Depuis plusieurs semaines, les passages se multiplient à la frontière entre le Canada et les États-Unis. Face à un contexte tendu aux États-Unis vis-à-vis de l’immigration, les groupes de migrants, souvent des familles, sont de plus en plus nombreux à risquer leur vie pour atteindre le sol canadien depuis le nord des États-Unis.
Pour mieux comprendre qui sont ces réfugiés et pourquoi ils se rendent au Canada, le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a mené une mission au poste-frontière de Lacolle, à 70 km au sud de Montréal, et à proximité, au débouché du chemin Roxham où des familles entières passent avec valises et poussettes (voir carte ci-dessous).
«Il y a eu de tout temps des passages», souligne le représentant au Canada du HCR, Jean-Nicolas Beuze. Mais sans chiffres officiels récents, la question est «de savoir si ce phénomène est en train d’augmenter dans des proportions importantes ou tout à fait acceptables».
Tout comme les risques lors des traversées de la Méditerranée n’empêchent pas des migrants de tenter de gagner l’Europe, la neige et le froid canadiens ne découragent pas les tentatives. Les marches de plusieurs kilomètres se font en partie de nuit, par -20 degrés.
Pratiquement tous «se sont débrouillés seuls» grâce à «l’information disponible sur Internet, donc sans avoir nécessairement besoin d’avoir recours à un passeur». Après une marche de plus de 10 km dans la neige, désorientés, certains «ont pris l’habitude de nous appeler, perdus ou transis de froid, et nous les récupérons sur le bord de la route», indique le caporal Paul Manaigre de la Gendarmerie royale du Canada.
«Quand j’ai su que le service de l’immigration me cherchait» aux États-Unis, «j’ai décidé de tenter ma chance et de demander l’asile au Canada», racontait à l’AFP au début du mois de février un Somalien, aux côtés de certains compagnons ayant les doigts gelés sous des bandages.
Les personnes rencontrées par l’agence onusienne «sont des gens de classe moyenne à élevée, bien éduqués, sachant pertinemment ce qu’ils font après avoir bien préparé leur voyage», explique Jean-Nicolas Beuze. «La plupart d’entre eux étaient en transit aux États-Unis, en provenance directe de leur pays d’origine avec, pour différentes raisons, un visa valide pour les États-Unis.»
Yéménites, Soudanais, Syriens ou Turcs, la majorité sont des familles et «a priori des gens qui avaient une bonne raison de quitter leur pays avec de fortes chances d’être reconnus comme réfugiés».
Pour le représentant du HCR, ces personnes entrent donc dans la catégorie des «réfugiés» car «elles risquent la persécution dans leur pays d’origine». Tous témoignent de leur peur de rester aux États-Unis, avec le risque d’être expulsés à tout moment vers leur pays d’origine.
En vertu d’un accord canado-américain, les demandeurs d’asile en provenance des États-Unis sont généralement refoulés aux postes-frontières du Canada. Mais ça ne s’applique pas à ceux franchissant illégalement la frontière en d’autres points, comme par exemple en rase campagne où la frontière n’est pas matérialisée. Une fois repéré, ils sont interpellés par des agents de la Gendarmerie royale du Canada.
Les arrivées de migrants, pour la plupart en situation irrégulière aux États-Unis, sont en nette augmentation au Manitoba. Au 20 février, 99 personnes avaient passé la frontière depuis le début de l’année pour demander l’asile, selon les autorités locales. L’Agence des services frontaliers du Canada en a répertorié plus de 400 depuis mai dernier. La tendance inquiète les responsables municipaux d’Emerson qui ont appelé les autorités fédérales et provinciales à augmenter les ressources sur place pour faire face à la situation.
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