Les DSA voudraient dénoncer, avec la dernière vigueur, les conditions particulières qui ont été réservées à son Secrétaire général qui non seulement n’a recouvré sa liberté conditionnelle que le lendemain, mais a été soumis encore à des sévices dignes de ceux du KGB. En effet, ce dernier a été isolé des autres leaders pour être soumis à des tortures dont nous faisons l’économie, pour ne pas remuer le couteau dans la plaie de la victime. En outre, il a dû passer les trois nuits dans des sanitaires empestés. Nous nous interrogeons, avec raison, sur les motifs qui ont pu conduire au traitement différencié réservé à notre Secrétaire général. A ce propos, le parti DSA voudrait inviter les organisations nationales et internationales de défense des droits humains à se pencher sur ce cas au moment où la torture est devenue un crime imprescriptible. Il exige également que les auteurs ou leurs commanditaires de ces actes soient traduits devant les juridictions nationales ou internationales.
La procédure enclenchée contre le président démocratiquement élu et ses co-accusés est en cours, certes. Mais il convient de relever que celle-ci souffre d’ores et déjà de beaucoup de défaillances qui sont les marqueurs indubitables d’une justice sous ordre. Nous nous demandons si un juge ordinaire, dans l’armature judiciaire de notre pays, a compétence à connaître des faits liés au contentieux électoral. S’il était vraiment indépendant, il devrait savoir la suite à réserver à ce chef d’accusation porté contre le président démocratiquement élu. Cette attitude du doyen des juges d’instruction, violation flagrante du serment qu’il a prêté au début de sa carrière, ne saurait prospérer.
Par ailleurs, depuis que notre pays s’est engagé dans le processus de démocratisation, toutes les élections, à l’exception des législatives des 6 et 20 février 1994, ont été sujettes à des contestations, violences et crises postélectorales. Notre pays n’est pas voué à ce sort et il est plus urgent de sortir de ce tryptique élections, violences, dialogue. C’est pour cette raison que le parti DSA réitère, à l’instar des autres formations politiques et des organisations de la société civile, que le règlement de la présente crise doit passer, inévitablement, par le recomptage des voies bureau de vote par bureau de vote. Ce recomptage permettra non seulement de rétablir la vérité des urnes, mais surtout de conforter la légitimité au candidat qui sera reconnu vainqueur au terme de ce processus. Le Togo, notre pays, a besoin d’être gouverné par un président légitime, celui qui a effectivement reçu mandat du peuple, seul détenteur de la souveraineté nationale, pour réaliser ses aspirations pendant une période déterminée.
Pour la traduction dans les faits de cette exigence impérative, les DSA proposent l’institution d’une commission impartiale pour trancher le contentieux électoral né de la présidentielle du 22 février 2020. Elle pourrait être composée des autorités de principales églises qui, dans une lettre en date du 22 avril 2020, ont proposé leurs bons offices pour le règlement de la crise postélectorale. A celles-ci pourraient être associés le G5, un représentant de l’Union africaine, un représentant de l’ONU venu du siège, qui pourraient avoir une voix consultative, l’essentiel du travail devant être du ressort des Togolais eux-mêmes. Ce faisant, nous aurons prouvé à la face du monde que nous sommes un peuple mature, à même de trouver les solutions à ses problèmes.
Cette commission fera le travail auquel se livrerait un enseignant dont l’un des forts en thème dans sa matière contesterait la note obtenue et revendiquerait la première place. En pareilles circonstances, que ferait-il ? Il s’agirait, tout simplement, de demander à l’élève contestataire et à l’élève dont la note est contestée de lui apporter leurs copies afin qu’il refasse le calcul des points obtenus. Après avoir recompté les points, il saurait lequel des deux élèves aurait eu la meilleure note de la classe et mérité donc la première place. Cet enseignant ne devrait pas accepter la copie du contestataire sans procéder au recomptage des points, parce qu’il aurait obtenu son poste grâce à l’intervention du parent de l’élève dont la note et la position sont remises en cause. S’il se comportait ainsi, il aurait fait preuve de partialité et de malhonnêteté. Cette dernière attitude est toujours celle des institutions en charge de l’organisation des élections et de proclamation de leurs résultats dans notre pays.
