieurs, de manière générale. Mais plus spécifiquement, l’armée et la Gendarmerie sont des corps claniques et ethnicisés. Et le jour qu’on permettra un classement selon les préfectures du pays, tout le monde connaîtra la vérité sur les inégalités qui ont cours au sein de la grande muette togolaise.

Un élément non moins négligeable est la peur généralisée et savamment instillée dans les veines de ceux qui se savent non originaires du village natal de Faure Gnassingbé. Car il faut appeler les choses par leur nom: il existe la hiérarchie au sein de la hiérarchie militaire. En français facile, ce ne sont pas souvent les décisions prises par tous les officiers supérieurs qui ont la primauté dans leur exécution. Mais seulement les décisions émanant des officiers proches du village du chef de l’Etat.

Dans des cas d’accidents, nombreux sont les militaires qui sont abandonnés à leur famille, sans ressources. Les cas de décès sont également source de traumatisme pour ceux qui apprennent la mort de leurs collègues et réalisent qu’aucune mesure idoine d’accompagnement n’est offerte aux veuves et orphelins. Comment alors, en mettant tous ces éléments les uns à la suite des autres, ne pas s’indigner et chercher d’autres voies de survie dans la vie ?

Le mardi 18 décembre par vote anticipé, beaucoup croyaient que les résultats chez les hommes en treillis seraient différents, mais hélas ce sont les bulletins nuls qui ont encore dominé. Au sein de la grande muette togolaise, les grognes, mépris et mécontentement ont fait que plus de 53% des Forces Armées Togolaises (FAT) ont voté le bulletin nul pour les élections législatives du 20 décembres 2018. Un signe de désarrois qui prouve que la plupart des hommes en tenue sont vraiment aussi fatigués comme le reste de la population togolaise de la gouvernance des Gnassingbé et son clan depuis plus d’un demi-siècle. La grande muette aussi aspire au changement, à la démocratie et à l’alternance.

Aujourd’hui, les Agèmba et Aguim du RCGP, Gendarme Prince Agbodjan, Blédjé Edem, Pré Wilfried, Moussa, Kalémao tous de l’ANR sont loin, sans possibilité pour le régime de les pister et de suivre leurs mouvements. Et que dire des centaines d’autres éparpillés et sans données géographiques ? La grande muette togolaise est en proie à un mouvement de désertion sournoise que les autorités peinent à dévoiler, mais qui les rend très perplexes.

Nous interpellons et invitons le premier magistrat du Togo, qui est aussi le chef des Forces Armées Togolaises et ministre de la Défense a prendre sérieusement en compte la situation de désertion qui prévaut au sein des corps habillés./.

Alex Koffikan

Source : La Nouvelle N°0039 du 15 Janvier au 15 Février 2019

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