Exigence à valeur constitutionnelle, la déclaration des biens et avoirs n’a jamais été respectée au Togo. En trois mandats, Faure Gnassingbé, le président de la République togolaise, ne s’est jamais plié à cette exigence. Contrairement à ce qui se fait dans la plupart des pays de la sous-région qui l’ont adopté, la présentation des biens et avoirs se fait juste après la prestation de serment du président élu. Au Togo, on s’est réfugié derrière l’absence de loi encadrant cette disposition pour s’y dérober. Eh bien ! cela ne pourra plus durer. Puisque le gouvernement réuni en conseil des ministres, mercredi dernier, est en train de s’exécuter. Un projet de loi est en train d’être adopté dans ce sens par le gouvernement. A rappeler que la loi auparavant adoptée est en train d’être révisée avant son application.
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La déclaration des biens et avoirs du Président de la République élargie désormais aux autres hautes personnalités, vise à encourager la bonne gouvernance et à lutter contre la corruption. Dans la pratique, on ne peut que s’en réjouir que ces personnalités puissent déclarer leurs biens au début et à la fin de leur fonction. Dans un pays où la corruption est criarde mais que personne n’a été jusque-là inquiétée, cette déclaration contribuera nécessairement à la moralisation de la vie publique. La loi actuellement en révision au gouvernement sera élargie aux autres présidents d’institution et aux directeurs de sociétés étatiques. Ces déclarations se feront désormais devant le Médiateur de la République ou le Président de la Cour constitutionnelle.
Si au Togo, Faure Gnassingbé n’a jamais déclaré ses biens et avoirs, c’est certainement à cause du différend qui l’a opposé au reste de sa famille au sujet du colossal héritage laissé par le Général Eyadema avant de mourir. Constitué pour la plupart des biens mal acquis amassés pendant plus de trois décennies de pouvoir sans partage, cet héritage estimé à plus de 3700 milliards de F CFA éparpillé dans des banques des quatre coins du monde, est à l’origine de l’affrontement fratricide entre ces orphelins milliardaires et qui a débouché sur l’arrestation de Kpatcha Gnassingbé le 12 avril 2009.
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Au cours du procès qui s’en est suivi, un des demi-frères du chef de l’Etat, en l’occurrence, Essolissam, a déclaré à la barre que la mésentente dans la famille à la suite du décès de leur père est née du fait que Faure Gnassingbé, gestionnaire des comptes de la famille et chef de la famille, s’est accaparé des biens de leur père et aurait écarté les autres membres de la famille. Une situation qui a amené Kpatcha Gnassingbé à bout de nerfs a déclaré au cours d’une réunion : « ce que faisait Faure était inadmissible et qu’il fallait le dégager du pouvoir ». Et donc c’est cette inimitié dans la famille au sujet de l’héritage qui a conduit à la condamnation de Kpatcha Gnassingbé à 20 ans de prison.
Comme on le voit l’héritage est au cœur du différend entre le chef de l’Etat et ses frères qui l’accusaient de ne pas jouer la transparence dans sa gestion. Alors comment le président de la République qui a refusé de faire le compte de l’héritage familial à ses autres frères peut-il présenter à la nation toute entière ses biens et avoirs sans susciter le courroux de ces derniers. C’est tout le dilemme qui explique l’absence de cette déclaration depuis plus de trois quinquennats. Maintenant s’il a décidé à le faire à travers le vote de la future loi, on peut croire que la brouille est dissipée et que la déclaration de ses biens et avoirs pourra se faire sans anicroche et en toute transparence.
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De toutes les façons, les autorités appelées à déclarer leurs biens doivent savoir que toute fausse déclaration sous serment est un parjure et comme tel est susceptible de condamnation.
A bon entendeur…
Albert AGBEKO/ Togoscoop.info
Source : Togoweb.net