Des manifestations au Togo / la panique au gouvernement de Faure

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La tenue des manifestations organisées par l’opposition a toujours créé de l’urticaire intellectuelle chez les tenants du pouvoir. Ils ont toujours cherché des prétextes pour les empêcher et même les réprimer. Parmi les motivations mises en avant, les impacts ou préjudices de ces manifestations pour le reste de la population, notamment sur la libre circulation ou les activités économiques des autres citoyens.
 
Et on n’hésite pas à réprimer pour si peu, même dans le sang. Mais à contrario, pour de petits desseins politiciens, le pouvoir Faure Gnassingbé se laisse aller à des mesures mille fois plus nuisibles. Pendant qu’on ne veut pas voir l’opposition occuper pendant quelques minutes la nationale N°1, on se permet de couper l’Internet, un outil d’affaires aujourd’hui durant cinq (05) bons jours…
 
Pas question d’occuper de la nationale N°1 pendant quelques minutes
 
Le pouvoir a toujours trouvé à redire sur les manifestations organisées par l’opposition pour dénoncer ses travers. Il prétexte souvent les préjudices pour les autres citoyens non manifestants pour soit imposer d’autres itinéraires, soit les empêcher ou carrément les réprimer dans le sang. Tantôt, c’est l’alibi de la libre circulation qui serait entravée pour le reste de la population qui est brandi, tantôt c’est celui de jour ouvrable et donc d’entraves aux activités, tantôt encore l’argument de l’occupation de la nationale N°1 qui bloquerait les affaires. C’est justement ce dernier prétexte qui a motivé la répression barbare et meurtrière des manifestations organisées par le Parti national panafricain (PNP) le samedi 19 août 2017.
 
Occupation de la nationale N°1, entrave à la circulation sur cet axe et aux activités socioéconomiques. Tel est l’argument massue opposé à Tikpi Atchadam et les siens, mieux, le procès qui leur était fait par les ministres de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités locales, Payadowa Boukpessi, et de la Sécurité et de la Protection civile, Yark Damehame, lorsque les militants du PNP devraient marcher ce 19 août à Lomé et dans quatre (04) autres villes de l’intérieur du pays, à savoir Kara, Sokodé, Bafilo et Anié. En clair, les deux ministres feignaient d’être très préoccupés par le bien-être du reste de la population.
 
Déjà l’argument ne tient pas la route. La loi sur les manifestations publiques ne donne pas ce droit à l’autorité d’imposer d’autres itinéraires, mais il lui est juste demandé d’encadrer la manifestation, mieux, d’en assurer la sécurité. D’ailleurs l’occupation de la nationale N°1 n’est juste qu’un prétexte à la limite du mensonge, car dans certaines villes, les manifestants ne devraient emprunter cet axe que l’instant de quelques minutes ou tout au plus une heure ou deux, pour chuter dans des espaces publics bien déterminés où des meetings devraient se tenir. A Lomé par exemple, ils ne devraient qu’emprunter qu’une voie de la nationale N°1 au niveau d’Agoènyivé, laissant ainsi les véhicules passer par la seconde.
 
C’était visiblement un abus d’autorité que de vouloir imposer d’autres itinéraires au cortège. Mais lorsque les responsables du PNP ont refusé d’obtempérer (sic) et leurs militants se sont « entêtés » ce samedi 19 août, ce qui devrait arriver, arriva. Ce sont des policiers, gendarmes et militaires qui ont été déployés à leurs trousses et ces derniers n’ont pas fait dans la dentelle. Grenades lacrymogènes, eau chaude, tirs à balles en caoutchouc, à balles réelles, matraques…tout y était passé. Mêmes procédés dans les autres villes du pays où les manifestations ont eu lieu. Le bilan, on le connait : plusieurs dizaines d’arrestations, de blessés, mais surtout deux (02) vies gratuitement enlevées.
 
Coupure de l’Internet durant 5 jours !
 
Les manifestations de la coalition de l’opposition qui ont eu lieu les 6 et 7 septembre derniers se sont aussi soldées par des arrestations et des blessés, mais heureusement pas de mort enregistrés. Mais l’autre impact de ces manifestations, ce n’est pas l’occupation de la nationale N°1 et l’entrave à la circulation et aux activités économiques des autres citoyens, toutes choses que l’on pourrait mettre sur le dos des organisateurs, mais la coupure de la connexion Internet mobile décidée par ceux qui jouent aux protecteurs des intérêts de la population. Pas durant quelques minutes ou heures, le temps des manifestations, mais pendant cinq (05) jours pleins.
 
Il faut déjà le relever, cette coupure de l’Internet est une censure, donc une violation des droits des citoyens. Elle viole une résolution datant du 1er juillet 2016 du Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies dont le Togo est malheureusement membre depuis le 1er janvier 2016, et devenue une décision référence. « Le Conseil condamne sans équivoque les mesures qui visent à empêcher ou à perturber délibérément l’accès à l’information ou la diffusion d’informations en ligne, en violation du droit international des droits de l’Homme, et invite tous les États à s’abstenir de telles pratiques et à les faire cesser (…) », y lit-on.
 
Au sein du sérail, on peine à parler d’une même voie sur les motivations de cette mesure. Pendant qu’au sommet du gouvernement, on prétexte des travaux de réaménagement sur les lignes, l’une des « fortes gueules» du régime argue d’un enjeu sécuritaire. Mais personne n’est dupe, cette mesure inique est prise juste pour de petits desseins politiciens. Il s’agit d’empêcher les Togolais de publier instantanément les images de la mobilisation pour montrer l’impopularité du pouvoir en place et surtout celles de la répression sauvage qui illustrent la face puante du régime.
 
Coupée le mardi 5 septembre dans la nuit, soit la veille du début des manifestations, la connexion n’a été remise que le dimanche dans la soirée. Ici, on n’a vraiment pas pensé au bien-être ou aux intérêts du reste de la population non manifestante. Ce sont tous les Togolais, sans distinction, qui ont été privés de l’Internet durant ces longs jours. Et Dieu sait les pertes que cela aura engendrées. D’abord pour les deux sociétés fournisseurs d’accès Internet (FAI) elles-mêmes qui auront énormément perdu en vente de forfaits Internet aux abonnés, le préjudice doit être lourd. Ensuite pour les abonnés qui sont restés sevrés d’informations, coupés de leurs contacts. Et enfin pour les opérateurs économiques pour qui la connexion Internet est un outil d’affaires. Nombreux sont restés coupés de leurs fournisseurs ou clients durant autant de jours, avec les dégâts éventuels.
 
Cette fois-ci, le pouvoir n’a pas pensé au bien-être (sic) de la population, ses militants y compris. La chose peut donc se réduire à ce raisonnement simple : NON à l’occupation de la nationale N°1 pendant quelques minutes ou heures, OUI à la coupure de l’Internet durant cinq (05) jours. Qui dit mieux ?
 
Tino Kossi
 
Source : Liberté
 

TogoActualité.com