Nonobstant les preuves évidentes de fraudes à grande échelle et d’achats de conscience massifs, qui sont pourtant des actes répréhensibles aux termes de certaines dispositions du code électoral parce que déteignant sur la transparence et la crédibilité des scrutins, ces institutions n’en tiennent pas compte et proclament les résultats au profit du camp au pouvoir. La suite, on la connaît : ces résultats suscitent de véhémentes contestations qui sont toujours réglées par des méthodes fortes. Le Togo et les Togolais ont suffisamment pâti de cette caporalisation des institutions et de cette volonté avérée du régime en place à s’éterniser au pouvoir. L’état de décrépitude du pays, la misère de ses habitants, l’exode massif des jeunes vers les pays voisins, la prolifération des métiers de subsistances ne sont pas des réalités étrangères à cette situation. Allons-nous continuer sur cette voix sans issue qui hypothèque gravement le présent et l’avenir de notre pays ? Même les pontes du régime sont suffisamment conscients de cette situation de notre pays. Il leur faut un supplément d’humilité et de sursaut patriotique pour reconnaître que les recettes qu’ils ont proposées, pour le développement de notre pays, ont montré leurs limites. Elles ont été d’ailleurs l’objet de plusieurs contestations à travers de gigantesques manifestations politiques et de mouvements sociaux.
Il est clair, dans ces conditions, que l’offre politique du parti au pouvoir ne requiert plus l’assentiment des populations qui ont décidé, cette année-ci, de porter leur choix sur le candidat de la dynamique Mgr Kpodzro. Souffrez que nous vous rappelons que les élections constituent un mécanisme de régulation de la vie politique qui permet aux partis politiques de gouverner, alternativement, selon le choix des citoyens, l’Etat, sur la base des projets de société. Pourquoi cette régulation est si difficile au Togo alors qu’elle est devenue une culture politique dans les pays voisins ? Certainement du fait de la peur de l’inconnu et de l’incertain pour les perdants. C’est le lieu de les rassurer que l’alternance, tant souhaitée par les populations togolaises depuis le 5 octobre 1990, ne se fera pas contre certains Togolais. Elle sera bénéfique aussi bien au pays qu’au parti battu aux élections, l’amenant ainsi à faire son aggiornamento en vue de la reconquête du pouvoir. L’exemple du Bénin est une pièce à conviction avec le retour de Mathieu Kérékou aux affaires en 1996, après sa traversée du désert qui n’aura duré que 5 ans. D’ailleurs, d’éminents juristes et politistes conviennent que l’alternance, c’est-à-dire la succession de différents partis politiques à la tête de l’Etat, constitue le pilier et le gage de la santé démocratique dans un pays. C’est dire que certains de nos compatriotes, en l’occurrence ceux du gouvernement sortant, n’ont pas de raisons valables pour s’opposer à l’alternance voulue par la majorité des Togolais lors de la présidentielle du 22 février 2020.
Le 27 avril 1960- le 27 avril 2020, il y a de cela 60 ans que les Togolais, après leur lutte acharnée qui a commencé dès la soumission de leur pays au pouvoir colonial, ont recouvré leur indépendance. L’espoir suscité par cette accession était immense et se trouve matérialisé par le désir de faire de ce territoire « l’or de l’humanité ». Soixante après cet événement qui constitue, pour le président Sylvanus Olympio, le père de l’indépendance, la naissance de la nation togolaise, il est clair que cette aspiration légitime est restée un vœu pieu. Il en est ainsi parce que l’indépendance conquise a été aussitôt confisquée pendant 53 ans par une oligarchie militaro-civile. De même, sur les 60 ans d’indépendance, 30 ans ont été marqués par des affrontements politiques stériles qui ont enfoncé le pays dans une profonde léthargie, du fait de la volonté obstinée d’un camp à s’éterniser au pouvoir contre la volonté populaire.
A l’occasion de la commémoration du 60e anniversaire de l’accession de notre pays à sa souveraineté nationale et internationale, les DSA voudraient souhaiter une bonne fête de l’indépendance aux Togolais de l’intérieur et de la diaspora. Ils voudraient convier toute la classe politique, dans son ensemble, à se saisir de cette occurrence pour créer les conditions d’un nouveau départ dans notre vie commune. Il s’agit, de manière triviale, pour le gouvernement sortant d’accepter la transmission pacifique du pouvoir et pour la Dynamique victorieuse de la présidentielle de promettre la réconciliation et la mise à contribution de toutes les formations politiques, y compris la vaincue, aux efforts de refondation de notre pays, pour en faire un Etat dispensateur de soins et d’éducation de qualité, d’emplois décents et d’infrastructures adéquates à sa population.
Nous saisissons l’opportunité pour remercier les partis politiques frères, les organisations de la société civile, les acteurs de défense des droits humains, les autorités religieuses et les chancelleries occidentales dont l’action conjuguée a permis la libération conditionnelle du président Agbéyomé Kodjo et de ses co-accusés. Nous voudrions également compter sur le soutien et l’accompagnement de tous ces acteurs pour une issue heureuse de la crise postélectorale et, par ricochet, de la crise politique de notre pays.
Que l’Eternel bénisse le Togo, ses leaders politiques et les inspire davantage afin qu’ils acceptent de travailler, de concert, à offrir aux Togolais la paix, la concorde et la prospérité partagée.
Fait à Lomé, le 27 avril 2020
Pour le bureau exécutif,
Le Secrétaire administratif,
Gbare NABINE
–
Source : icilome.com