Coupure de l’internet au Togo : Les conséquences d’une décision antidémocratiques

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Coupure de l’internet au Togo : Les conséquences d’une décision antidémocratiques

Pendant cinq (05) jours, le Togo a été mis en « blackout » total. La connexion internet a été coupée au grand désarroi des milliers d’utilisateurs. Cette décision antidémocratique, qui a vexé plus d’un, a eu des conséquences sur le quotidien des Togolais mais plus particulièrement sur l’économie nationale.

Le mardi 05 Septembre 2017 dernier, à la veille de la gigantesque manifestation de l’opposition, dans la soirée, la connexion internet a été bloquée sur toute l’étendue du territoire national. Selon certaines indiscrétions, cette censure avait explicitement pour objectif de saboter la mobilisation des partis politiques de l’opposition qui ont appelé leurs partisans à descendre dans la rue. En effet, comme nous l’avons si bien souligné dans un article paru, il y a deux semaines, l’internet et spécialement les réseaux sont aujourd’hui un moyen de communication par lequel, se mène ardemment le combat politique, en ce sens qu’il permet une diffusion rapide des idées, informations et images en temps réel.

Ayant pris conscience de ce changement important dans la liberté d’expression les hommes politiques ont investi la toile. « Les médias traditionnels, en l’occurrence la télévision, la radio ou encore la presse écrite n’offrent pas la liberté à toutes les franges de la population. De fait, ces derniers ont vu dans les médias sociaux, un terreau fertile à la liberté d’expression. En effet, depuis quelques années l’utilisation des smartphones et aussi la démocratisation de l’internet a pour entre autres conséquences, l’arrivée massive des jeunes togolais sur les ré- seaux sociaux. Aujourd’hui, plus de la moitié des jeunes togolais est régulièrement présente sur la toile. Au parfum de l’actualité en temps réel, ces jeunes s’informent de tous les activités de la vie sociale et s’intéressent de plus près aux déclarations des hommes politiques. Dans leur utilité éducative, les réseaux sociaux permettent aux Togolais de mieux comprendre les débats et les enjeux politiques lors des discussions objectives. La pensée unique n’est plus d’actualité.

De ce fait, ils sont capables de prendre des décisions qui émanent d’une profonde réflexion et murement réfléchies », écrivait votre journal dans sa parution numéro 237 du 30 août dernier. Souvent dépassé dans la communication sur les médias traditionnels, l’opposition togolaise a rapidement repris du terrain sur l’internet et à cela, il faut ajouter l’intéressement de plus en plus visible des jeunes aux affaires de la cité.

C’est ainsi que pour bloquer cet élan, les autorités ont été obligées de ploquer du 06 au 10 septembre la connexion. Mais en censurant l’internet, les autorités togolaises violent la résolution N’A/HCR/RES /32/13 du 1er juillet 2016 adoptée par le conseil des droits de l’Homme des nations unies portant sur la promotion, la protection et l’exercice des droits de l’Homme sur Internet qui : « condamne également sans équivoque les mesures qui visent à empêcher ou à perturber délibérément l’accès à l’Information ou à la diffusion d’informations en ligne, en violation du droit international des droits de l’Homme et invite tous les États à s’abstenir de telles pratiques et à les faire cesser ». Et dans ce genre de cas, le Togo doit s’attendre à des sanctions, qui peut être seront sans effet, mais d’ores et déjà l’on peut énumérer certaines conséquences désastreuses sur le plan économique.

L’impact sur les entreprises…

S’il est, pour le moment, difficile d’évaluer d’une façon précise les pertes engendrées par la dé- connexion du pays du réseau Internet, il n’en demeure pas moins que l’impact est bien réel. A commencer par le secteur des télécoms. Les deux opérateurs de téléphonie mobile, Atlantique Télécom (Moov) et Togocel qui commercialisent des forfaits Internet mobiles, ont dû enregistrer des pertes sèches en termes de ventes de datas.

Ce préjudice peut être très important dans le cas, notamment, des startups technologiques et des entreprises spécialisées dans les services aux entreprises. Les secteurs les plus touchés sont les assurances et les banques ainsi que l’administration. En plus d’être une journée « chômée payée d’office » pour ces secteurs, il est aussi « source de perte de clients et de prospects », explique un chef d’entreprise, qui a préféré garder l’anonymat. Pour lui, les perturbations sur le réseau décidées en haut lieu, sans être une coupure assumée, ont bousculé les habitudes de travail des entreprises qui n’y étaient point préparées. Selon notre interlocuteur, le coût de cette coupure n’est pas à appréhender seulement sous l’angle des pertes financières subies par les entreprises, mais aussi du point de vue de l’organisation du travail qui a bien évolué depuis l’avènement de l’internet. « La quasi-majorité des entreprises travaillent avec la messagerie électronique. Elles ont appris à travailler avec Internet. Et ce n’est pas du jour au lendemain qu’on peut réapprendre à travailler à l’ancienne », a-t-il expliqué. Et même s’il s’agissait seulement de bloquer les réseaux sociaux, cela aurait un coût.

Au-delà de ces conséquences, le Togo va être rétrogradé dans sa quête d’éligibilité à certains projets, notamment le Millenium Challenge Account (Mcc) dont les initiateurs ont fait de la liberté d’expression et l’accès à l’internet l’un des critères importants. Ce projet devrait apporter 30 millions de dollars au Togo.

Pour justifier cette coupure, les autorités togolaises vont évoquer « des pannes techniques », et s’ils ont un peu de marge l’argument de « l’ordre public ». Toutefois, il faut souligner que malgré cette interdiction, certaines personnes ont réussi à accéder à l’internet. Les parades trouvées par les populations sont la preuve que le « blackout » total est aujourd’hui une hypothèse totalement théorique. Pour contourner la censure des réseaux mobiles, il est ainsi toujours possible d’échanger des informations en wifi ou d’utiliser la carte SIM d’un opérateur étranger surtout que les réseaux des pays voisins franchissent facilement la frontière togolaise.

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